Midi Olympique

Arbitrage vidéo : la crise de la vingtaine ?

- Par Nicolas ZANARDI nicolas.zanardi@midi-olympique.fr

ALORS QU’IL FÊTAIT CETTE ANNÉE SES VINGT ANS D’EXISTENCE DANS LE TOURNOI DES 6 NATIONS, L’ARBITRAGE VIDÉO N’A JAMAIS SUSCITÉ AUTANT DE CRITIQUES, ENTRE MAUVAISES DÉCISIONS, PROTOCOLES DÉCISIONNE­LS INCOMPRÉHE­NSIBLES POUR LE GRAND PUBLIC ET DE TROP NOMBREUSES COUPURES DE RYTHME. ALORS, S’IL S’AGIT DE RÉTABLIR CERTAINES VÉRITÉS ET DE NE SURTOUT PAS REMETTRE EN QUESTION L’UTILITÉ DU «TMO», LA NÉCESSITÉ DE FAIRE ÉVOLUER SON UTILISATIO­N EST ÉGALEMENT URGENTE.

Vingt ans, déjà. Vingt ans que l’arbitrage vidéo et le désormais célèbre « TMO » ont fait leur apparition dans le cadre suranné du Tournoi, prenant au passage quinze ans d’avance sur le football, non sans quelques heurts et débats au sujet d’un champ d’exploitati­on toujours plus vaste. Redevenu depuis le début de l’année manager des arbitres internatio­naux de World Rugby (fonction qu’il avait déjà exercée entre 2012 et 2016), Joël Jutge nous avait, voilà quelques semaines, livré son avis autorisé sur la question. « Après la Coupe du monde 2007 notamment, on est passé par de grands débats pour l’extension de la vidéo à tout le terrain, notamment après le quart de finale France - Nouvelle-Zélande et cet essai de Jauzion entaché d’un en-avant de passe entre Traille et Michalak. C’était passionnan­t… L’argument qui l’emportait, c’est lorsqu’un débatteur a posé la question suivante : « Peut-on vraiment être champion du monde après avoir bénéficié d’une erreur d’arbitrage manifeste ? Veut-on pour notre sport l’équivalent de la main de Diego Maradona lors de la Coupe du monde de football 1986 ? » On s’est rangé à cet argument, qui était probableme­nt le plus pertinent… »

DU « CLAIR ET ÉVIDENT » JUSQU’À L’OBSESSION DU MICROSCOPI­QUE

Le hic ? Il est qu’à craindre en permanence la main de Maradona, les arbitres se sont progressiv­ement déresponsa­bilisés, en premier lieu les arbitres de touche. Et même si le protocole vidéo a été revu en 2018 pour remettre les arbitres centraux au coeur du processus décisionne­l, le dernier Tournoi des 6 Nations n’en a pas plus été épargné par les erreurs et les polémiques. Un seul exemple, celui de l’essai accordé en faveur du pays de Galles contre l’Angleterre par M. Gaüzère, qui fit couler beaucoup d’encre. « C’est un constat que l’on retrouve à tous les niveaux, dans tous les championna­ts, nous confiait encore Jutge de manière prémonitoi­re avant le début de la compétitio­n. Quand l’arbitrage vidéo a été lancé, ce n’était que pour aller chercher des choses claires et évidentes, pas le microscopi­que. Sauf qu’aujourd’hui, la peur de prendre de mauvaises décisions fait qu’on va parfois trop loin, alors que des décisions de bon sens pourraient suffire à reprendre le jeu plus rapidement, sans que personne n’y trouve rien à redire… » Car c’est bien là, au final, le reproche qui peut être fait à l’arbitrage vidéo moderne. On veut bien sûr parler des coupures qui, en permanence, hachent le rythme des rencontres. On l’a encore vérifié, ce dimanche lors d’UBB-Racing…

DES COUPURES PAS MOINS NOMBREUSES, MAIS PLUS LONGUES

Avec 38 appels à la vidéo au total soit une moyenne légèrement supérieure à 2,5 par match, il faut préciser que le dernier Tournoi s’est situé dans des standards relativeme­nt bas. Reste que s’ils ne sont pas plus nombreux qu’auparavant, ces arrêts de jeu sont en revanche souvent plus longs… À titre d’exemple encore, lors du très difficile France - Galles, M. Pearce eut recours à cinq reprises au « TMO », pour près d’un quart d’heure d’arrêts de jeu, soit trois minutes de pause en moyenne ! Beaucoup trop, évidemment, pour ne pas relancer l’éternel débat qui fleurit régulièrem­ent depuis 20 ans au sujet de l’aspect chronophag­e de la vidéo, quand bien même cet outil a résolu plus de problèmes qu’il n’en a créés. « Depuis que la vidéo a été mise en place, certains ont commencé à craindre que le rythme des rencontres en pâtisse, et cela fait vingt ans que cela dure, nous rappelait Joël Dumé, premier arbitre français à avoir eu recours au « TMO » lors du Tournoi 2001. On en est bien conscient, mais que voulez-vous : l’arbitre est avant tout un être humain, qui n’a pas forcément envie de jouer les Zorro au risque de se tromper et de prendre une décision injuste… On n’a probableme­nt pas encore réussi à trouver le modèle parfait, mais on a au moins le mérite d’évoluer en permanence afin de trouver le meilleur équilibre possible. D’ailleurs, dans les règles officielle­s, l’alinéa concernant l’officiel de match TV est encore intitulé « règle expériment­ale globale ». La dernière mise à jour remonte au mois d’août 2019... C’est bien la preuve que même après 20 ans, rien n’est encore figé. » Au point de susciter plus que jamais des débats au sein de World rugby (lire ci-contre)…

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