Midi Olympique

LA LIGUE DES OPTIMISTES

DANS LE SILLAGE D’UN SONDAGE UN RIEN SURPRENANT, ON A DÉCIDÉ, AU MIDOL, DE REJOINDRE LA LIGUE DES OPTIMISTES ET D’ACCUEILLIR LA NOUVELLE LIGNE D’ATTAQUE TRICOLORE COMME LA PLUS BELLE DES PROMESSES...

- Par Marc DUZAN marc.duzan@midi-olympique.fr Entraîneme­nt des Bleus cette semaine à Marcoussis.

Soudain, le mythe du « Gaulois ronchon » en a pris un coup. Mû par un irrépressi­ble élan d’optimisme -ou d’indulgence, allez savoir- un échantillo­n représenta­tif de Français a donc donné, au fil d’un sondage Odoxa réalisé pour RTL, le XV de France favori du Tournoi des 6 Nations. Avec 31 % d’opinions favorables, les Bleus devançaien­t donc le pays de Galles (20 %) et l’Angleterre (19 %). L’Irlande, qui depuis le Mondial 2015 avait connu plus de victoires (2) que de défaites face aux All Blacks (1), squattait piteusemen­t la quatrième place de ce classement un rien lunaire, pour quiconque connaît du rugby autre chose que Michalak ou le père Noël de Berjallie.

Seulement, le vent d’euphorie entourant à présent les Bleus ne semble connaître aucune limite et, il y a quelques semaines, Jacques Brunel recevait même des mains de l’Hendayais Bixente Lizarazu le trophée de « manager de l’année ». T’es sérieux, « Liza » ? Non pas que Jacques Brunel soit un mauvais entraîneur, son palmarès tend à prouver le contraire. Mais depuis qu’il a pris en mains la sélection nationale, début 2018, le Gersois compte un ratio similaire à celui qui était le sien lorsqu’il entraînait la très modeste Squaddra azzura : onze matchs, trois victoires et huit défaites. Alors, quand Serge Simon déclare finalement que « le Tournoi, faut le gagner ! », on a beaucoup de mal à prendre l’annonce du vice-président de la FFR pour autre chose que ce qu’elle est vraiment : un bavardage politique.

WAOUH, QUELLE LIGNE !

De fait, il semble que cohabitent aujourd’hui deux mondes parallèles. D’un côté, un essaim de chalands butinant du rugby à l’occasion et le plus souvent lorsque le XV de France gagne. De l’autre, un noyau d’aficionado­s conscient que la réalité du XV de France n’a actuelleme­nt rien à voir avec le sondage « cul cul la praline » présenté plus haut, une niche de fidèles n’oubliant pas que cette année, ces Bleus, battus il y a deux mois par les Fidji (14-21), sont les soudards de la neuvième nation mondiale et qu’en 2019, le vieux Tournoi leur promet deux déplacemen­ts sympathiqu­es (l’Angleterre et l’Irlande) ainsi qu’un voyage par tradition piégeux (l’Italie). À l’heure où ces Gallois, invaincus depuis neuf matchs, débarquent à Saint-Denis, on a pourtant d’infimes raisons de croire qu’il est fini, le temps où l’on broyait du noir et mangeait des cailloux. Pour la première fois depuis qu’il a été nommé sélectionn­eur, Jacques Brunel s’est en effet départi du conformism­e qui était jusque-là le sien. En laissant de côté Mathieu Bastareaud pour faire une place dans l’équipe à Romain Ntamack, 19 ans, il a tout à coup fait basculer sa ligne de trois-quarts, jusqu’ici caractéris­ée par sa lenteur pachydermi­que, vers une plateforme offensive aguichante.

Avec Ntamack, le sélectionn­eur se dote d’un deuxième meneur de jeu. D’un joueur qui ralentit le temps au profit de ses partenaire­s doublé d’un passeur capable de mettre les sprinteurs que sont Wesley Fofana, Yoann Huget ou Damian Penaud dans l’intervalle.

Par rapport à 2017, date à laquelle les Bleus avaient battu les Diables Rouges au Stade de France, l’équipe de France présentera donc sept nouveaux joueurs (Machenaud, Trinh-Duc, Grosso, Doumayrou, Bastareaud, Fickou et Fall étaient alors titulaires) dans sa ligne de trois-quarts, une révolution qui peut à la fois faire peur les automatism­es, nom de Dieu ?) et donner foi, puisque vous conviendre­z avec nous que la ligne de 2017 avait un côté « forts des halles » quelque peu déconnecté des réalités du rugby moderne.

Toute la semaine, les Bleus nous ont enfin juré vouloir mettre le feu au terrain, se faire des passes et tirer un trait sur la lenteur crasse qui fut la leur à l’automne. « Ces rucks de trois secondes, soufflait Camille Lopez à ce sujet, ça ne peut vraiment plus durer. Pour accélérer les libération­s, il va nous falloir mettre des coups de casque. » Bon an mal an, ce laïus semble bon camarade et, puisque Jacques Brunel a enfin cédé aux velléités de Jean-Baptiste Elissalde sur l’ultra nécessité de changer les morphotype­s arrières, on est tous décidé à accueillir la déclaratio­n d’intention des Tricolores comme la meilleure des nouvelles. Malgré tout, ce nouvel équilibre pousse aussi à s’interroger sur le cas Bastareaud. Appelé à la rescousse après le licencieme­nt de Guy Novès, présenté l’an passé comme le sauveur du XV de France et trop rapidement nommé vice-capitaine, le Toulonnais n’apparaît plus aujourd’hui dans le 15 majeur de Brunel. Comment le staff des Bleus va-t-il gérer ce dossier épineux ? Comment Brunel et ses adjoints vont-ils nous expliquer qu’ils se sont trompés ? Dans la mesure où les patrons sportifs de la sélection ont décidé de faire sans « Basta », il va bien falloir lui annoncer un jour ou l’autre : car si on aurait aucun mal à voir Médard, Fall ou Belleau en « Adil Rami » du XV de France (le mec qui ne joue pas mais qui le vit bien), on a davantage de mal à imaginer Bastareaud dans la tenue de comique troupier. Mais on peut se tromper…

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