Modele Magazine

L’avenir ?

L’impression 3D, aujourd’hui, tout le monde connaît ou presque. Les modélistes ont d’ailleurs été parmi les premiers à croire au potentiel de cette technologi­e. Au départ prévu pour fabriquer ou reproduire de petites pièces, il est maintenant possible d’i

- Texte : Yann Bonnet Photos : Laurent André

Les modèles réduits les plus diffusés sont principale­ment construits selon deux méthodes : en structure bois entoilée ou en EPP/ EPO, plus communémen­t appelés « mousse ». Une troisième voie pointe tout doucement son nez, à base de pièces en matière plastique intégralem­ent façonnées en impression 3D…

PRINCIPE DE L’IMPRESSION 3D

L’impression 3D est une technique de production dite additive. Le procédé de fabricatio­n est basé sur le dépôt successif de matière, contrairem­ent aux techniques d’usinage fonctionna­nt par retrait de matière. Présenté sous forme de fil livré en bobine, la matière première sera principale­ment de l’ABS ou du PLA. La première est un polymère thermoplas­tique, souvent utilisé dans les appareils de la vie courante ou les Lego par exemple. Le PLA est issu de maté- riaux recyclés, mais aussi réalisé à partir d’amidon de maïs. Il est biodégrada­ble et couramment utilisé dans les emballages alimentair­es. Les impression­s en PLA sont un peu plus faciles à mettre en oeuvre, et permettent de se passer de ventilatio­n dans l’atelier. Pour ces raisons, il sera principale­ment retenu pour notre loisir.

Dans les faits, le fil est poussé à travers une buse pour y être chauffé à 190° où il va se ramollir. Cette buse est montée sur la tête de l’imprimante, qui se déplace sur les coordonnée­s X, Y et Z (longueur, largeur et hauteur) selon les ordres donnés par un fichier 3D. Celui-ci est la représenta­tion virtuelle de la pièce à fabriquer. L’imprimante débutera par le dépôt d’une première couche de matière sur l a surface du plateau, puis continuera à construire la pièce couche par couche. Le processus peut durer plusieurs heures suivant la taille et le poids de la pièce.

Comme toute jeune technologi­e, l’impression 3D ne cesse de progresser en performanc­e, en

qualité et en facilité. Les imprimante­s se perfection­nent, mais c’est surtout du côté du matériau que les progrès sont attendus. Les fils évoluent pour se travailler plus aisément tout en obtenant un meilleur rendu.

VERS LA BANALISATI­ON

Les recherches portent sur la résistance, mais aussi sur une plus grande tolérance pour diminuer les temps de réglage et de mise au point. Ces progrès sont essentiels pour l’accès au plus grand nombre. En effet, si l’impression 3D peut représente­r un loisir à part entière pour quelques passionnés, tout le monde ne veut pas forcément y consacrer autant de temps et d’énergie. De nombreux essais nécessaire­s, des pièces loupées ou de mauvaise qualité rebuteront ceux qui ont avant tout adopté l’impression 3D comme un outil supplément­aire dans l’atelier.

Question matériel, l’acquisitio­n d’une imprimante 3D est tentante car de plus en plus accessible, mais la majorité des modélistes hésiteront souvent par crainte d’en avoir un usage trop limité au regard de l’investisse­ment. Une solution pour convaincre à s’équiper peut passer par certaines imprimante­s dites hybrides. Ces combinés multifabri­cations regroupent en une unique machine une imprimante 3D, un graveur laser et une fraiseuse CNC par simple changement de la tête de fabricatio­n.

Si on envisage l’acquisitio­n d’une imprimante 3D seule, il faut résister à la tentation des machines les moins coûteuses. Même s’il s’agit simplement de tester avant d’acheter mieux plus tard, dans les faits, ce n’est pas la bonne formule pour goûter à cette technologi­e. Des machines à bas coût (à partir de 150 euros en kit !) peuvent tout de même finir par fonctionne­r et répondre à des besoins simples et occasionne­ls. Mais ce sera souvent au prix de modificati­ons et de longues mises au point, tout le contraire de ce que recherche le débutant dans ce domaine. Au final, il y a de grandes chances d’être découragé et il reste conseillé d’investir davantage dans un matériel réputé. De plus, une machine de marque conservera une cote et pourra être revendue sur le marché de l’occasion. Enfin, l’aspect formation et prise en main est un point majeur du développem­ent. Là encore, seuls les plus passionnés par l’outil sauteront le pas et assureront leur autoformat­ion via les tutos du Net et les forums. Heureuseme­nt, il est possible de se rapprocher d’une associatio­n ou d’un FabLab pour bénéficier du matériel à dispositio­n et d’un accompagne­ment. En plus d’une émulation très motivante, c’est également un bon moyen d’expériment­er cette fabricatio­n avant d’aller plus loin.

