Midi Olympique

« J’aurais peut-être gardé quatre ou cinq gars d’expérience ! »

- Propos recueillis par Jérôme PRÉVÔT jerome.prevot@midi-olympique.fr

CÉDRIC HEYMANS - Ancien joueur internatio­nal L’ANCIEN AILIER DE TOULOUSE ET DU XV DE FRANCE NOUS LIVRE SES IMPRESSION­S SUR LA CURE DE JEUNISME QUI FRAPPE LE XV DE FRANCE, LUI QUI AVAIT VÉCU CELLE DE 2008 QUAND MARC LIÈVREMONT AVAIT PRIS LES RÊNES DES BLEUS. Que pensez-vous de cet afflux de jeunes en équipe de France ?

Tout sélectionn­eur a besoin de marquer de son empreinte ses premières listes. Il est donc normal qu’il y ait du changement. Je vois deux explicatio­ns majeures : les deux titres mondiaux des moins de 20 ans, et ne l’oublions pas, la politique des JIFF qui porte ses fruits. Et donc, il est assez logique de voir les jeunes arriver, même si j’aurais aimé à titre personnel, voir des anciens rester pour passer le relais. Mais je reconnais aussi avoir été frappé par un raisonneme­nt de Fabien Galthié. Il a déclaré que les équipes championne­s du monde avaient 28 ans de moyenne d’âge et une trentaine de sélections. Quand on observe l’équipe actuelle on est à 24 ans. Ça tombe bien pour 2023, y compris pour le nombre de sélections. Donc je comprends sa logique.

On sent que vous auriez aimé voir Maxime Médard dans le groupe.

Oui, c’est exact.

A-t-il encore le niveau selon vous ?

Sur ce que j’ai vu en Coupe du Monde et en début de saison, je crois qu’il n’y a pas de problème de ce côté-là. Plus généraleme­nt, vu ce que j’ai vécu en 2011, j’aurais conservé quatre ou cinq garçons d’expérience pour la première année et surtout pour ce premier Tournoi où l’on peut taper fort si on bat l’Angleterre d’entrée. Car ensuite, le calendrier peut nous être favorable.

Quel est le risque de faire jouer trop de jeunes ?

Personnell­ement, je n’aime pas les notions de « tournoi Laboratoir­e » ni de « défaite encouragea­nte », mais si on décide que la victoire n’est pas primordial­e, il n’y a pas de risques à faire jouer des jeunes, en effet. Il ne nous reste qu’à voir s’ils passent au révélateur d’une certaine exigence, notamment en termes d’intensité.

Fabien Galthié conçoit l’entraîneme­nt comme une performanc­e en soi. Avec des séances chronométr­ées et très calibrées. Êtes-vous surpris ?

Non car j’ai compris en étant éducateur qu’avec les jeunes, on est vite confrontés à un problème d’attention. Passé quarante minutes, ils ont du mal à se concentrer. Il faut donc amener de la densité et de l’efficience. Une séance de deux heures sera en grande partie perdue, car les informatio­ns d’après la 40e minute seront diffuses. Il vaut mieux multiplier les séquences courtes à haute intensité, de plus en plus précise à mesure que le match approche. J’ai vu ça récemment à Bayonne avec Yannick Bru qui impose des séances cliniques et qui cherche à faire passer des « idées claires ». Même quand je jouais à Toulouse, je vivais ça, certaines séances du mercredi étaient plus violentes que les matchs.

Le but c’est de ne plus être dans l’analyse, d’une situation qu’on a déjà vécue, mais dans l’adaptation. Fabien Galthié est dans cette filiation.

Parmi les « jeunes » de la liste des 42 quels sont ceux qui vous impression­nent le plus ?

Forcément la charnière Dupont-Ntamack a encore prouvé contre Gloucester à quel point elle maîtrisait son sujet. Je suis aussi ravi de ce que je vois d’Anthony Bouthier, qui jouait en Pro D2 l’an passé, et qui est bien chapeauté par Xavier Garbajosa à Montpellie­r. Ça ouvre bien des réflexions. J’attends de voir ce que va nous montrer l’autre Montpéllié­rain, Tanguy Ndombele, un gars qui est très remuant et qui a un gros volume d’interventi­on.

Le cas de Teddy Thomas fait toujours débat. Qu’en pensez – vous ?

Son cas fait débat à cause de son passé, il le poursuivra toujours. Mais je pense qu’il a mûri et qu’il fait moins de fautes d’inattentio­n et qu’il fait des choses remarquabl­es en un contre un, revoyez son match à l’Arena face à Clermont. Il est peut-être un peu à part, il faut lui laisser cette petite part de liberté.

En 2008, vous aviez vécu l’arrivée de Marc Lièvremont qui lui aussi, avait lancé énormément de jeunes.

Oui, il avait testé beaucoup de joueurs avec énormément de rotations. On le lui avait reproché en disant qu’il allait trop loin. Mais je n’oublie pas qu’ensuite, il était revenu à des joueurs d’expérience, pour la Coupe du Monde 2 011. Les Yachvili, Harinordoq­uy, Traille…. Il avait essayé de jouer la «carte jeunes», mais sans doute que le réservoir était moins profond qu’aujourd’hui.

A priori, que vous inspirent les premières sorties médiatique­s du staff des Bleus ? On sent que c’est très maîtrisé, jusqu’au langage. C’est sûr, ils se sont entraînés…. à entraîner. Si Fabien Galthié et son staff vont jusqu’au bout dans cette philosophi­e d’amener un groupe de 42 joueurs jusqu’à la victoire en Coupe du Monde. Il aura fait ce que personne n’ a fait. ■

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