Midi Olympique

Agression ou plaisanter­ie : que nous dit l’affaire Marler ?

- Par Arnaud BEURDELEY arnaud.beurdeley@midi-olympique.fr

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LE PILIER DU XV DE LA ROSE, QUI AVAIT CARESSÉ LES PARTIES GÉNITALES D’ALUN WYN-JONES LORS DE LA RENCONTRE DU TOURNOI DES 6 NATIONS ENTRE L’ANGLETERRE ET LE PAYS DE GALLES (33-30), A ÉTÉ SANCTIONNÉ DE DIX SEMAINES DE SUSPENSION. RAPPEL DES FAITS.

C’était le 7 mars dernier. Souvenezvo­us. Alors que les Gallois pilonnent la ligne d’en-but anglaise, les esprits s’échauffent et le pilier gauche Joe Marler touche les parties génitales du capitaine gallois Alun-Wyn Jones. Ce dernier, interloqué, ne réagit pas et cherche du regard les arbitres. À l’issue de la rencontre, Jones réagit à cet incident qui ne l’a pas du tout fait rire, contrairem­ent à de nombreux internaute­s qui ont partagé la séquence sur les réseaux sociaux. S’il a affirmé que « Joe (Marler) est un bon gars », le deuxième ligne a aussi déclaré : « J’ai disputé 138 matches pour mon pays. Si je réagis, je prends un carton rouge. C’est difficile, non ? Espérons que World Rugby y jette un oeil. » L’article 9.27 du règlement de World Rugby indique qu’un joueur « ne doit ni saisir, ni tordre, presser ou frapper un adversaire au niveau des parties génitales. » La sanction pour un tel geste peut aller de douze semaines à quatre ans de suspension. Autant dire à cet instant que la petite plaisanter­ie de Marler pouvait tourner à la catastroph­e pour le joueur adepte des facéties les plus diverses.

Le pilier de la Rose a finalement été suspendu dix semaines. Et s’il a bien plaidé coupable dans cette affaire, Marler a néanmoins expliqué qu’il n’avait pas saisi, tordu ou écrasé les parties génitales du Gallois. Sans doute est-ce la raison pour laquelle sa sanction est inférieure au barème habituel en pareille circonstan­ce.

Après le match, l’affaire avait tourné au débat sociétal. En direct à la télévision britanniqu­e, l’ancien trois-quarts centre gallois Gareth Thomas, qui a fait son « coming out » en 2009 avait déclaré dans une autodérisi­on à faire tordre de rires l’ancien sélectionn­eur Clive Woodward, présent sur le plateau d’ITV : « Cela n’arrivait pas à mon époque, et j’en suis triste, parce que si cela avait été le cas, je n’aurais jamais pris ma retraite. » Ce trait d’humour a valu à Thomas de nombreux messages scandalisé­s, comme celui d’Andy Goode, ancien internatio­nal anglais. « Imaginez si quelqu’un avait touché un autre homme ou une autre femme sur son lieu de travail et que quelqu’un en plaisantai­t à la télévision. Les gens ont de l’admiration pour Gareth Thomas, pour ce qu’il a vécu et raconté, mais si quelque chose de similaire était fait de manière homophobe, est-ce qu’il en rigolerait ? » Conséquenc­e : le Gallois s’est senti contraint de présenter ses excuses sur les réseaux sociaux. La légende du rugby anglais Will Carling (72 sélections entre 1988 et 1997, dont 59 comme capitaine) a lui pris la défense de Marler, également sur les réseaux sociaux : « En regardant simplement les images, on peut tous voir que ce n’était pas agressif et que cela n’a pas causé de douleur », qualifiant l’action de Marler « humoristiq­ue ». Vous l’avez compris, personne n’est resté insensible à cet épisode, chacun y allant de son commentair­e et contraigna­nt Joe Marler à supprimer son compte Twitter. Voilà pourquoi nous rouvrons le débat. ■

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