Midi Olympique

Jalibert, le passage à l’âge adulte

- Par Vincent BISSONNET vincent.bissonnet@midi-olympique.fr

HUIT MOIS APRÈS UNE COPIE INSUFFISAN­TE À MURRAYFIEL­D, MATTHIEU JALIBERT SE VOIT OFFRIR UNE NOUVELLE CHANCE DE PROUVER SA VALEUR ET SA CAPACITÉ À EXISTER SUR LA SCÈNE INTERNATIO­NALE. RÉCEMMENT CRITIQUÉ POUR SON ATTITUDE À CASTRES, LE TALENTUEUX BORDELAIS A BEAUCOUP À PROUVER.

Le dernier ballon touché par Matthieu Jalibert sous le maillot du XV de France reste un en-avant, commis à Murrayfiel­d, le 8 mars dernier. Cette dernière perte de balle avait enterré les espoirs d’un bonus tricolore et, avec, une grande part des rêves de victoire finale dans le Tournoi. Une ultime action comme le résumé d’une prestation très mitigée de l’ouvreur, entré dès la 8e minute de jeu.

Le lendemain, dans ces colonnes, Richard Dourthe n’épargnait pas le Bordelais, auteur de premières actions positives avant de décliner : « Matthieu Jalibert ? Ouais… Je vous accorde que remplacer Romain Ntamack dans un tel contexte n’était pas un cadeau, surtout derrière un paquet d’avants dominé comme il le fut dimanche après-midi. Malgré tout, l’ouvreur de l’UBB s’est complèteme­nt « perdu les chèvres », comme on dit dans les Landes : il a été malhabile en défense, coûte probableme­nt l’essai écossais en fin de première période et, globalemen­t, fut assez peu inspiré dans son jeu au pied. Je ne le brûle pas, le gamin. Je constate que ce match risque de lui pourrir ses deux prochaines nuits, c’est tout. » Pardelà ses quelques éclairs, comme cette interventi­on sur la réalisatio­n de Damian Penaud ou sa réussite dans les tirs au but, tout le monde avait fini par retenir ses maladresse­s : ses deux erreurs défensives sur le premier essai écossais, son coup de pied trop court à l’origine du deuxième, son renvoi envoyé en touche en suivant ou encore son mauvais choix sur un temps fort tricolore, au coeur de la seconde période, avec un coup de pied à suivre intercepté par un adversaire.

JALIBERT: «J’AURAIS AIMÉ MONTRER PLUS»

Avec le recul, l’intéressé était revenu sur ce dimanche pluvieux et malheureux dans ces colonnes : « Ce fut un match assez compliqué… J’aurais pu mieux jouer cette fameuse action de la deuxième mi-temps, où je perce avant de taper. Je suis resté déçu de ma prestation. J’aurais aimé montrer plus de choses. Je ne me suis pas senti spécialeme­nt nerveux, le fait d’entrer tôt dans le match me donnait une opportunit­é que je n’avais pas connue depuis longtemps. Mais c’est le sport, il y a des jours où ça ne marche pas. On avait pris un carton rouge alors, collective­ment, ce fut difficile pour l’équipe. » Huit mois après, un nouveau pépin physique de l’incontesté Romain Ntamack lui offre une nouvelle opportunit­é en Bleu. En intégrant le XV de départ, cette fois. Pour la deuxième fois de sa carrière, seulement, après son baptême maudit du 3 février 2018.

À l’époque, Jacques Brunel le voyait comme son premier choix et lui prédisait un avenir radieux : « Je pense qu’il a les capacités techniques, mentales et la maturité de se sublimer pour franchir un palier », avait plaidé le sélectionn­eur. Le commenceme­nt d’un rêve a marqué le début des ennuis, surtout. « Ce fut si court, à cause d’une blessure », se remémore le Girondin. À la 30e minute, il avait dû quitter la pelouse du Stade de France après un choc à un genou. Bilan : rupture partielle du ligament croisé postérieur, douze semaines d’absence et saison terminée. Une rechute allait suivre. Puis une saison marquée par une mésentente avec ses entraîneur­s d’alors : « Quand je suis revenu de ma deuxième blessure, j’ai senti que le staff en place ne me faisait pas confiance. Je n’étais pas épanoui par le projet de jeu. Je ne prenais pas de plaisir. » Entre la succession de blessures et cette période de flottement, la Coupe du monde 2019 s’était logiquemen­t disputée sans le natif de Saint-Germain-enLaye.

129 MINUTES DE JEU EN BLEU

Près de trois ans après sa première cape, Matthieu Jalibert possède un vécu encore limité sur la scène internatio­nale : 5 sélections pour 129 minutes disputées. À titre de comparaiso­n, « NTK », plus jeune de six mois, a dépassé le cap des 1 000 minutes face à l’Irlande. Deux semaines après avoir fêté son vingt-deuxième anniversai­re, son principal concurrent pour le poste se voit proposer une opportunit­é décisive en Écosse. L’occasion de démontrer sa valeur et sa capacité à exister au plus haut niveau. En Top 14, le Bordelais rayonne régulièrem­ent. Le 9 novembre, il s’était vu décerner l’Oscar du week-end Midi Olympique après une prestation étincelant­e devant Bayonne. À chaque apparition, il affole les compteurs de la « Grande Mêlée ». Joueur rapide et doté d’un sens de l’initiative aiguisé, le numéro 10 de l’UBB figure parmi les animateurs les plus en vue du championna­t. Sans contestati­on possible.

Est-il capable de hisser son niveau pour l’être aussi au niveau internatio­nal ? Il revient à l’intéressé de le prouver dimanche en gardant son audace de toujours et en y ajoutant de la gestion pleine d’à-propos, avec de l’alternance et une bonne utilisatio­n du pied. Là où le bât blesse, de temps à autre, le concernant. Dans la hiérarchie, une contre-performanc­e l’éloignerai­t encore davantage de Romain Ntamack et pourrait le voir menacer par Louis Carbonel.

Dimanche, « MJ » passera un test crucial. De maîtrise. De maturité. À 22 ans et avec une cinquantai­ne de matchs au compteur dans l’élite, Matthieu Jalibert ne peut plus être considéré comme un espoir impétueux. Son attitude à Castres, où il s’était permis de taper sur la tête de Julien Dumora après l’essai de la victoire, a d’ailleurs fortement déplu dans le milieu. À lui de mettre tout le monde d’accord, sur le terrain. En agissant comme un grand.

 ?? Photo Icon Sport ?? En mars dernier, Matthieu Jalibert n’avait jamais réussi à se défaire de la nasse écossaise et avait multiplié les mauvais choix. Dimanche sera-t-il un jour de rédemption pour lui ou de la confirmati­on de chat noir de l’Écosse ? Une victoire française ouvrirait les portes de la finale de la Coupe d’automne des Nations.
Photo Icon Sport En mars dernier, Matthieu Jalibert n’avait jamais réussi à se défaire de la nasse écossaise et avait multiplié les mauvais choix. Dimanche sera-t-il un jour de rédemption pour lui ou de la confirmati­on de chat noir de l’Écosse ? Une victoire française ouvrirait les portes de la finale de la Coupe d’automne des Nations.

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