Midi Olympique

« Les individual­ités ont permis la victoire, pas le collectif »

- Par Arnaud BEURDELEY arnaud.beurdeley@midi-olympique.fr

IMANOL HARINORDOQ­UY PEU APRÈS LE COUP DE SIFFLET FINAL DE CETTE VICTOIRE INAUGURALE POUR LES BLEUS (24-29), L’ANCIEN TROISIÈME LIGNE INTERNATIO­NAL

(82 SÉLECTIONS) AVAIT ENCORE DES QUESTIONS PLEIN LA TÊTE. PAS FRANCHEMEN­T CONVAINCU PAR LA PERFORMANC­E DU XV DE FRANCE FACE À L’ITALIE, IMANOL HARINORDOQ­UY, NOTRE CONSULTANT, A D’ABORD REGRETTÉ UN MANQUE D’AGRESSIVIT­É DÉFENSIVE AVANT DE SE RÉJOUIR DE LA CAPACITÉ DES JOUEURS DE FABIEN GALTHIÉ À NE PAS ÊTRE TOMBÉS DANS LE PIÈGE TRANSALPIN. ET DE SE MONTRER MÊME PLUTÔT OPTIMISTE POUR LE VOYAGE À DUBLIN SAMEDI PROCHAIN…

Les Bleus vous ont-ils fait peur face à l’Italie ?

Si je dois être honnête, je dois dire que j’ai manqué de séré- nité en fin de rencontre, dès l’instant où les Italiens ont pris l’avantage au score. J’ai senti un manque de confiance de la part des joueurs français à ce moment de la rencontre, surtout en raison de l’indiscipli­ne et du carton jaune infligé à Charles (Ollivon). Franchemen­t, sans le manque de réussite d’Allan sur sa dernière pénalité, on aurait pu se faire emporter. D’ailleurs, je n’ai pas été le seul à avoir peur... Il suffisait de regarder le visage des joueurs à la fin de la rencontre : ils ont tous poussé un grand ouf de soulagemen­t.

Comment justifier ce premier succès pénible de l’équipe de France ?

D’abord, le principal point noir, c’est notre indiscipli­ne. Commettre plus de dix fautes au niveau internatio­nal, ce n’est jamais bon. Alors quand on en fait dix-huit, je vous laisse imaginer. Ensuite, la défense, qui était notre point fort jusqu’à présent, n’a pas été impériale. J’ai trouvé les joueurs moins agressifs, moins mordants. Est-ce qu’il y a eu un changement dans la stratégie ? Il faudra poser la question, mais nous avons été moins présents dans le fait de gagner du terrain. On a subi les impacts, ce qui est surprenant. L’an dernier, cette équipe montait fort, très fort, et gagnait les impacts. Sur cette rencon- tre, le rideau est souvent monté moins vite, moins fort. On a laissé les Italiens gagner les impacts, ce qui nous a empê- chés de contester les ballons dans les rucks. Ces Bleus ont été fébriles dans les attitudes. Il y a eu plus de fautes de mains que d’habitude, me semble-t-il. En fait, j’ai ce sentiment étrange que nous nous sommes mis en difficulté­s tout seuls. Parce que ces points-là, nous sommes en mesure de les maîtriser. Mais ça n’a pas été le cas.

Vous soulignez cette absence de présence dans le jeu au sol. Est-ce inquiétant avant un déplacemen­t en Irlande pour affronter une équipe qui excelle dans ce secteur de jeu ?

Si l’équipe de France ne gagne pas la ligne d’avantage en défense contre l’Irlande, ce sera compliqué d’espérer quoi que ce soit. Aujourd’hui (dimanche), ça n’a pas prêté à conséquenc­es parce que les Italiens ont balancé quelques ballons. Et heureuseme­nt, parce que nous aurions pu prendre quelques attaques dangereuse­s dans la figure. Il y a eu certaines situations favorables aux Italiens, avec des surnombres et des soutiens en nombre dans l’axe, mal négociées. Tant mieux. Mais si on laisse l’adversaire dérouler de la même façon à Dublin qu’à Rome, ce sera injouable car les Irlandais ont une plus grande capacité à conserver le ballon.

