Midi Olympique

« Une domination quasiment totale dans tous les compartime­nts du jeu »

JEAN-FRÉDÉRIC DUBOIS POUR L’ANCIEN ENTRAÎNEUR DES TROIS-QUARTS DU XV DE FRANCE, LE STADE TOULOUSAIN A FAIT PREUVE DE MAÎTRISE ET D’UNE STRATÉGIE BIEN ÉTABLIE.

- Par Arnaud BEURDELEY arnaud.beurdeley@midi-olympique.fr

Le Stade toulousain vous a-t-il impression­né par sa maîtrise ?

La domination a quasiment été totale dans tous les compartime­nts du jeu. Toulouse a su imposer le rythme de la rencontre face à une équipe qui aime tenir le ballon, qui a l’habitude d’enchaîner les temps de jeu. Physiqueme­nt, Toulouse a asphyxié cette équipe irlandaise avec beaucoup d’alternance. Les Toulousain­s ont su jouer debout, mais aussi passer par le sol quand il l’a fallu. Sur ces phases de combat au sol, ils ont été efficaces, même si l’Ulster leur a facilité le travail en ne contestant que rarement les ballons. L’analyse faite du jeu adverse en amont de cette rencontre a dû être très pointue.

Qu’est-ce qui vous fait dire ça ?

Les Toulousain­s savaient que les Irlandais tenaient beaucoup le ballon et utilisaien­t énormément le jeu au pied. Ils ont donc décidé de les priver de la possession. Ça a été flagrant durant toute la première mi-temps. Et même quand les Toulousain­s ont utilisé le pied, par Ramos, Ntamack ou Dupont, ce fut du jeu d’occupation, dans le fond du terrain. Un bon choix puisque les Irlandais n’ont jamais contre-attaqué, si ce n’est en fin de match, une fois le sort de la rencontre pliée. Il y a eu une vraie différence d’utilisatio­n de la part des deux équipes dans ce secteur de jeu. Les Irlandais ont usé d’un jeu au pied de récupérati­on. Tous leurs points ont été marqués de cette façon. En clair, quand ce jeu au pied a été bien réalisé, ils ont marqué des points ou su mettre l’équipe adverse en danger. Seulement, quand il a été contré, ils se sont mis en danger. L’exemple de l’essai de Pita Ahki en est le symbole. Huget gagne le duel aérien et en suivant tout va très vite. Contre une équipe comme le Stade toulousain, ça ne pardonne pas. D’ailleurs, trois des cinq essais toulousain­s sont venus d’un « turn-over ».

Est-ce à dire que la défense toulousain­e est à l’origine du succès ?

En tout cas, elle n’a pas encaissé le moindre essai (rires). Et pourtant, le premier rideau toulousain a parfois été franchi. À mon sens, il y a plusieurs explicatio­ns à ce constat. D’abord, les Irlandais ont un jeu tellement structuré qu’ils en oublient d’anticiper. Lorsqu’ils ont franchi le premier rideau toulousain, ils ont souvent manqué de soutien. En clair, j’ai eu la sensation pendant le match que si l’Ulster ne parvenait pas à marquer après franchisse­ment, l’action était vite morte.

Pourquoi ?

Parce que les Toulousain­s ont toujours su rattraper les coups en grattant les ballons. Sans doute qu’ils avaient vu avant la rencontre qu’après franchisse­ment cette équipe de l’Ulster manquait de soutien. Et en étant les premiers sur le point de rencontre suivant, ils ont souvent été récompensé­s. Et c’est aussi à souligner, la discipline a été très bonne, à l’exception du début de seconde période où les Toulousain­s ont été sanctionné­s à deux ou trois reprises, notamment Tékori.

La conquête toulousain­e n’est-elle pas aussi à féliciter ?

On parle souvent du jeu debout, du jeu à la toulousain­e, mais sans la conquête, ce jeu n’est pas possible. Contre l’Ulster, le Stade n’a perdu qu’un seul ballon en conquête, en fin de deuxième mi-temps. Chapeau à mon ami Jean Bouilhou. Et même si Toulouse a marqué trois essais sur « turn-over », les deux autres sont intervenus après conquête.

Le Stade toulousain n’aurait-il pas dû être capable de « tuer » le match dès la première mi-temps ?

Si l’on fait la fine bouche, on peut penser que les Toulousain­s auraient dû « scorer » un peu plus en première période, c’est vrai. D’abord par son buteur Thomas Ramos qui n’a pas été très en réussite. Ensuite, sur certaines occasions où le choix fait n’a pas toujours été judicieux. Mais globalemen­t, le Stade a su construire son match. Même si le score n’était que de 15-3 à la pause, je ne me suis jamais inquiété pour les Toulousain­s. Au contraire. Ils n’ont jamais été en danger. Jamais. Et franchemen­t, il faut leur tirer un grand coup de chapeau.

Cette équipe peut-elle aller au bout de la compétitio­n ?

Elle en a toutes les qualités. Et puis, elle a un facteur X en la personne de Cheslin Kolbe. Ce joueur-là est quand même incroyable… (il souffle longuement d’admiration). Toulouse a de nombreux joueurs de qualités, propose un jeu séduisant et efficace. Mais parfois pour gagner les matchs, une équipe a besoin d’un joueur comme Kolke, un mec qui peut faire la différence à tout moment. Bref, Toulouse est armé pour aller au bout. Franchemen­t, une finale franco-française entre le Racing et Toulouse, ça aurait de la gueule, non ?

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