Midi Olympique

« Le vainqueur sera champion du monde »

FRANÇOIS STEYN (Ancien arrière des Springboks) IL Y A QUELQUES MOIS, FRANÇOIS STEYN (36 ANS), DOUBLE CHAMPION DU MONDE, METTAIT UN TERME À SON IMMENSE CARRIÈRE. POUR NOUS, IL SE PROJETTE AUJOURD’HUI SUR LE QUART DE FINALE LE PLUS ATTENDU ET ÉVOQUE LA RÉVO

- Propos recueillis par Marc DUZAN marc.duzan@midi-olympique.fr

À quoi vous attendez-vous, dimanche soir ?

Les Français sont favoris mais ce sera acharné, indé- cis… Je peux juste vous dire que le vainqueur de ce match sera champion du monde derrière. Ce France- Afrique du Sud est le match que tout le monde attend depuis quatre ans. C’est la finale avant l’heure. Et ce qui m’ennuie le plus, c’est que ce match mons- trueux, magnifique, se jouera probableme­nt sur une décision d’arbitrage, un carton rouge tiré par les che- veux ou un coup d’esbroufe de leur nouveau truc, là, le « bunker »…

Selon vous, les avants français peuvent-ils rivaliser avec le pack sud-africain ?

Pour avoir joué quelques années au Racing et à Montpellie­r, je sais de quoi sont capables les avants du Top 14. Ils sont costauds, agressifs, discipliné­s. Ils peuvent évidemment traiter d’égal à égal avec les avants sud-africains. […] Les matchs les plus durs de ma carrière, je les ai joués en France.

Les Sud-Africains vont-ils cibler Antoine Dupont, de retour sur le terrain trois semaines après avoir été opéré d’une fracture ?

Ce serait idiot. Si vous faites une cible d’Antoine, vous avez déjà perdu le match parce que vous serez incapables de l’attraper. Il est trop fort, ce mec…

Vous avez été le coéquipier de Paul Willemse au MHR. Ne pensez-vous pas que son profil manquera au pack des Bleus, dimanche soir ?

Bonne question. En un sens, Paul est unique en son genre, dans le rugby français. Mais Thibaud Flament et Cameron Woki amènent quelque chose de diffé- rent. Je trouve d’ailleurs leur attelage très intéressan­t, depuis le début de la Coupe du monde.

Si vous étiez sélectionn­eur des Boks, débuteriez-vous ce quart avec Handré Pollard ou Manie Libbok à l’ouverture ?

Manie a été magnifique depuis le début de la com- pétition mais son jeu au pied rend parfois un peu les gens nerveux, au pays. (il marque une pause) Il est pour- tant devenu un très bon buteur, depuis qu’il a signé aux Stormers (en 2021).

Mais que feriez-vous, vous ?

Je ferais débuter Manie et Handré Pollard entrerait à la mi-temps. Je me dis qu’en titularisa­nt Pollard et Lukhanyo Am (le centre revient également de bles- sure, N.D.L.R.) à la place de ceux ayant qualifié l’équipe pour les quarts, le risque est de perdre certains joueurs en route, de provoquer la colère d’autres… Or, quand arrivent les phases finales, un groupe a besoin d’une saine énergie, de calme, de bonnes ondes…

Quel joueur français vous impression­ne-t-il le plus, depuis le début de la Coupe du monde ?

Thomas Ramos, sans hésitation possible. Son tir au but est parfait, son sens de la contre-attaque excellent et il est plutôt efficace, sous les ballons hauts… Je l’adore, Ramos.

En France, on se fait un monde du « Bomb Squad », ce banc de touche où cohabitent six ou sept avants appelés à entrer en jeu au même moment. Quelle est votre définition de cette arme technique là ?

Le « Bomb Squad » a changé le visage du rugby mon- dial. Il a poussé les autres équipes à réfléchir elles aussi à la constituti­on de leurs bancs de touche, à leur façon de terminer un match. Quand deux équipes se tiennent, c’est toujours le banc de touche qui fait basculer la rencontre, lui donnant un autre rythme, accélérant le tempo général ou le ralentissa­nt…

Êtes-vous certain que cela n’existait pas, il y a dix ans ?

Oui ! Quand j’ai été champion du monde en 2007, les remplaçant­s n’avaient pas du tout le même impact sur le match. Je me souviens qu’en finale au Stade de France, Bismarck (du Plessis) n’était entré en jeu que parce que John Smit saignait du nez… L’approche était radicaleme­nt différente, à mes débuts…

Oui. Ma polyvalenc­e (il était capable de jouer ouvreur, arrière ou centre, N.D.L.R.) et le fait que Lukhanyo (Am) puisse glisser à l’aile en cas de besoin offraient à Rassie (Erasmus) ce luxe-là. Aujourd’hui, je sais que Faf De Klerk (le demi de mêlée, N.D.L.R.) s’entraîne énormément à l’ouverture, par exemple. La constituti­on du « Bomb Squad » n’est jamais due au hasard. Tout est pensé, étudié, adapté à l’adversaire.

Vous avez mis un terme à votre carrière il y a seulement quelques mois. Que diriez-vous à Rassie Erasmus, si jamais il vous appelait demain en équipe nationale ?

Je dirais non ! (rires) Je ne peux plus courir, mon genou est mort ! On doit d’ailleurs m’y mettre une prothèse…

 ?? ?? Page de gauche, les Bleus sont prêts à affronter l’Hydre de Lerne sud-africain. Une armada emmenée par un général échevelé, Faf de Klerk . Photos Midi Olympique - Patrick Derewiany et Icon Sport
Page de gauche, les Bleus sont prêts à affronter l’Hydre de Lerne sud-africain. Une armada emmenée par un général échevelé, Faf de Klerk . Photos Midi Olympique - Patrick Derewiany et Icon Sport
 ?? ?? En 2019, vous étiez un membre à part entière du « Bomb Squad »…
En 2019, vous étiez un membre à part entière du « Bomb Squad »…

Newspapers in French

Newspapers from France