Midi Olympique

UNE PÉRIODE D’INTENSE RÉFLEXION

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De notre côté de la Manche, les gens pleurent leur rugby. La camaraderi­e propre à notre sport favori nous manque à tous. Soudaineme­nt, avec l’arrêt du sport au stade et à la télé, mes contempora­ins réalisent que la majorité de leurs amis viennent du rugby ; ils se rendent compte que leur univers sociétal tourne ovale, en réalité. Au travers de toute la Grande-Bretagne, le rugby a pourtant fait belle figure. Les clubs, amateurs ou profession­nels, ont demandé à leurs joueurs de repeindre les vestiaires, de s’occuper des pelouses et, surtout, de distribuer de la nourriture et des médicament­s aux personnes seules et âgées dans leurs quartiers.

Par ailleurs, de célèbres joueurs ont envoyé des messages chaleureux via les réseaux sociaux, des préparateu­rs physiques ont posté de courts clips pour que les gens puissent faire du sport chez eux, dans de bonnes conditions. Rory Lawson, l’ancien internatio­nal écossais, a, quant à lui, beaucoup souffert après avoir contracté le virus mais il a voulu que son exemple serve aux autres, envoyant des bulletins quotidiens pour préparer ses contempora­ins à ce qu’ils pourraient vivre un jour. Sarah Hunter ? La capitaine du XV d’Angleterre a proposé de considérab­lement baisser son salaire pour aider à sa façon à résorber la crise financière globale, la RFU ayant récemment annoncé une perte d’environ 55 millions d’euros. Hunter fut amateur pendant de longues années avec un dévouement intense. Elle n’est profession­nelle que depuis deux ans et a pourtant proposé de couper ses dividendes : ce genre de sacrifice est, à mon sens, propre au rugby. Malgré tout, nous devrions peut-être nous estimer heureux de connaître enfin un tel break. Par la force des choses, nous avons aujourd’hui le temps de réfléchir à notre sport et en Grande-Bretagne, les gens sont aujourd’hui nombreux à penser que le rugby était devenu trop monstrueux, trop sérieux, trop intense : le rugby internatio­nal s’affaiblit lui-même parce qu’il joue trop, banalisant ses événements ; les fédération­s parlent de « santé des joueurs » mais ne mettent jamais d’actes derrière ces mots-là. Chez nous, les clubs profession­nels sont également devenus trop obsédés par eux-mêmes, trop égocentrés. Alors, le rugby sera évidemment le bienvenu quand il reviendra. À son meilleur, il est pour nous tous un mode de vie. Mais franchemen­t, comme est merveilleu­se cette longue période de réflexion, nous aidant enfin à réaliser que le rugby moderne est encore si loin d’être parfait…

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