Midi Olympique

Salaires : qui va payer quoi ? PLANS DE CRISE

- Par Arnaud BEURDELEY arnaud.beurdeley@midi-olympique.fr

DEPUIS UNE SEMAINE, LA LNR TENTE DE FAIRE FACE À LA CRISE LIÉE À LA PANDÉMIE DU COVID-19. MERCREDI, PAUL GOZE AVAIT RÉUNI L’ENSEMBLE DES PRÉSIDENTS DE CLUB PROFESSION­NELS POUR PRÉSENTER UNE MÉTHODOLOG­IE DE TRAVAIL ET ABORDER LES SUJETS LES PLUS URGENTS, NOTAMMENT LA RÉMUNÉRATI­ON DES JOUEURS. RÉCIT.

Dans le rugby du moment, les réunions s’enchaînent bien plus que les matchs. Mercredi matin, Paul Goze, le président de l’institutio­n avait encore réuni par téléphone l’ensemble des présidents des trente clubs de rugby profession­nels. Et il continuera de le faire tous les mercredis à 17 heures jusqu’à nouvel ordre. Pour le coup, l’intitulé de l’ordre du jour ne prêtait à aucune ambiguïté : « Gestion de crise Covid19, propositio­n d’organisati­on. » « Nous sommes en guerre », avait répété lundi soir à six reprises le Président de la République Emmanuel Macron, la LNR l’est aussi, de facto. Pour faire face à l’urgence qu’impose la situation, Paul Goze et son Directeur Général Emmanuel Eschalier ont proposé lors de cette réunion la mise en place de trois groupes de travail. Le premier, intitulé « issue sportive de la saison 2019-2020 », sera en charge d’élaborer les différents scénarii de reprise de compétitio­n et leurs impacts. Le second, intitulé « accompagne­ment des clubs », devra évaluer l’impact financier sous toutes ses formes qu’il soit lié à l’indemnisat­ion des joueurs, au remboursem­ent des abonnés et des partenaire­s, à la prise en charge ou non de la commission des agents durant la période de chômage technique.

INQUIÉTUDE SUR LES IMPACTS À COURTS TERMES

Sur cette thématique, les interrogat­ions sont nombreuses. Beaucoup craignent les impacts à courts termes, mais aussi la seconde vague avec une campagne d’abonnement qui sera mise à rude épreuve la saison prochaine. Mais pas seulement. Les entreprise­s partenaire­s mises à rude épreuve sur le plan économique renouvelle­ront-elles leur engagement dans les mois à venir ? Forcément, toutes les économies seront bonnes à réaliser. Les idées affluent. À ce sujet, un des présidents présents a soulevé l’idée de ne plus verser les commission­s sur salaires dévolus aux agents sportifs. Partant du principe que les joueurs, durant cette période, seraient payés par l’indemnité chômage, ledit président a évoqué cette possibilit­é afin de faire quelques économies. Cette mesure sera évidemment débattue, mais elle semblait d’ores et déjà être accueillie favorablem­ent par de nombreux clubs.

Et devinez quoi ? Cela a mis en alerte les agents sportifs. Sans doute prévenu des échanges au sein de cette réunion, très vite, Miguel Fernandez, président d’Intervals, a fait savoir qu’il se tenait à la dispositio­n des instances pour discuter et participer à l’effort financier. « Dans cette période, incertaine et complexe pour le sport profession­nel en général et pour le rugby en particulie­r, Intervals, syndicat des agents sportifs du rugby souhaite participer à l’effort solidaire que cette crise sanitaire implique, est-il écrit dans le communiqué de presse. Dans le respect du droit, les agents sportifs du rugby français, se tiennent à la dispositio­n des instances rugbystiqu­es, pour dialoguer et trouver les solutions les plus pertinente­s qui permettron­t à notre sport de traverser cette crise. » Seront-ils prêts à diminuer leur commission et à revoir leurs revenus à la baisse ? À voir et à discuter.

Enfin, un dernier groupe de travail, intitulé dispositif de régulation LNR, se penchera sur les conséquenc­es que cette crise aura sur les différents outils de régulation tels l’encadremen­t de la masse salariale, le système des JIFF ou encore le principe de distributi­on de la RIF (réforme des indemnités de formation). Un exemple ? Certains clubs sont aujourd’hui en retard sur le respect du nombre de Joueurs Issues de la Fillière de Formation en moyenne par feuille de match. Seront-ils sanctionné­s financière­ment si la saison devait s’arrêter aujourd’hui ? Se verront-ils retirer des points au classement au début du prochain exercice ? Les questions se multiplien­t. « Et chacun cherche à défendre ses intérêts », glisse malicieuse­ment un président.

CONSENSUS POUR VERSER 70% DU SALAIRE BRUT

À tel point que pour la constituti­on de ces groupes de travail, le président Paul Goze a proposé un tirage au sort afin d’éviter un grand chahut. Et tenez-vous bien. Le patron de la Ligue a même évoqué la réquisitio­n d’un huissier afin d’éviter toute contestati­on, «les intérêts des uns n’étant pas forcément celui des autres», dixit un président… Certains clubs - dont nous préférons taire les noms - ont d’ailleurs interrogé sur une éventuelle possibilit­é d’échanger leur place respective selon le tirage au sort… Fin de non-recevoir de la part de Paul Goze. Le tirage au soir a donc été réalisé dès mercredi soir en pondérant avec un président de club par niveau de classement actuel. En clair, Laurent Marty et Yann Roubert, dont les deux clubs trustent le haut du Top 14, ne pouvait pas se retrouver dans le même groupe de travail, ceux-ci étant composés sur une base de cinq présidents de Top 14, cinq de Pro D2 et un représenta­nt des différents syndicats (voir le tableau ci-contre).

Avant de se retrousser les manches, les présidents de club ont tout de même trouvé un consensus général sur la prise en charge du salaire des joueurs. Ils ont décidé de s’en tenir à ce que leur impose le Code du travail, à savoir verser 70 % du salaire brut à chaque joueur, ce qui représente environ 84 % du net. Ni plus, ni moins. Enfin, au cours de cette réunion, le président de la Commission médicale de la LNR Bernard Dusfour, a aussi évoqué les différente­s hypothèses en rapport avec la pandémie qui sévit. Dans cette ambiance anxiogène, la principale question porte sur une éventuelle date de reprises des compétitio­ns. Pour le médecin référent de la Ligue, le pic de la pandémie devrait intervenir d’ici quinze jours, obligeant de facto les autorités à prolonger la période de confinemen­t d’au moins quinze jours. « Et comme nous sommes tous à peu près d’accord que nous ne pourrons pas reprendre la compétitio­n sans trois semaines de réathlétis­ation, on devra probableme­nt directemen­t se diriger vers des phases finales, souligne un président de club. » Et ce dernier, plutôt pessimiste, d’ajouter, « Si toutefois nous pouvons rejouer… »

Clairement, l’avenir immédiat du rugby profession­nel français s’écrit au conditionn­el. Les résultats des différents travaux seront probableme­nt présentés lors du Comité Directeur de la LNR du 7 avril. Avec l’espoir que des décisions puissent être votées et entérinées… ■

Un tirage au sort a eu lieu pour constituer les groupes de travail devant huissier, « les intérêts des uns n’étant pas ceux des autres », dixit un président.

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