Midi Olympique

Affronteme­nt Mias-Prat LES DESSOUS DE L’HISTOIRE

- Par Henri NAYROU

IL Y A DEUX SEMAINES, L’ANCIEN RÉDACTEUR EN CHEF DE MIDI OLYMPIQUE HENRI GATINEAU COMPTAIT SES SOUVENIRS D’UNE ENGUEULADE DE LÉGENDE ENTRE DEUX SEIGNEURS DE LEUR TEMPS, LUCIEN MIAS ET JEAN PRAT. À LA LUMIÈRE DE CE PAPIER, LE CITÉ A TENU À APPORTER SON ÉCLAIRAGE.

Notre série « Une vie en jaune » remet en lumière des grands moments de l’histoire de notre rugby. C’est Henri Gatineau qui a donné le coup d’envoi dans le Midol du 20 avril dernier. Il y faisait notamment revivre avec intensité la saga de Lucien Mias, le fameux Docteur Pack, inventeur du non moins célèbre « demi-tour contact » qui avait conduit l’équipe de France à l’exploit historique du 16 juillet 1958 à l’Ellis Park de Johannesbu­rg, au premier Tournoi des 5 Nations remporté par le XV tricolore en 1959 grâce à deux essais de Moncla sur des mouvements de fond de touche inventés par Mias mais aussi à la qualificat­ion en finale du championna­t de France 1957-1958 du SC Mazamétain commandé par le grand Lucien et perdue devant le grand FC Lourdais du non moins grand Jean Prat.

Ah, ce face-à-face entre Docteur Pack et Monsieur Rugby le 18 mai 1958 dans un Stadium de Toulouse chauffé à blanc par plus de 40 000 spectateur­s ! Entre ces deux grands personnage­s du rugby français, il y avait eu des étincelles et notamment à la fin du match gagné par les Lourdais 25-8 (voir feuille de match). Henri Gatineau a raconté ce qu’il avait entendu en direct dans les entrailles du Stadium toulousain résonnant fortement des coups de gueule des deux capitaines.

Lucien Mias avait crié à Jean Prat quelque chose comme : « On t’appelle Monsieur Rugby mais on devrait t’appeler Monsieur Anti-Rugby ! » Retour de Jean Prat : « Et toi, si on t’enlevait ta grande gueule, il ne te resterait plus rien… » Lucien Mias qui sera nonagénair­e en septembre prochain, suit de près l’actualité du monde, de la médecine et du rugby. Il est accro à Internet et il délecte ses contacts (tiens, tiens…) avec ses commentair­es toniques et brillants. On figure dans sa liste et on se régale.

Ayant lu le Midol dans lequel l’ancien rédacteur en chef du Midol, l’avait encensé, Lucien Mias revient pour la toute première fois, non seulement sur cette passe d’armes qui avait fait trembler la chronique rugbystiqu­e mais aussi sur les origines du fameux « demi-tour contact » qui fut son marqueur et qui fit gagner le XV de France. Lucien Mias, grand médecin, grand capitaine, ok et Grand Monsieur aussi. Lisez plutôt, ça pulse ! « Je jouais au rugby depuis un bon bout de temps mais on apprend toujours. J’ai notamment beaucoup appris à partir de 1952, quand les Springboks nous avaient balayés à Colombes par un 25 à 3 (l’essai valait 3 points), nous faisant reculer en courant en mêlée. À cette époque, je poussais un peu derrière le pilier droit mais une fois le ballon talonné, je me détachais pour essayer de croquer le demi d’ouverture. Seul Henri Fourès puis Bernard Chevallier restaient en place en deuxième ligne dans une mêlée… effondrée. Les spectateur­s et chroniqueu­rs parisiens étaient émerveillé­s de voir un deuxième ligne voltigeur gambadant vers le demi d’ouverture… qu’il n’attrapait jamais ! La leçon des « Sud Af » m‘a servi et on a ébauché dans l’année suivante avec Honoré Laffont, l’entraîneur de Mazamet, la technique du demi-tour contact, autrement dit la touche en mouvement (pour jouer dans la zone sans défenseur derrière l’alignement adverse à la touche)… Il a fallu quelques saisons pour que les habitudes soient ancrées. Jusqu’à nous amener en finale en 1958 où on a explosé devant Lourdes qui avait un paquet d’avants de grande qualité et des trois-quarts exceptionn­els. Je précise qu’on les avait battus précédemme­nt en demi-finale du DuManoir à Perpignan. À Toulouse, on avait pris 25 points et à la fin du match, j’ai râlé contre Jean Prat toujours hors-jeu. Hors-jeu selon moi, mais pas selon les arbitres d’alors… J’ai compris bien plus tard, que je m’étais trompé de cible en voyant jouer McCaw, le Néo-Zélandais qui a toujours été à la limite du hors-jeu et jamais sanctionné… jusqu’à ce qu’au bout de quelques saisons, un arbitre détaillant ses astuces a commencé à le sanctionne­r avant que ses collègues ne le suivent. McCaw a vu sa superbe carrière terminée. Jean Prat était un précurseur… jamais débusqué, de McCaw ! Ce n’est pas Jean Prat que j’aurais dû admonester, mais les arbitres qui ne le sanctionna­ient pas ! J’ai eu l’occasion de le dire à Jean Prat pour m’excuser. Il a souri en disant : « J’étais à la limite. » » ■

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Photos Archives Midi Olympique Lucien Mias, ancien deuxième ligne de Mazamet, revient sur les origines de son histoire avec le troisième ligne lourdais Jean Prat.
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