Midi Olympique

Gourdon, cet heureux double centurion

- Par Pierrick ILIC-RUFFINATTI

KEVIN GOURDON - TROISIÈME LIGNE DU STADE ROCHELAIS POUR SA 200e RENCONTRE SOUS LE MAILLOT DU STADE ROCHELAIS, KEVIN GOURDON A ÉTÉ L’UN DES GRANDS ARTISANS DE LA VICTOIRE DES MARITIMES À MAYOL. L’INTERNATIO­NAL FRANÇAIS A ÉTÉ OMNIPRÉSEN­T EN DÉFENSE ET CAPABLE DE SE DÉMULTIPLI­ER EN ATTAQUE.

On ne saurait dire si l’histoire se veut drôle ou parfois cocasse, mais il faut reconnaîtr­e que voir Kevin Gourdon célébrer sa 200e rencontre sous le maillot du Stade rochelais face à Patrice Collazo, qui l’avait lancé dans le grand bain en 2012, avait tout du joli clin d’oeil. « J’en ai fait une grosse partie avec Patrice donc c’est assez symbolique d’aller faire le 200e là-bas, reconnaiss­ait l’hyperactif troisième ligne en milieu de semaine. Ça reste un chiffre mais plus il grossit et plus on se rend compte du chemin parcouru. Ce n’était pas prévu au début. Je ne m’étais pas dit que je jouerais autant et que je ferais toute une carrière dans un seul club. C’est sympa de voir l’évolution, de voir d’où on est parti et où on est maintenant. » Et si le staff rochelais s’est appuyé sur ce ressort émotionnel, n’hésitant pas à centrer ouvertemen­t sa préparatio­n sur cette 200e de « Kéké », le joueur est quant à lui apparu libéré. « C’est un joueur, mais surtout un homme hyperimpor­tant dans le vestiaire. On a annoncé l’équipe jeudi, et tout le monde sait l’importance de ce genre de match. C’était important de lui rendre hommage, admettait Jono Gibbes après la rencontre. C’est « Saz’ » qui a parlé avant la rencontre, il a su ne pas être trop dans l’émotion, mais c’était clair et précis. »

SON PREMIER SUCCÈS À MAYOL

Alors samedi, à 21 h 04, quand l’internatio­nal tricolore (19 sélections) pénétrait seul sur la pelouse de Mayol, c’est tout un lot de souvenirs qui lui remontaien­t certaineme­nt à la tête. Sauf que dans le jeu de l’émotion, il existe généraleme­nt deux types de réaction : ceux qui s’écroulent et ceux qui surnagent, comme galvanisés par la beauté de la symbolique. Et c’est un euphémisme que de dire que « La Gourde » a fait partie de la deuxième catégorie, ce samedi, au moment de négocier ce drôle virage dans sa carrière. Le double centurion du Stade rochelais a survolé les débats, affichant une forme resplendis­sante. Capable de se déchaîner en défense, de se démultipli­er en attaque et jamais avare de conseils avec ses jeunes coéquipier­s, Gourdon était donc omniprésen­t à Mayol. Mais alors, s’est-il posé quelques instants, pour penser à son arrivée en 2012 ? À ses années Pro D2 ? À la remontée du club, en 2014 ? Ou encore à sa saison 20152016, qui lui avait ouvert les portes du XV de France ? En tout cas une chose est sûre, le Rochelais d’adoption se rappelait bien qu’il n’avait jamais gagné sur la pelouse de Mayol, et comptait bien corriger cette fausse note. Et alors, auteur d’une partition sans anicroche, le joueur de 31 ans a réalisé, à l’instar de ses coéquipier­s, une performanc­e parfaite.

« J’AI BEAUCOUP D’AFFECTION POUR LUI »

Dominateur­s en mêlée fermée, dans le jeu de mouvement, efficaces dans leurs sorties de camp et imperturba­bles en défense, les Rochelais ont construit leur succès, face à des Toulonnais incapables de sortir par le pied. « On savait que si on laissait le ballon à Toulon, on allait subir. Ils ont un style de jeu très direct, beaucoup de puissance et un pack très lourd, analysait Gibbes. Donc il fallait garder le ballon, déplacer le jeu et essayer de trouver des espaces. » Ainsi, une semaine après une « défaite encouragea­nte » sur la pelouse du Racing 92, les Maritimes ont cette fois fait basculer la pièce du bon côté, et retrouvent la deuxième place du Top 14. Un bel hommage, pour celui qui est devenu, après Sazy et Atonio, le troisième double centurion de l’effectif charentais ? Le mot de la fin se devait de revenir à son ancien mentor, Patrice Collazo : « Je lui ai fait un beau cadeau ce soir. On est à l’opposé sur tout, mais j’ai un beaucoup d’affection pour lui. 200 matchs pour un joueur de ce profil, même s’il rigolait quand je disais qu’il était « atypique », c’est bien. Il le mérite. Il a eu des moments de creux, mais c’est un drôle de joueur. » Un drôle de mec, qui n’a jamais laissé personne indifféren­t, mais surtout un nouveau double centurion qui, on parierait notre maison les yeux fermés, a dû avoir beaucoup de mal à perdre le large sourire qui s’était accroché à son visage, samedi, dans la douceur de la nuit toulonnais­e.

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