Midi Olympique

« Nous sommes fiers d’être plébiscité­s »

BERNARD LAPORTE - Président de la FFR À L’ISSUE DE CETTE 150E ASSEMBLÉE GÉNÉRALE, LE PATRON DU RUGBY FRANÇAIS, A ACCEPTÉ DE FAIRE LE POINT SUR LE VOTE DU BUDGET POUR LA SAISON 2020-2021, MAIS AUSSI SUR LE CHOIX DE NE PAS VOTER LE CALENDRIER DU TOP 14 PROP

- Propos recueillis par Arnaud BEURDELEY arnaud.beurdeley@midi-olympique.fr

Comment avez-vous accueilli le vote favorable, à plus de 77 %, du budget 2020-2021 qui prévoit un déficit de 5,63 millions d’euros ?

C’est une grande satisfacti­on. Je tiens d’abord à remercier tous les présidents de clubs qui se sont mobilisés, mais aussi toutes les équipes de FFR qui ont réalisé des prouesses pour organiser cette assemblée générale digitale. Ensuite, nous sommes évidemment très fiers d’être plébiscité­s par les clubs. Notez que ce budget serait positif sans le plan de relance que nous avons mis en place. Les clubs l’ont bien compris. Nous sommes à leur service et c’est ce qui nous guide depuis toujours.

Étiez-vous inquiet avant cette assemblée générale ?

Mon inquiétude, c’était que les moyens techniques ne fonctionne­nt pas. Mais tout s’est très bien passé. Mais pour ce qui est du budget, il n’y avait aucune inquiétude.

Comprenez-vous les critiques émanant de l’opposition sur le fait que ce budget serait « gonflé à l’hélium » ?

Je ne suis pas là pour commenter les propos des uns ou des autres. Ce n’est pas en mentant en permanence que l’on rassemble.

Ce budget 2020-2021 prévoit six matchs de l’équipe de France lors de la tournée d’automne. Quelles assurances avez-vous en tant que vice-président de World Rugby quant à la tenue des matchs ?

Pour nous, c’est une obligation d’avoir ces six rencontres. Mais attention, d’abord, parmi ces six matchs, il y a le report de France - Irlande. Soyons précis : nous parlons donc de cinq rencontres plus le match reporté. Pourquoi ? Parce que c’est mathématiq­ue. Le Tournoi, c’est six nations qui ont besoin de trois matchs chacune à domicile. Chaque nation aura donc à disputer deux rencontres à l’extérieur. Nous ne pouvons pas faire autrement, sinon certaines nations seront lésées et auront toutes les raisons de râler.

Vous avez d’ailleurs rejeté le calendrier proposé par la Ligue nationale de rugby lors du comité directeur de la FFR qui s’est déroulé vendredi. Pourquoi ?

Parce qu’on ne peut pas voter un calendrier sans avoir connaissan­ce de la décision de World Rugby. Il aurait été aberrant de voter un calendrier sans connaître l’étendue de la fenêtre internatio­nale qui en sera connue qu’en début de semaine.

Êtes-vous prêt à aller au bras de fer avec la LNR qui ne propose au total que cinq dates pour les Bleus ?

Nous allons faire en sorte de trouver un arrangemen­t, notamment au niveau de l’utilisatio­n des joueurs. Peut-être qu’un joueur ne pourra pas jouer plus de cinq matchs ou quelque chose dans le genre. Je ne suis pas là pour pénaliser les clubs, mais nous avons besoin de ressources financière­s liées à l’organisati­on de ces matchs. Sinon qu’est-ce que je dis aux présidents des clubs amateurs ? Que nous n’avons plus les moyens de leur verser l’argent qui leur revient ? Non, je ne suis pas d’accord. Dans une situation si complexe, nous devons travailler main dans la main avec les clubs et leurs entraîneur­s. J’ai été entraîneur de club, je sais ce que c’est. Nous allons trouver une solution pour que chacun s’y retrouve. Mais dire que l’équipe de France ne jouera que cinq matchs, c’est impossible.

Vous avez évoqué durant cette AG l’arrivée prochaine de deux nouveaux partenaire­s. Pouvezvous en dire plus ?

Non, c’est trop tôt. Mais j’ai rencontré ces deux partenaire­s qui nous ont fait part de leur volonté de nous accompagne­r. Cela devrait se faire très rapidement. J’en profite pour remercier nos partenaire­s qui nous ont apporté un soutien sans faille durant cette crise inédite. Ça, ce sont les valeurs du rugby.

Vous avez souligné une baisse d’environ 8 000 licenciés sur cette saison 2019-2020, tout en affirmant que sans la Covid, cette tendance aurait été inversée. Expliquez-nous !

C’est la première année depuis 2010 que la courbe du nombre de licenciés aurait dû être positive. Nous avons pris le ratio d’inscriptio­ns au mois de novembre 2019 et nous avons regardé la progressio­n qu’il y a normalemen­t entre novembre et juin. Habituelle­ment, grâce notamment à la gratuité des licences sur le troisième trimestre, ce ratio augmente. Or, nous avons constaté que la baisse de cette saison est intervenue après le mois de février. Cela correspond à l’apparition de la Covid. Si nous prenons les mêmes ratios des dix dernières années, nous aurions eu une courbe positive au mois de juin à présenter en assemblée générale. En clair, sur les dix dernières années, notre ratio n’a jamais été aussi haut qu’en novembre 2019. Pour nous, c’est un signal fort. L’arrivée des conseiller­s techniques de club va nous permettre de poursuivre notre progressio­n. Grâce à ces CTC, nous allons mieux former et mieux pénétrer le milieu scolaire. Et puis, la Coupe du monde en 2023 va nous amener 20 à 30 % de licenciés en plus.

