Ugo MOLA Entraîneur du Stade toulousain « Le créateur du rugby moderne »
« Il a presque formé toute la crème des entraîneurs du rugby français. Je suis allé le voir il y a quelques mois dans son village et il m’avait dit des choses incroyables sur le jeu, sur la manière de fonctionner. J’ai retrouvé de nombreuses similitudes dans ce que je faisais de manière inconsciente parce que j’avais été bercé par ces méthodes-là. Honnêtement, j’avais passé une journée extraordinaire. J’étais parti pour y rester deux heures… J’y suis arrivé à 11 heures et je suis resté jusqu’à 17 heures ou 18 heures On a échangé, on a mangé, on a bataillé… Il me posait plein de questions hyper sensées. Cela m’a réellement marqué et ce souvenir restera à part. Il était tellement passionnant et passionné. Il n’était pas dogmatique mais tellement convaincu sur le jeu et le processus. Il m’avait notamment confié des choses sur l’école de rugby : « Tout le monde gueule sur les gosses en disant :
« Fais la passe, fais la passe » mais un gamin de 6 ans, le ballon, il le garde ou il le jette. Arrêtez avec la passe. Mettez-le en situation pour que, justement, il comprenne pourquoi il aura, à un moment ou à un autre, l’utilité de faire la passe. » En fait, il te mettait en éveil sur tout. Je voulais aller le voir depuis des années. Je m’étais lancé dans un tour de prises d’informations pour faire une sorte de livre blanc du Stade toulousain. L’idée, c’était d’auditer tous les mecs qui ont porté cette méthode. Chez lui, c’était profond sur tout : la formation, les hommes, le jeu, etc.. J’ai pris tellement de notes, je pourrais en parler pendant des heures… Son discours est à la fois hyper simple, tourné vers le bon sens, mais, dans l’éducation des entraîneurs, c’est réfléchi sur la mise en situation :
« Pourquoi tu fais ça ? » C’était un mec incroyable. C’est le père de la méthode même si je ne suis pas fan de ce mot. Lui était contre ça, contre cette reconnaissance. Plus que le père de la méthode, c’est, il y a cinquante ans, le créateur du rugby moderne. Qui est toujours d’actualité aujourd’hui ! À 89 ans, il était d’une modernité incroyable en termes de réflexion sur le rugby. Sa parole était intergénérationnelle. Puis c’est le garant d’un état d’esprit. Pour lui, derrière chaque joueur, il y avait un homme. Il avait humanisé la manière d’entraîner et de fonctionner. Tous ceux qui ont eu, dans leur apprentissage de ce sport, la capacité à réfléchir sur le rugby ont été marqués par cet homme. » Propos recueillis par J. Fa.