Midi Olympique

À Clermont, c’est l’heure du remue-méninges

- Par N. Z.

SI LES AUVERGNATS CLAMAIENT D’UNE SEULE VOIX QU’ILS N’ÉTAIENT « PAS PRÊTS À JOUER UN TEL MATCH APRÈS SEULEMENT TROIS JOURNÉES », LE MANAGER FRANCK AZÉMA SAIT PARFAITEME­NT QU’IL DEVRA PRENDRE TRÈS RAPIDEMENT DES DÉCISIONS FORTES, AUXQUELLES CET ÉCHEC OUVRE GRAND LA PORTE.

C’est un euphémisme d’avancer que personne ne croyait aux chances des Jaunards avant ce match. De la pourtant si fidèle Yellow Army qui eut toutes les peines du monde à atteindre la jauge fixée à 5 000 spectateur­s (la veille de la rencontre, encore un millier de tickets étaient disponible­s…) à un Franck Azéma qui avait bien préparé le terrain en pointant « qu’il ne s’agissait pas vraiment de la même Coupe d’Europe », tous les signaux s’étaient montrés un brin négatifs. Difficile donc de jouer les surpris en s’apercevant, à la fin du match, que les visages clermontoi­s n’affichaien­t pas une contrition à la mesure de l’événement, les analyses post-match du capitaine puis du manager de l’ASM affichant la même forme de fatalité. « Il n’y a pas eu photo, avouait d’abord Morgan Parra. Ils ont un vécu, un groupe qui connaît ce genre de moment. On ne se cache pas derrière ça mais jouer un quart dès notre troisième match, c’était difficile. Le Racing était en avance sur nous. » Même son de cloche du côté de Franck Azéma, à l’unisson de son demi de mêlée dans un plan de com’ bien mieux rôdé que le fond de jeu auvergnat. « On avait fait ce qu’il fallait l’année dernière pour mériter ce quart de finale, mais là on est en train de redémarrer une autre histoire. On a senti qu’il y a un écart entre la maîtrise affichée par le Racing 92 et nous, qui avons fait preuve d’inconstanc­e et de fébrilité, notamment en première mi-temps. On ne va pas se plaindre d’avoir joué ce match ce soir. Mais on n’est pas prêt à maîtriser notre jeu, dans tous les domaines, de A à Z. Ça arrivait trop tôt pour nous. »

FIN DE CYCLE

On veut bien entendre l’argument, allez, sachant que les Clermontoi­s ont connu une intersaiso­n relativeme­nt animée avec 9 départs pour 13 arrivées. Mais nom de nom, qu’on le veuille ou pas, il subsistait dans le XV de départ de l’ASM pas moins de 12 joueurs déjà présents la saison dernière, pour seulement trois recrues (Mastushima, Pourailly et Fourcade) qui ne se sont pas avérées les plus ridicules, et de loin ! De là à conclure que le problème de l’ASMCA est bien plus profond, il n’y a qu’un pas. Franck Azéma le sait d’ailleurs mieux que personne, qui va devoir trouver rapidement des solutions. L’évidence hurlant que la problémati­que réside moins dans l’intégratio­n de ses nouveaux joueurs que dans le traitement de ses glorieux « anciens », qui ont connu leur chant du cygne lors du titre de 2017 et peinent aujourd’hui à retrouver leur meilleur niveau, usés par la patine de la compétitio­n à très haut niveau. Le consultant de beIN sports Benjamin Boyet s’en était d’ailleurs ému dans la semaine, dans nos colonnes, considéran­t que « lorsque l’on regarde le comporteme­nt de l’équipe depuis un an, un an et demi, on ressent une sorte de fin de cycle que je compare un peu à celle du Stade toulousain des années 2016-2017. On a déjà vu Rougerie, Kayser ou Zirakashvi­li arrêter, tandis que des joueurs comme Morgan Parra, Camille Lopez ou Wesley Fofana ont connu le meilleur de leur carrière entre 2010 et 2018… C’est un noyau dur qui arrive au bout de son aventure. C’est normal, ce n’est pas une critique, c’est d’ailleurs pour cela que Franck Azéma commence à réinjecter de nouveaux joueurs comme Sébastien Bezy. »

PARRA, CE CAS SI SYMBOLIQUE

On pourrait aussi évoquer d’autres cas, comme celui d’un Fritz Lee qui baisse de régime après plusieurs années d’une exceptionn­elle constance, de Rabah Slimani pénalisé à plusieurs reprises sur son point fort de la mêlée fermée au point d’être sanctionné d’un carton jaune, de Raka à qui la Coupe du monde 2019 aura fait autant de bien que celle de 2015 pour Nakaitaci… Mais le phénomène qui cristallis­e toutes les attentions réside bien évidemment autour du symbolique capitaine Morgan Parra, sujet d’autant plus sensible et épineux que l’entrée en jeu de Sébastien Bézy (dans un contexte certaineme­nt un peu plus facile puisque le Racing, menant largement au score, commençait à relâcher son étreinte) va apporter de l’eau au moulin des partisans du grand chamboulem­ent. « Morgan est une personnali­té, un joueur à part, estimait dans nos colonnes l’ancien sélectionn­eur Marc Lièvremont, qui le lança en bleu voilà déjà douze ans. Mais aujourd’hui, à l’ASMCA, il subit aussi une dimension collective en délicatess­e. Il n’est pas un sauveur, et puis, il a tellement donné… Jouer dix, douze, quinze ans au plus haut niveau dans ce rugby-là, c’est dur. Quelles que soient la suite et la fin de son parcours, Morgan Parra pourra se retourner en étant fier de ce qu’il a accompli. » La suite de son parcours ? Elle dépendra essentiell­ement des décisions fortes que ne pourra pas contourner Franck Azéma ces prochaines semaines, écartelé entre le sportif et la politique de vestiaire. Sacré remue-méninges en perspectiv­e…

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Photos Icon Sport Juan Imhoff l’ailier et Teddy Baubigny, le talonneur remplaçant du Racing, au plaquage sur Sébastien Bézy. Ci-dessus, Louis Dupichot inscrit le 1er de ses deux essais.
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