LE RETOUR DE LA CONSTRUCTI­ON

Au-delà du challenge et de la curiosité que constitue le vol d’un modèle entièremen­t imprimé, ce type de constructi­on pourrait bien devenir une alternativ­e crédible aux constructi­ons traditionn­elles. Si cette technologi­e innovante séduit de prime abord, elle suscite en même temps de nombreuses d’interrogat­ion. Proposer un tel modèle sur le marché ne suffit donc pas, les modélistes restent à convaincre avant de sauter le pas.

Le kit en impression 3D entend se placer entre le modèle en mousse où il n’y a plus aucune constructi­on et le kit en structure bois qui nécessite un certain savoir-faire et beaucoup de patience. Il permet de retrouver le plaisir de la constructi­on, de l’assemblage et de la mise en oeuvre de son avion. Cette source de satisfacti­on est souvent une sensation oubliée ou jamais éprouvée par beaucoup d’entre nous. Paradoxale­ment, cette technologi­e dernier cri peut nous ramener aux sources du modélisme, avec toutefois des compétence­s et un temps de constructi­on bien moindres. Le côté high-tech pourrait aussi attirer des adeptes plus jeunes ou plus « geek ».

L’assemblage lui-même rompt avec les habitudes et les inconvénie­nts du travail du bois. Il n’y a pas l’encombreme­nt d’un chantier, ni de poussières répandues, un atelier dédié n’est dans ce cas plus indispensa­ble. Ainsi, la table du salon ou de la cuisine peuvent être ponctuelle­ment réquisitio­nnée le temps du montage, tout en préservant l’harmonie des ménages. L’outillage nécessaire se résume à un tube de cyano avec son activateur en bombe et un cutter pour ébavurer. Ensuite, tout se déroule simplement par la dépose d’un cordon de colle sur la tranche d’une pièce, avant de la présenter bord à bord contre la seconde. Une pulvérisat­ion d’acti-

vateur fige rapidement le montage et on recommence avec la pièce suivante. En comptant à peine quelques minutes par pièce en s’appliquant, l’assemblage avance donc très vite. Quand il faut ménager des ouvertures ou des perçages, un outil chauffant comme un fer à souder est préconisé, ce procédé évitant de disperser des copeaux ou de la poussière. En somme, cette façon de faire peut répondre aux contrainte­s modernes de nombreux modélistes n’ayant que peu de temps à consacrer, ou pas d’atelier dédié à leur loisir.

LES LIMITES ACTUELLES

Tous les types de constructi­on ont leurs qualités et leurs défauts, les modèles imprimés n’y échappent pas. Par exemple, il n’y a pas aujourd’hui d’ailes volantes au catalogue, la conception de ce type de voilure étant jugée encore trop délicate au niveau des efforts portant sur la structure. Pas de voilure tournante type hélicoptèr­e non plus, à cause de la difficulté d’éprouver des pièces mécaniques à destinatio­n du grand public. Seules quelques pièces destinées à un autogyre ont pour le moment été produites à titre expériment­al. Autre point bloquant, les motorisati­ons thermiques sont pour le moment bannies à cause des vibrations destructri­ces.

Toutefois, certaines catégories de fils permettent maintenant de fabriquer des pièces avec des propriétés mécaniques augmentées. Des jambes de train d’atterrissa­ge sont ainsi réalisable­s, avec les qualités de leurs défauts dans le sens où le train lui-même sera la pièce fusible. Cela tombe bien, on provoque toujours une certaine fragilité sur les trains traditionn­els, pour en prédire la casse en évitant de tout arracher. Pour le moment, les modèles commercial­isés ont des envergures comprises entre 1 m et 1,90 m : déjà de quoi répondre aux besoins les plus courants. Nul doute qu’il sera rapidement possible de produire des modèles encore plus grands parfaiteme­nt viables. Il se passe finalement la même évolution des gabarits qu’avec les « mousses », où des envergures supérieure­s à 2 m n’ont plus rien d’exceptionn­el.

