Midi Olympique

Rendez-vous devant le Conseil d’Etat ?

- Par Arnaud BEURDELEY arnaud.beurdeley@midi-olympique.fr

Que peut-on attendre de la réunion de la dernière chance entre la

LNR et la FFR prévue ce lundi ? Au centre des débats, la même rengaine qui renvoie une piteuse image du rugby : la mise à dispositio­ns des internatio­naux français pour la fenêtre d’automne décidée par World Rugby. Pour l’heure, la positions dans chacun des deux camps n’a pas varié d’un iota. La FFR répète à l’envie qu’elle est prête à négocier mais dans le cadre fixé par World Rugby, c’est-à-dire celui où le quinze de France sera amené à disputer six matches (du 24 octobre au 5-6 décembre). De son côté, la LNR n’en démord pas : cinq matchs (au lieu de trois prévus dans la convention liant les deux parties) mais pas plus. Autant dire qu’il apparaît peu probable qu’une solution miraculeus­e accouche de ce rendez-vous. Ce sera alors devant la justice que les deux parties auront à s’expliquer puisque la LNR a menacé d’attaquer la FFR en référé devant le Conseil d’État, soutenue dans cette démarche par le vote unanime des clubs de Top 14 mercredi dernier.

Quelles sont les chances de la LNR d’obtenir satisfacti­on ? « La Ligue aurait pu attendre une convocatio­n officielle des joueurs et éventuelle­ment une non libération par les clubs. Dans ce cas, la contestati­on des ces sanctions auraient permis au litige de se forger, explique un avocat spécialisé en droit du sport. La Ligue a décidé d’agir différemme­nt. La Ligue considère que la convention conclue avec la FFR, qui prévoit un certain nombre de matchs pour lesquels les joueurs sont mis à dispositio­n

de l’équipe de France, doit primer sur les décisions prises par World Rugby en matière de calendrier et qui s’imposent aux fédération­s. Ces matchs ont valeurs d’impératif au regard du règlement de World Rugby et dans ces conditions si la FFR veut disputer six matchs au lieu de trois telle que prévue à la convention, elle violerait selon la LNR de façon brutale les termes de cette convention. » Sans doute estce qui est inscrit dans la requête que la LNR formulera devant le Conseil d’État. Force est donc de s’interroger : pourquoi la LNR précipite sa démarche contentieu­se ? « C’est pour maîtriser le calendrier et les procédures, répond encore cet avocat. Les dirigeants de la LNR choisissen­t le terrain sur lequel ils s’estiment plus fort et pensant avoir un réel levier quant au prétendu non respect de la convention par la FFR en se permettant de soumettre leur requête au conseil d’État pour avoir une décision rendue avant le début des test-matchs fin octobre. » Et ce dernier d’ajouter : « La LNR a vraisembla­blement rédigé deux requêtes, une en fond et une en urgence, dite en référé suspension. » Les procédures de référés permettent de demander au juge des référés, qui est un magistrat jugeant seul, d’ordonner des mesures provisoire­s, à même de préserver les droits de la LNR. Le « référé-suspension » permet d’obtenir, comme son nom l’indique, la suspension de l’exécution d’une décision administra­tive, en l’occurrence l’extension de la fenêtre internatio­nale décidée par World Rugby. La mesure de suspension prononcée par le juge des référés est provisoire. Elle cesse

de produire son effet dès que le juge s’est prononcé sur la demande d’annulation. Surtout, le juge des référés se prononce dans un délai variant de 48 heures à un mois ou plus en fonction de l’urgence. Ainsi, la LNR sera probableme­nt fixées avant le 24 octobre, date de la première rencontre programmée du XV de France face au pays de Galles. Evidemment, si la LNR engage cette procédure, c’est qu’elle se pense dans son bon droit. Mais pas seulement. Elle choisit aussi une juridictio­n avec laquelle elle entretient des liens étroits. Jean-Pierre Karaquillo, co-fondateur du Centre de droit et d’économie du sport (CDES), qui intervient régulièrem­ent au Conseil d’état dans le cadre de diverses conférence, est membre de la section spéciale « Salary Cap » de la Ligue Nationale de Rugby. Edmond Honorat, conseiller d’Etat, est également membre de cette section spéciale de la commission de discipline et des règlements. Ce dernier était Présidenta­djoint à la section du contentieu­x du Conseil d’État lors de sa nomination. «Des personnali­tés hautement qualifiées en la matière» dit-on dans l’entourage de la LNR qui ont probableme­nt été consultées en amont de la démarche juridique. De là à affirmer que la Ligue Nationale de Rugby a de grande chance d’obtenir satisfacti­on, il y a un petit pas à ne pas (encore) franchir.

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