Fabien Galthié avait évoqué dans la semaine précédant la rencontre sa volonté de jouer sur la « repossessi­on ». L’avez-vous perçu ?

Alors autant je n’ai pas senti la volonté des Français d’occuper le camp adverse par du jeu au pied, autant je n’ai pas senti les Français vouloir prendre l’ascendant physique. Pourtant, on l’a fait un peu en début de match et ça a été payant. C’était la meilleure stratégie à adopter. Mais il aurait fallu être plus virulent défensivem­ent. Seulement, ça n’a pas été le cas et à partir de là, les Italiens ont su enchaîner avec de la vitesse et ainsi nous mettre à mal. Résultats : 18 pénalités et un car- ton jaune contre le XV de France.

Comment expliquez-vous cette indiscipli­ne ?

Premièreme­nt, c’est le fait d’avoir laissé jouer les Italiens et, dès lors, de subir les impacts. Mais ce qui m’a le plus marqué, ce sont les attitudes individuel­les. Sans stigmatise­r un joueur en particulie­r, les Bleus ont tous, tour à tour, commis des pe- tites fautes. Et, encore une fois, ce que je regrette, c’est que c’est un point que l’on peut maîtriser. C’est ce que je n’ai pas compris sur cette rencontre, même si c’est rassurant car c’est quelque chose que l’on peut corriger facilement.

Il y a quelques années, l’équipe de France n’aurait-elle pas perdu cette rencontre ?

C’est probableme­nt vrai ! Peut-être qu’avec moins de ressources mentales, nous aurions perdu ce match. Surtout, comptablem­ent, les Bleus ont fait le plein. C’est bien le plus important. Dans une compétitio­n comme le Tournoi des 6 Nations, on ne gagne pas tous les matchs de la plus belle des manières. Ce fut le cas l’an dernier. Nous aurions très bien pu perdre contre l’Irlande. Et pourtant, cette équipe a fait le Grand Chelem. Un Tournoi, ça se construit. Il faut donc surtout retenir la victoire, même si j’ai l’impression que nous sommes sur le même rythme qu’au mois de novembre.

C’est-à-dire ?

En novembre, nous avons gagné les matchs, mais sans avoir de marge de manoeuvre. Encore une fois, je n’ai pas réussi à identifier un schéma de jeu avec des cellules, avec différente­s options. Ça, je l’ai vu davantage chez les Italiens. Heureuseme­nt, nos individual­ités permettent de faire des différence­s. Ce sont les individual­ités qui ont permis la victoire, pas le collectif. Or, l’an passé, le Grand Chelem, l’équipe de France l’a remporté grâce à un collectif sublimé par ses individual­ités.

Craignez-vous cette rencontre à venir contre l’Irlande ?

Je l’attends surtout avec impatience. Les Irlandais ont été impression­nants au Pays de Galles, même s’ils ont relâché la pression après avoir pris le score à leur compte très rapidement dans le match. Surtout, les Verts ont montré qu’ils avaient des faiblesses à exploiter. Vraiment, j’ai hâte d’y être. Je suis sûr qu’on verra une tout autre équipe de France dans l’engagement. Je crois, au fond de moi, que les joueurs avaient déjà la tête à l’Irlande sur cette rencontre à Rome. Ça peut se comprendre. Ils ne craignaien­t pas les Italiens et ça s’est vu. Ça explique pourquoi on a failli passer à la trappe. Or, on a très peur des Irlandais. Tant mieux. Parce que cette équipe de France se sublime lorsqu’elle a la trouille.

Le fait que l’Irlande puisse bénéficier d’un jour de récupérati­on supplément­aire ne sera-t-il pas un avantage ?

Je n’y crois pas. Nous sommes en début de Tournoi et les Bleus ont bénéficié d’une bonne préparatio­n. Les joueurs seront prêts pour ce défi. Le staff a bien coaché sur ce match où il n’y a pas eu de temps de jeu de dingue… (il souffle). Non, très franchemen­t, vous ne me ferez pas croire qu’il y a eu une intensité de folie sur cette première rencontre.

« Le principal point noir, c’est notre indiscipli­ne. Commettre plus de dix fautes au niveau internatio­nal, ce n’est jamais bon. »

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