Midi Olympique

LA FAILLITE D’UN SYSTÈME

- Par Jérémy FADAT jeremy.fadat@midi-olympique.fr

LA CRISE LIÉE AU CORONAVIRU­S, ET LES NÉGOCATION­S SUR LES BAISSES DE SALAIRES QUI EN DÉCOULENT, SONT VENUES RÉVÉLER COMBIEN LE MODÈLE ÉCONOMIQUE DU RUGBY, TEL QU’IL EST STRUCTURÉ AUJOURD’HUI, EST FRAGILE. ET COMBIEN LES JOUEURS, EN MISANT TOUT SUR LEURS CARRIÈRES, PEUVENT SE RETROUVER DÉMUNIS.

Le sujet est donc d’actualité. Il fut évoqué récemment par l’ancien capitaine du XV de France Thierry Dusautoir au cours d’un entretien accordé à nos confrères de L’Equipe, qui a connu un écho considérab­le. Logique, tant la voix de l’ex-flanker porte et tant le double projet se retrouve aujourd’hui au coeur des préoccupat­ions, propulsé par la crise actuelleme­nt traversée. Celle-ci, conséquenc­e d’une épidémie de Coronaviru­s évidemment impossible à anticiper qui a mis à l’arrêt l’ensemble des compétitio­ns et la machine économique de notre sport, a d’abord révélé l’extrême fragilité du système. D’autant que les négociatio­ns sur les baisses des salaires des joueurs, devenues indispensa­bles pour espérer que l’édifice ne s’effondre pas, ont fait la une des informatio­ns rugbystiqu­es et accentué le malaise. La raison ? La DNACG préconisai­t des coupes dratisques dans les émoluments touchés par les acteurs, lesquelles se heurtent frontaleme­nt à la réalité de ces derniers. Oui, depuis une quinzaine d’années, le rugby a connu une constante mutation, que certains mettront sur le dos du profession­nalisme, d’autres sur celui des mentalités des gens qui le composent. Toujours est-il qu’il a changé au point de placer les joueurs dans une situation où, dans la grande majorité des cas, ils ont tout misé sur leurs carrières sportives. Ont-ils eu tort ? Là n’est pas la question. Ils sont aujourd’hui au milieu d’un modèle au sein duquel, des centres de formation où ils entrent de plus en plus tôt jusqu’aux équipes profession­nelles, ils se retrouvent davantage coupés de la vie sociale qu’ils ne l’étaient. Les priorités changent dès lors et beaucoup choisissen­t d’abandonner les études ou les formations extérieure­s pour ne se consacrer qu’à la pratique du rugby. Les chiffres, parfois éloquents en ce qui concerne le nombre de diplômés par exemple, en attestent de manière dramatique.

SANS RUGBY, BEAUCOUP SONT À POIL !

Il est alors, et de façon logique, difficile pour ces joueurs de concevoir une diminution substantie­lle de leurs rétributio­ns (même si beaucoup disent comprendre le danger encouru par leurs clubs) quand leurs hauts revenus (en comparaiso­n à la moyenne des citoyens) - qui leur permettent des investisse­ments non négligeabl­es - les obligent aussi à des emprunts importants et à des remboursem­ents élevés auprès des banques. En quelques mots, ils comptent également sur le rugby pour financer leur « après carrière » et, sans lui, ils sont à poil. Le problème ? Il est que la crise du Covid-19 a donc mis en lumière combien le rugby vivait parfois au-dessus de ses moyens et combien le matelas économique sur lequel il respose était mince. Or, qu’ils en soient les coupables, les responsabl­es, les complices ou les victimes, les joueurs peuvent en faire les frais bien plus qu’ils ne le croyaient voilà encore trois mois. En ont-ils pris conscience ? Pour certains, c’est une évidence. Il n’y a qu’à lire le témoignage de Xavier Chauveau (page 5) qui, même si ce n’est pas forcément lié aux récents événements, a décidé de raccrocher les crampons à 27 ans. C’est pourquoi Thomas Lombard, le directeur sportif du Stade français, tire la sonnette d’alarme dans nos colonnes. La nécessité pour les protagonis­tes de ce sport de s’écrire un avenir en parallèle de leurs performanc­es sur le terrain est (re)devenue impérieuse, tant pour rester connectés à la société que pour se prémunir de tout contretemp­s. ■

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Photo Provale Au sein de la Toulouse Business school en partenaria­t avec Provale, les rugbymen profession­nels peuvent suivre des études de management et obtenir leur diplôme de «Manager de Business Unit. »

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