À Paris, le triangle de la Soif est toujours muet
C’EST À SAINT-GERMAIN-LES-PRÈS QUE LES SUPPORTERS DU RUGBY ONT L’HABITUDE DE S’ENCANAILLER, APRÈS LES MATCHS. DEPUIS LE 15 MARS, LE TRIANGLE DE LA SOIF S’EST POURTANT VIDÉ…
Dans le sixième arrondissement parisien, les rues Princesse, Guisarde et des Canettes forment ce qu’on appelle le « triangle de la Soif », où échouent généralement les rugbyphiles de tous bords, lorsque ceux-ci quittent la morne plaine du Stade de France pour s’encanailler quelques heures dans les rues de Paris. À « la Soif », le pub Eden Park fait partie des meubles et, en temps normal, fait salle pleine cinq soirs par semaine. Depuis le 15 mars dernier, l’établissement de nuit a pourtant tiré le rideau, tout comme les autres comptoirs mythiques de Saint-Germain-des-Près, qu’ils se nomment l’Alegria, le Pousse Au Crime ou le Bedford. Arnaud Gaste, le patron de l’Eden Park, explique en préambule : « Les temps sont durs, dans le quartier. Ici, les rues sont trop étroites pour pouvoir installer des terrasses. Alors, on est toujours fermé, on attend et on espère que le 22 juin, le Premier ministre nous autorisera enfin à reprendre une activité normale. »
FERIAS ET DISTANCIATION SOCIALE, CONCEPTS INCOMPATIBLES
Pour compenser le manque à gagner de trois mois d’inactivité, Arnaud Gaste a dû largement « taper dans les économies » et placer l’intégralité de son personnel au chômage partiel. Il poursuit : « La plupart des bars d’ici n’ont pas de cuisine, nous n’avons donc pas pu maintenir un embryon d’activité et préparer pour les passants des plats à emporter, par exemple. Maintenant, j’espère juste que la reprise sera à la hauteur de nos espérances. » En est-il certain ? Même pas. « Pour moi, enchaîne Gaste, les gens ne reviendront vraiment qu’en septembre. Et si les règles de distanciation sociale n’évoluent pas d’ici là, les faire respecter sera difficile. Les bars de la Soif accueillent une clientèle principalement originaire du Sud-Ouest et chez nous, on recrée un peu l’ambiance des ferias : on danse, on se touche et on tape sur l’épaule des voisins. Se tenir à un mètre de l’autre dans un si petit lieu, ce serait évidemment intenable. » La Soif retrouvera-t-elle un jour son vrai visage ? ■