Seuls au monde, ces Bleus...
C’EST DANS UNE AMBIANCE ASSEZ SINISTRE QUE LES COÉQUIPIERS DE CHARLES OLLIVON ONT PASSÉ PRÈS DE QUARANTE POINTS AUX DERNIERS DEMI-FINALISTES DE LA COUPE DU MONDE. ALORS, C’ÉTAIT SYMPA ?
lun-Wyn Jones est une vache sacrée, dans l’univers du test match : samedi soir, le capitaine gallois est même devenu le joueur le plus capé de l’histoire du rugby, égalant les 148 sélections de Richie McCaw, l’ancien leader des All Blacks. Pour dire le moins, le grand Jones aurait donc mérité un tout autre cadre pour célébrer ce jour historique. Et ? On lui a fait la réflexion, après la rencontre. Sur l’écran géant qui reliait virtuellement joueurs et journalistes au Stade de France, Alun-Wyn Jones a froncé les sourcils et, de sa voix d’outre tombe, a simplement lâché : « La situation n’est pas idéale et j’espère bien que nos supporters reviendront tôt ou tard dans les stades. D’un autre côté, je suis aussi conscient de la chance que nous avons tous de pouvoir vivre de tels moments. » Selon toute vraisemblance, Alun-Wyn Jones (35 ans) faisait ici référence au confinement de deux semaines dans lequel vient de retomber la principauté galloise, ces jours derniers. Au-delà de cet hommage saccagé à l’un des plus grands deuxième ligne de tous les temps, on gardera longtemps en mémoire cette ambiance irréelle, absurde, inouïe qui, comme l’écrit très justement Richard Dourthe dans sa chronique du jour, banalisa l’événement, jusqu’à faire de lui quelque chose de neutre, d’ordinaire, même... FRANÇOIS CROS : « ÇA PEUT PEUT-ÊTRE EXPLIQUER NOTRE DÉBUT DE MATCH... »
Et les Bleus, dans tout ça ? Comment ontils
traversé le premier de leurs six matchs à huis-clos ? François Cros, le flanker du Stade toulousain, explique en préambule : « Certains joueurs de l’effectif n’avaient jamais connu l’expérience du huis clos et cela nous a quelque peu perturbés. Pour être honnête, ça peut même expliquer ce non-match de notre part, lors des vingt premières minutes. » Pour occuper l’espace et sauver le « SDF » de sa misère ordinaire, la fédé avait dressé dans les tribunes d’immenses bâches aux couleurs des deux pays, demandé au tintamarresque speaker du Racing de débrider une nature déjà fort peu discrète et, surtout, brodé sur les maillots des joueurs les noms des quelques 2000 clubs amateurs que recense le rugby français. À ce sujet, Gaël
Fickou confie : « En plus d’être un joueur du XV de France, je suis aussi président d’un club amateur (La Seyne-sur-Mer, N.D.L.R.).
Je suis conscient que c’est grâce à nos clubs formateurs qu’on en est là aujourd’hui. Il est important que ces clubs continuent d’exister, de grandir parce que ils sont le vivier de notre équipe de France : avoir leurs noms dans le dos nous a poussés, à certains moments du match. »