LA MACHINE MOALA
GEORGE MOALA - CENTRE DE CLERMONT SEUL JOUEUR DE L’EFFECTIF À AVOIR DISPUTÉ LES 400 MINUTES DE LA CAMPAGNE EUROPÉENNE, LE BLACK PEUT SE TARGUER D’ÊTRE DEVENU UN ÉLÉMENT ESSENTIEL À SON ÉQUIPE…
C’est à l’heure de jeu, samedi dernier, qu’un stade tout entier sombra dans un silence de cathédrale, d’autant plus assourdissant dans le contexte d’un record d’affluence au Michelin. Comme si 19 000 poitrines venaient de s’arrêter de battre avant de pousser un profond « aah ! » de douleur et d’empathie, lorsqu’autant de paires d’yeux observèrent sur le ralenti de l’écran géant le genou droit de George Moala se plier en porte-à-faux, sous le poids d’un déblayage irlandais. Un être humain digne de ce nom aurait-il pu se relever de pareille torsion, qui aurait, a minima, valu une énorme entorse au commun des rugbymen ? Évidemment que non. Sauf que George Moala n’est précisément pas taillé dans le même bois que le commun des rugbymen, et encore moins que le commun des mortels. Le NéoZélandais se contentant, après un long arrêt de jeu, de se relever en boitillant après son examen par le soigneur auvergnat, avant de délivrer quelques ruades rageuses dans le sol comme pour mieux « tasser » son genou. Et de reprendre sa place en défense, comme si de rien n’était… « Je crois que tout le monde l’a vu, ironisait le manager Franck Azéma lors de son point presse. Il s’est pété les croisés mais a dit que c’était bon. Et il est reparti… » La meilleure preuve en étant cet essai inscrit une quinzaine de minutes plus tard, au bout d’une longue course qui le vit résister à trois défenseurs.
LEE : « IL NE FAIT PAS QUE FONCER COMME UN BUFFLE »
Un surhomme, Moala ? N’exagérons rien… Mais forcément un être à part, doté d’un patrimoine génétique hors normes, ainsi qu’il le démontre sur chacune de ses charges, ballon en main. Où l’extraordinaire souplesse de ses articulations, alliées à une fréquence de jambes exceptionnelle et une force de buffle dans le haut du corps, font du All Black aux 4 sélections un M. Indestructible, une machine de guerre, capable de gagner du terrain même avec plusieurs adversaires sur le dos, et de casser n’importe quelle défense. « J’essaye d’être présent physiquement pour pouvoir créer des espaces pour mes coéquipiers. C’est mon jeu de casser les défenses et de gagner du terrain pour les autres. »
Un atout dont l’ASM aurait évidemment tort de se priver, les courses de Moala permettant à son équipe de jouer systématiquement dans l’avancée dans un deuxième temps, où de toujours fixer plusieurs défenseurs lorsque Camille Lopez décide d’utiliser son centre en leurre. Un danger permanent, qu’il porte le ballon ou non, et d’autant plus efficace que Moala sait lorsque la situation le demande sortir de son registre de perce-muraille pour négocier les surnombres comme ils doivent être joués. « Il ne fait pas que foncer comme un buffle dans un mur, et c’est sa force » jure Fritz Lee à son propos. George peut aussi bien asseoir n’importe quel défenseur que l’éviter, ou assurer la continuité passant après contact. Et si besoin, il a aussi une très longue passe… » Un joueur plus indispensable que jamais, en somme. La preuve ? Avec 5 essais marqués et 27 défenseurs battus depuis le début de la compétition, Moala n’est devancé d’un point de vue statistique que par les Racingmen Teddy Thomas (6 essais) et Virimi Vakatawa (30 défenseurs battus). Le roi George pouvant même se targuer d’être le seul joueur de l’effectif auvergnat à avoir disputé l’intégralité de la campagne européenne, avec 400 minutes passées sur les terrains (Lee, Raka et Toeava ayant tous quitté au moins une fois le terrain). Une machine, on vous dit… ■