Midi Olympique

MAY FAIT CE QU’IL LUI PLAÎT

L’AILIER ANGLAIS JONNY MAY A ASSOMMÉ LES FRANÇAIS AVEC SON TRIPLÉ EN MOINS D’UNE DEMI-HEURE. PORTRAIT DE CE LÉVRIER MODERNE CONNU POUR SON GOÛT DE L’EXCENTRICI­TÉ ET SON TRANSFERT DE L’ÉTÉ 2017. PAS CELUI DE NEYMAR, MAIS PRESQUE...

- Par Jérôme PRÉVÔT jerome.prevot@midi-olympique.fr

Un triplé en vingt-neuf minutes, le premier de sa carrière internatio­nale. Jonny May a méchamment estourbi le XV de France. On a aussi remarqué qu’il était dans le coup sur l’essai de Farrell, dans un beau mano a mano avec Antoine Dupont. Il aura surtout laissé son bristol à Damian Penaud, effacé d’un cadrage-débordemen­t sur le second essai, après avoir été pris de vitesse sur le premier (service au pied de Daly) après soixanteci­nq secondes de jeu.

C’est vrai que le jeu dans le dos de la défense française décidé par les Anglais tablait sur les jambes de lévrier de cet ailier, pas si jeune que ça, 28 ans et finalement, pas très connu en France. Peut-être parce qu’il n’a pas gagné grand-chose dans sa carrière. Il n’était pas là lors du Grand Chelem 2016 et n’a soulevé aucun trophée avec ses deux clubs profession­nels : Gloucester puis Leicester depuis 2017.

INVITÉ PAR LA CORÉE DU NORD

Il s’est contenté de récompense­s individuel­les, comme celui de l’essai de l’année du championna­t anglais de 2011-2012 qui coïncida avec celui de joueur de l’année de Gloucester. En équipe nationale, il avait crevé l’écran en novembre 2014 avec, déjà, un essai de folie : cinquante mètres de course solitaire au nez de plusieurs défenseurs all blacks. On a parfois relevé qu’il avait, à l’entraîneme­nt des tests de vitesse supérieurs à ceux Usain Bolt mais l’intéressé a toujours dénié cette comparaiso­n, jugeant qu’on ne pouvait pas mettre sur le même plan la pratique des deux sports. Jonny May est un joueur à l’ancienne, un finisseur qui aime les espaces, plus que l’épreuve de force. Quand on le croise, son physique témoigne d’une minceur et d’une légèreté qui tranchent avec les corps d’Hercule de la plupart des joueurs. Mais, la longueur de ses compas fait la différence.

On le décrit aussi comme un esprit original, un homme qui aime bien cultiver la différence. « Oui j’aime bien être me sentir différent. » On l’avait remarqué quand il avait déclaré publiqueme­nt s’intéresser au régime nord-coréen, non pas pour le soutenir, mais pour en comprendre les arcanes. Pyongyang l’avait pris au mot en l’invitant à venir visiter le pays en compagnie de son coéquipier Ben Te’o. Il l’avoue, il n’osa pas franchir le pas, pris par ses obligation­s profession­nelles. Et puis, c’est vrai, une photo de lui avec Kim Jong Hun, vrai dictateur totalitair­e, aurait sans doute fait mauvais effet.

AMI DE ED SHEERAN

Plus étonnant, il est un ami d’enfance de Ed Sheeran, le chanteur pop. C’est même sa maman qui lui a appris à jouer de la guitare. « Oui, nous étions amis, on jouait au foot ensemble, mais il était déjà très branché musique. Je l’ai vu plusieurs fois en concert et je passe lui dire bonjour en coulisses. Nous échangeons des tickets pour les matchs et les concerts. Enfants, nous avions été garçons d’honneur au mariage d’un ami de nos parents et il avait déjà chanté devant 50 personnes. Un grand souvenir. »

Jonny May est un vrai joyeux drille, un animateur qui génère la bonne humeur, avec qui la cohabitati­on est agitée, parfois perturbatr­ice. George Ford s’en souvient puisqu’il l’hébergea pendant trois semaines lors de son arrivée précipitée à Leicester en 2017.

Abondammen­t commenté, ce changement de club témoigne aussi de son goût pour l’originalit­é. Pas pour s’amuser cette fois mais pour des raisons plus terre à terre. Car Jonny May fut le premier rugbyman à faire jouer une clause automatiqu­e qui obligeait Gloucester à le laisser partir en cours de contrat, en échange d’une somme d’argent égale à une année de salaire. En fait tous les contrats du rugby pro anglais comprenaie­nt cette clause depuis dix ans, mais jusquelà, aucun joueur n’avait osé imposer un tel départ forcé à un club.

Les patrons de Gloucester n’avaient pas apprécié, en invoquant des moeurs de plus en plus proches de ceux du football. La fameuse clause a d’ailleurs été supprimée à l’unanimité des clubs depuis. Jonny May a bien sûr regretté d’avoir quitté son club formateur dans des conditions qu’il aurait préféré éviter, avant de nier toute chasse au gros salaire. « Mais des raisons purement sportives. » Oui, Leicester passait encore pour un club supérieur. En tout cas, en cet été 2017, les autres internatio­naux anglais et plus particuliè­rement Danny Care l’ont tout de suite surnommé « Maymar » pour son transfert record. Preuve du rayonnemen­t des affaires du PSG outre-Manche.

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Jonny May célèbre ici son deuxième essai après avoir éliminé Damian Penaud. Photo Icon Sport

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