Ce Lou sait aussi jouer debout
FACE À UNE ÉQUIPE DE GLOUCESTER CERTES AMPUTÉE DE SES MEILLEURS ÉLÉMENTS, LES RHODANIENS ONT TOUTEFOIS EU LE BON GOÛT DE RÉCITER UN RUGBY COLLECTIF TRÈS LÉCHÉ, DONT ON REDEMANDE...
C’est peu dire que l’on se demandait si ce Lou, toujours à son affaire en Top 14, allait enfin réussir cette année à exister au niveau européen, où il ne comptait jusqu’alors qu’une victoire en douze rencontres. Car si les Rhodaniens s’étaient bien ressaisis en championnat après un début de saison poussif, c’était surtout autour de leur capacité à bien occuper le terrain et presser l’adversaire jusqu’à le pousser à la faute, en l’enquiquiner autant que possible en touche et dans les rucks. Bref, un rugby de destruction plutôt que de construction, a priori pas vraiment taillé pour une compétition européenne privilégiant historiquement un rugby de possession. De quoi faire naître quelques doutes ? « Basculer sur la Coupe d’Europe, c’est quelque chose qui se prépare, nous avait confiés dans la semaine Pierre Mignoni. Comme nous avons été pris par l’urgence des derniers matchs du Top 14, nous ne nous y sommes pris qu’au dernier moment, en début de semaine, notamment au sujet de l’interprétation des zones de ruck par les arbitres. J’espère que cela va être suffisant. » Et cela l’a bien été, en (grande) partie grâce à un adversaire qui avait ostentatoirement fait le choix de l’impasse en lançant ses mômes de l’Acadamy, la faute à une douzaine de blessures recensées au sein de l’effectif professionnel…
LA MERVEILLE DE NGATAI
Toutefois, le capitaine Baptiste Couilloud était bien placé pour savoir qu’une équipe d’espoirs n’ayant rien à perdre peut embêter n’importe quel adversaire, fut-ce sur son propre terrain… Voilà pourquoi il ne s’agit surtout pas de minorer la performance des Lyonnais, qui ont eu le mérite de réciter un rugby qu’on ne leur avait pas encore vu pratiquer cette saison, fait de courses, de passes et de jeu dans la défense. Le fruit d’un liant très intéressant entre les troisquarts et les avants, dont on eut de beaux aperçus sur les essais de Nakaitaci (14e), Rodda (18e) et Bastareaud (24e), respectivement mis sur orbite par Lambey, Mignot et Ngatai. Mais surtout la conséquence d’un jeu debout, bien léché, à l’image de la merveille du match observée à la 43e, que n’aurait certainement pas reniée une autre équipe habillée de rouge et noir… Parce qu’il y eut tout, vraiment, sur cet essai de Ngatai. Une bonne défense d’abord, celle de Colby Fainga’a récupérant un ballon au contact. De la bonne adaptation ensuite, avec Nakaitaci puis Arnold qui transformèrent le jeu de deux longues passes sur l’extérieur, avant une initiative gagnante de Couilloud bottant pour lui-même un petit coup de pied par-dessus un premier rideau désorganisé. De la vitesse, bien sûr, mais surtout un fabuleux soutien en pivot d’Arnold à pleine vitesse, qui permit à Xavier Mignot d’allonger sa deuxième passe décisive de la journée en direction de son centre all black. Juste du beau, du très beau rugby collectif, qui a évidemment ravi Pierre Mignoni. « On a marqué de beaux essais, cela fait du bien de sortir des performances comme ça, souriait le manager. Mais collectivement, on peut et on doit encore faire mieux. Sur la première action, par exemple, on doit marquer, mais on s’est plutôt bien ressaisi par a suite. Le ballon ne s’est pratiquement pas arrêté à chaque fois que nous avons franchi, et c’est précisément ce qu’on travaille avec les joueurs. »
MIGNONI : « ON DOIT FAIRE ENCORE MIEUX »
Alors, bien sûr, il convient de relativiser. Car si certaines actions collectives impressionnantes de précision et de disponibilité des soutiens ne devaient rien à la faiblesse de l’adversaire du jour, certains exploits individuels y étaient davantage liés. On veut parler ici, pêle-mêle, du grand pont d’Arnold sur le deuxième essai de Mignot (52e), des exploits individuels de Cretin lancé plein champ (62e, 74e) ou d’un petit festival de Colby Fainga’a en bord de touche, soit autant d’initiatives dont on peine à imaginer qu’elles auraient pu passer ne serait-ce qu’en Top 14… Mais de cela, Pierre Mignoni était évidemment conscient, qui refusait logiquement de verser dans l’euphorie. « C’est bien, mais on doit faire encore mieux, progresser encore à faire les bons choix et les bons gestes dans la zone rouge. Le haut niveau, ce n’est que cela : être capable de répéter et répéter encore les tâches, à être encore capable de changer de rythme à très haute intensité. » Dès le week-end prochain à Glasgow, où un défi d’un tout autre acabit attend désormais le Lou ? C’est bien le défi, oui…