AU PRESQUE PARFAIT
LES BLEUES SE SONT BIEN REMISES DE LA CLAQUE REÇUE EN ANGLETERRE. LEUR APPÉTIT DE JEU A ÉTÉ ENTHOUSIASMANT. RESTENT CES DEUX ESSAIS ENCAISSÉS UN PEU CONTRARIANTS.
Le Nord est devenu depuis samedi l’un des nouveaux territoires consacrant les femmes du rugby, où elles ont reçu un accueil tout à fait digne de l’enthousiasme que cette équipe de France génère. Les neuf mille spectateurs, chantant spontanément la Marseillaise à chaque fois que ces Bleues ont traversé un moment difficile, ont rendu attachant leur soutien inconditionnel, aussi prompt à applaudir les grandes envolées qu’à se mouvoir en seizième femme dans les instants de fébrilité. Ce fut le seul défaut des Bleues en ce samedi soir de grande messe inédite. Ce premier voyage tout en haut de la France sur le terrain des « Putains de nanas » (sic), où les filles de l’Ovalie, vaille que vaille, se démènent pour exister, de baisser pavillon à deux reprises malgré leur écrasante domination. Ces deux essais encaissés sur les deux seules incursions écossaises dans leur zone de marque ont provoqué l’inévitable petite moue d’Annick Ayrault, regrettant que les adversaires « aient inscrit autant de points qu’elles le pouvaient ». Mais quinze jours après la grande grimace du voyage un peu humiliant en Angleterre, le manager s’est montrée tout sourire et satisfaite des enseignements de cette rencontre gagnée à l’avance.
LA PREMIÈRE D’EMMA COUDERT
En ce week-end de confrontation déséquilibrée, il n’y avait pas d’autre suspens que de savoir par quel bout les Françaises allaient saisir leur victoire contre cette petite nation du rugby féminin. Mais il ne fallait pas minimiser le poids des choix du staff tricolore. En rapatriant de France 7 développement la jeune Uselloise de Romagnat Emma Coudert, en lui donnant sa première titularisation à l’ouverture dans le Tournoi à seulement dix-neuf ans, et pour ce match du rachat, les responsables du rugby féminin ont lancé officiellement leur campagne de préparation jusqu’à la prochaine Coupe du monde. Son coup d’envoi manqué, qui n’a pas franchi la barre des dix mètres réglementaires, a signifié immédiatement la fébrilité que pouvait générer pareille responsabilité. La suite de sa prestation, et ses deux coups de pied gagnant pour le centre Gabrielle Vernier (la locale de l’étape et son aînée de deux ans à peine) ont laissé traîner l’impression que ce quinze de France pouvait puiser encore dans quelques ressources et doubler des postes essentiels où les cadres tiennent déjà la baraque. Le match de la formidable troisième ligne Coumba Diallo, remplaçante en Angleterre, au four et au moulin à Lille, a fait surgir ce que la concurrence tire de mieux de ces filles du groupe France. Les six changements apportés dans le quinze de départ à la suite de la déroute de Castle Park, ont produit tous leurs effets. « Je lui tire mon coup de chapeau ! Ce qu’elle a fait à dix-neuf ans est très appréciable. On la connaissait déjà mais ça fait chaud au coeur de voir que le soufflé ne retombe pas », disait l’inégalable Pauline Bourdon au sujet de la rentrée d’Emma Coudert à l’ouverture, un poste où elle-même excelle. La petite Bayonnaise est sortie comme souvent au rang des grandes dames de cette confrontation. Le quinze de France voulant se racheter et donner du plaisir à son public, elle a impulsé chacune des actions où elle le pouvait, jouant à trois reprises dans des endroits fermés, de trois petites chisteras habiles pour son pilier Maylis Traore Dhia. De l’engagement, des initiatives, des prises de risque et de grandes envolées : cette équipe s’est totalement remise de sa déception anglaise, et peut se présenter tout à fait confiante face à ses deux derniers défis, ses deux derniers déplacements programmés en Irlande et en Italie. ■