Vous avez acté le non-report des élections en maintenant la date du 3 octobre malgré une préconisat­ion du comité d’éthique et de déontologi­e de la FFR. Pourquoi ?

Parce que cette décision a été prise en août 2019 et qu’il n’y a aujourd’hui aucune raison de repousser cette élection. Tout le monde est logé à la même enseigne. L’opposition fait campagne depuis le 16 août de l’an dernier et a continué à faire des visio-conférence­s durant toute cette période. Et tant mieux, c’est ça la démocratie. Mais à partir du moment où le décret ministérie­l nous dit que cette élection peut se dérouler le 3 octobre prochain, nous n’allons pas tout modifier aujourd’hui.

Vous avez clôturé cette assemblée générale en affirmant que vous n’étiez toujours pas candidat. Pourquoi ?

Je suis président de la FFR et je veux être actif jusqu’au dernier moment. Je ne me voyais pas durant une période aussi difficile pour tout le monde prendre la parole pour dire si oui ou non je serai candidat en octobre prochain. Mon rôle, c’est d’être aux côtés des clubs. Depuis le début de la crise, j’enchaîne, deux, trois ou quatre réunions par jour entre mes fonctions à la FFR, à World Rugby ou encore aux 6 Nations. Je n’avais pas la tête à ça, ni même le temps de faire campagne.

On vous imagine mal ne pas être candidat.

On verra bien (rires). J’annoncerai ma décision en début de semaine (lire ci-contre)...

Avez-vous le sentiment d’avoir été au bout de vos engagement­s sur cette mandature ?

Nous avons fait beaucoup de choses. Sur les 44 engagement­s, seuls deux ou trois n’ont pas pu être menés à bien pour des raisons techniques. Mais 95 % des engagement­s ont été réalisés ou sont en cours de réalisatio­n. Pour moi, c’est le plus important. Le rôle d’un président de fédération, c’est d’accompagne­r les clubs. Un exemple ? Pour la création de la division Nationale, j’ai passé un week-end entier à appeler l’ensemble des 60 clubs de Fédérale 1 pour avoir une tendance, recueillir leur sentiment, pour comprendre ce dont ils avaient envie. Et ensuite, nous avons organisé un séminaire où les clubs ont voté à 85 % pour cette nouvelle compétitio­n.

Justement, l’opposition affirme que vous êtes indirectem­ent en campagne à travers ces réunions…

(il coupe) Mais c’est quoi le rôle d’un président de Fédération ? Heureuseme­nt que je suis aux côtés des clubs dans des moments aussi difficiles comme ceux que nous venons de traverser. Et je n’ai pas attendu la Covid pour écouter les clubs, pour aller les voir. Le lendemain du dernier match de l’équipe de France en Écosse, je me suis levé à quatre heures du mat’ pour être à 16 heures dans un club à côté de Valence dans la Drôme. Voilà ce que je fais depuis quatre ans maintenant. Je n’ai donc pas de leçon à recevoir.

Comment avez-vous accueilli la condamnati­on de la FFR par le Tribunal administra­tif de Versailles dans l’affaire qui vous opposait aux collectivi­tés suite à l’arrêt du projet « Grand Stade » ?

La FFR a été condamnée à verser 3,36 millions d’euros au total alors que ces collectivi­tés en réclamaien­t environ 50. Pour informatio­n, nous avions provisionn­é 2,5 millions d’euros dès notre arrivée à la FFR. Surtout, je vais rencontrer ces collectivi­tés, à leur demande, très rapidement pour imaginer un projet commun et peut-être utiliser cet argent pour la création d’une académie sur leur territoire. Mais ce n’est absolument pas un coup dur pour la FFR. Surtout, imaginez que le projet du « Grand Stade » ait été à son terme : la FFR serait aujourd’hui en faillite. Expliquez-moi comment nous aurions pu rembourser 45 millions par an, surtout dans une période comme celle que nous vivons aujourd’hui sans aucune rencontre.

Vous avez évoqué durant l’Assemblée générale l’arrivée imminente de CVC au capital du Tournoi des 6 Nations. Qu’en est-il exactement ?

Nous sommes encore en négociatio­ns car en raison de la Covid, CVC a souhaité revoir son offre. Ce qui est logique au regard de la période sans match que nous venons de vivre. Une commission du comité du Tournoi des 6 Nations est en charge du dossier. Elle vient de formuler une contreprop­osition la semaine dernière. Une réunion doit avoir lieu dans les jours qui viennent, mais je suis convaincu que d’ici deux mois, ce sera signé.

Quel sera l’engagement de CVC ?

On parle ici d’une prise de capital de l’ordre de 14,5 % au sein d’une société créée par le comité du Tournoi des 6 Nations au sein de laquelle seront gérés les droits commerciau­x.

Quel est l’intérêt pour la FFR ?

La somme investie par CVC sera répartie entre les six fédération­s actionnair­es au prorata du nombre de licenciés dans chaque pays. Lors de la première discussion, il était question de 79 millions d’euros sur cinq ans. Avec la renégociat­ion, on sera plus près de 75 millions, mais cela représente une somme conséquent­e qui permettra de continuer la redistribu­tion aux clubs et de mener à bien de nouveaux projets.

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Photo FFR Isabelle Picarel Bernard Laporte se veut toujours fortement engagé au soutien des clubs.

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