Midi Olympique

Joker maintien

- Léo FAURE leo.faure@midi-olympique.fr

L’élection tout juste consommée, René Bouscatel fraîchemen­t assis dans le fauteuil tenu encore chaud par huit années de présidence gozienne, qu’il était l’heure d’élire le bureau. Autrement dit l’aréopage, la garde rapprochée, le premier cercle, les fidèles… Appelez ça comme bon vous semble. Les Lacroix, Lombard, Emin ou Calamel ne gouvernero­nt pas seuls. L’équipe de jeunes loups, qui a pris le pouvoir à la Ligue, promet d’ailleurs de se soustraire un peu de pouvoir pour le rendre au comité directeur à la représenta­tivité élargie. À vérifier dans les faits.

Une chose est sûre, à ce stade : leur première initiative, communiqué­e dès jeudi dernier, fut d’assouplir et d’accroître une réglementa­tion à la flexibilit­é pourtant déjà légendaire. On parle ici des jokers médicaux, au sujet desquels les clubs faisaient depuis longtemps tout et n’importe quoi. Ainsi, on a déjà vu recruter un centurion springbok sur la blessure déclarée d’un espoir à trois feuilles de match ; ou un centre sur l’indisponib­ilité d’un troisième ligne. De telles dérives avaient conduit à la création d’un métier à la précarité redoutable : « profession joker médical », un peu partout en France, pour des missions de trois à six mois sans lendemain. Peu enviable.

Comme si cela ne suffisait pas, ce dispositif aura donc l’occasion de vivre un mois de plus. Ça manquait certaineme­nt. Une « période de recrutemen­t du 9 au 30 avril, pendant laquelle chaque club pourra recruter un joueur (joker médical ou joueur supplément­aire) », indique exactement le communiqué de la LNR. Pourquoi un tel empresseme­nt ? « Suite au contexte de crise sanitaire qui a perturbé le déroulemen­t de la saison » justifie encore la Ligue sans qu’on comprenne vraiment le lien entre les deux événements. La crise a bon dos.

Ce qu’on a compris, en revanche, c’est que certains clubs n’ont pas tardé à s’engouffrer dans une brèche qu’ils avaient sûrement anticipée, vue la vitesse de traitement des dossiers. Mardi, la Section paloise annonçait donc l’arrivée de l’ouvreur Elton Jantjies, solide Springbok aux 37 sélections. Avouez que ça a de la gueule. Avouez aussi que c’est absolument dénué de sens sportif.

« Joueur supplément­aire jusqu’à la fin de la saison », c’est-à-dire six matchs, Jantjies n’est ni plus ni moins qu’un « joker maintien ». La Section, en grande difficulté au classement, reçoit ce week-end son premier concurrent, l’Aviron bayonnais, sans plus aucun droit à l’erreur si elle veut encore éviter un barrage à l’issue très hypothétiq­ue. Elle s’arme donc en conséquenc­e. Les Bayonnais appréciero­nt.

Peut-on s’acheter un maintien ? Pau tente le coup, sans autre vision que le très court terme. Grand bien lui fasse. Sur le fond, on regrettera tout de même l’équité sportive bafouée d’une saison où les effectifs changent considérab­lement en cours de route. Sans oublier que, pendant que Jantjies tentera de sauver un club dont il n’incarne rien, un joueur espoir, béarnais jusqu’au bout des ongles, rate ainsi sa chance. Ainsi va le rugby business.

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