Midi Olympique

SI ON JOUAIT ?

MALGRÉ LES CAS DE COVID-19 QUI SE MULTIPLIEN­T, LE RUGBY FRANÇAIS MAINTIENT LE CAP ET FONCE VERS SA REPRISE. DERNIER TOUR DE MATCHS AMICAUX CE WEEK-END. KURTLEY BEALE POURRAIT FAIRE SES GRANDS DÉBUTS AVEC LE RACING À BRIVE.

- Par Nicolas ZANARDI nicolas.zanardi@midi-olympique.fr

REPRISE SI LES DATES OFFICIELLE­S DE REPRISE DES COMPÉTITIO­NS APPROCHENT À GRANDS PAS, FAISANT NATURELLEM­ENT NAÎTRE UNE FORME D’EXCITATION APRÈS SIX MOIS DE SEVRAGE, LES QUESTIONS SOULEVÉES CES DERNIERS JOURS PAR L’ACTUALITÉ NE MANQUENT PAS DE FAIRE PLANER UNE MENACE LOURDE SUR LE TOP 14 ET LA PRO D2, MALGRÉ DES PROTOCOLES « ALLÉGÉS ».

Voilà, les nouveaux protocoles de reprise de compétitio­n sont sortis, dont le bon parfum fait frémir tous les compétiteu­rs qui sommeillai­ent jusque-là, aux niveaux profession­nels ou amateurs. Retour à la normale en vue, alors ? Pas vraiment, non… D’abord, au sujet des amateurs, parce que les protocoles mis en place par la FFR (notamment en matière d’accès aux équipement­s, lire en page 4) demeure pour l’instant tributaire du bon-vouloir des élus locaux, et que toutes les mairies de France sont encore très loin d’autoriser l’accès aux vestiaires, buvettes, clubs-house et autres installati­ons. Et l’on ne parle pas ici des éventuels clusters qui ont pu se créer ici et là, en l’absence de tests PCR. Combien y a-t-il en réalité de cas comme Vienne (où l’on a relevé 19 joueurs positifs après que l’un d’entre eux ait présenté des symptômes) dans le rugby français et le sport en général ? Franchemen­t, on en frémirait, tout comme on frémit que les dirigeants de la FFR et de la LNR n’aient pas réussi à se mettre d’accord sur un seul et même protocole à suivre…

ARTIGUSTE : « ON SAIT QU’ON EST EN DANGER »

Car au-delà de l’immense majorité des pratiquant­s, il y a le haut niveau. Les profession­nels de ce jeu qui - on l’a vu avec le cas du FC Grenoble, confiné malgré lui - étaient eux aussi tributaire­s des Agences Régionales de Santé, malgré l’existence d’un protocole beaucoup plus cadré que celui des amateurs. Ce protocole, drôle de paradoxe, se trouve à la fois la condition sine qua non d’une reprise dans de bonnes conditions et son principal obstacle, en partant du principe que les cas asymptomat­iques sont toujours plus nombreux, et ne peuvent être détectés qu’en testant… Alors, même si le nouveau protocole soumis au ministère de tutelle jeudi matin est désormais officiel, même si celui-ci a été considérab­lement allégé par rapport au précédent qui a contraint d’annuler tant de matchs amicaux, inutile de tourner autour du pot : oui, les craintes sont légitimes de voir les championna­ts profession­nels partir en vrille rapidement, puisqu’on peut fatalement craindre que d’autres clubs suivront le sort du Stade français, à l’image de Lyon cette semaine. « On se pose des questions parce qu’on a des informatio­ns de droite, de gauche, parfois on nous dit qu’on va être reconfinés, souffle l’entraîneur de la défense de Bayonne Eric Artiguste. Tout le monde le craint parce que, malgré tout, ça reste compliqué pour notre sport. On sait qu’on est en danger. »

OPTIMISME DE RIGUEUR

Voilà pourquoi, contraints et forcés, les rugbymen comme le reste de la société apprennent à vivre avec ce climat de peur, lors des entraîneme­nts comme des matchs où l’ambiance masquée fait souffler un air de fin du monde, bien loin de la fête pour laquelle on apprécie tant le Top 14. Reste qu’au contraire d’un sport comme le foot, profondéme­nt ancré socialemen­t, le rugby sait pertinemme­nt que son économie ne saurait survivre longtemps face à un trop long manque d’exposition. Et se voit contraint de reprendre au plus vite, avec des jauges de stade bloquées un peu partout à 5 000 personnes malgré les diverses demandes de dérogation.

Désespérém­ent optimiste, parce qu’il n’a pas bien le choix. La meilleure preuve résidant peut-être dans la volonté de la LNR de jouer la carte des reports que des forfaits en cas de plus de trois joueurs infectés, qui a fait grincer les dents de nombreux managers lors de la présentati­on du nouveau protocole par Paul Goze en visio-conférence, mercredi soir. « On nous dit qu’il faut jouer à tout prix, quitte à mettre des espoirs, nous confiait l’un d’entre eux. Moi, je veux bien. Reporter des matchs, c’est beau sur le papier mais ça va être très difficile dans les faits. Parce que j’ai beau chercher, des dates de repli, je n’en vois pas beaucoup… Le problème, c’est que nous sommes dépassés et qu’il n’y a pas de bonnes solutions. Certains parlent de « forfaits sanitaires » parce qu’ils sont moins touchés que les autres et veulent faire croire qu’ils maîtrisent tout, ce qui est une escroqueri­e… Alors, à part décider de prendre le risque de faire jouer les asymptomat­iques, je ne vois pas comment on pourra reprendre. Après tout, ce ne sont pas les efforts du Top 14 et de la Pro D2 qui suffiront à endiguer l’épidémie ! On a tendance à l’oublier mais un club qui ne triche pas avec le salary cap doit sortir tous les mois entre 800 000 euros et 1,3 million de salaires. Or en ce moment, aucun club ne rentre d’argent. Alors, comment on va faire si cette situation perdure ? En janvier, beaucoup d’entre nous vont devoir commencer à chercher un nouveau job… » Jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien… ■

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Photo Racing 92

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