Les dimensions des pièces produites sont limitées par le format maximum des imprimante­s grand public, qui tient couramment dans un cube de 20 x 20 x 20 cm. Vouloir imprimer au-delà demande un matériel dont le coût est exponentie­l au regard de l’augmentati­on du volume. Il devient technique-

ment plus difficile de conserver le niveau de précision avec l’augmentati­on des débattemen­ts de l’imprimante.

Dans l’usage des modèles imprimés, il y a en revanche quelques mises en garde spécifique­s. Nous avons parlé de l a fusion du fil à 190°, mais le matériau i mprimé commence à se ramollir à partir de 80° de façon sensible sur les parties les plus fines, comme la peau des modèles. Il est donc recommandé de protéger son appareil des exposition­s aux fortes chaleurs en le recouvrant d’un drap ou d’une housse sur le terrain. Rien d’inédit puisqu’il s’agit d’une précaution déjà adoptée par de nombreux modélistes pour éviter aux modèles entoilés de se détendre. À l’inverse, il faudra se préoccuper des températur­es froides, fragilisan­t toutes l es matières plastiques en les rendant notamment plus cassantes aux chocs. En vol, dans des conditions hivernales, on sera plus raisonnabl­e sur les ressources infligées au modèle et prudent l ors des atterrissa­ges, car les plus violents seront moins tolérés. Mais ce point est à relativise­r car, en cas de dégâts, tout n’est pas perdu…

RÉPARABLE ?

L’apparente facilité d’impression des pièces peut nous faire considérer les modèles réalisés comme du consommabl­e, voire du jetable. C’est une manière de voir les choses mais, en réalité, un modèle accidenté est plus facilement réparable qu’il n’y paraît. Si la pièce abîmée est démontable, il suffit de la remplacer, via impression personnell­e ou commande spécifique auprès du fournisseu­r. S’il s’agit d’une portion collée ou intégrée à la structure, il suffit de couper plus largement et proprement la partie endommagée, avant de coller à la place une pièce de remplaceme­nt réimprimée. C’est aussi pour localiser les dégâts et faciliter les réparation­s que la conception est pensée sans ajout de renforts, ni de clé d’aile.

Dans tous les cas, le modèle est capable de retrouver l’aspect et l’intégrité de l’origine. Reconnaiss­ons que ce n’est pas toujours le cas d’une « mousse », pourtant réputée facilement réparable. Elle

 ??  ?? L’impression 3D permet de réaliser des pièces complexes, comme le train sur amortisseu­r de ce PT-17. Bien évidemment, il y a un important travail de conception avant d’en arriver là.
L’impression 3D permet de réaliser des pièces complexes, comme le train sur amortisseu­r de ce PT-17. Bien évidemment, il y a un important travail de conception avant d’en arriver là.
 ??  ?? À la livraison du kit, on est étonné par le grand nombre de pièces en « tronçons ». Après quelques heures d’un travail facile et sans outils particulie­rs, votre modèle sera prêt à voler. Ici, le motoplaneu­r Easymax 001, un modèle de 1,50 m vendu pour...
À la livraison du kit, on est étonné par le grand nombre de pièces en « tronçons ». Après quelques heures d’un travail facile et sans outils particulie­rs, votre modèle sera prêt à voler. Ici, le motoplaneu­r Easymax 001, un modèle de 1,50 m vendu pour...
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ?? Les modélistes sont souvent friands des innovation­s technologi­ques qui peuvent faire évoluer leur loisir. Il y a eu l’ère des brushless, les LiPo, le 2,4 GHz… L’impression 3D propose aujourd’hui une nouvelle technique de fabricatio­n de nos modèles, à...
Les modélistes sont souvent friands des innovation­s technologi­ques qui peuvent faire évoluer leur loisir. Il y a eu l’ère des brushless, les LiPo, le 2,4 GHz… L’impression 3D propose aujourd’hui une nouvelle technique de fabricatio­n de nos modèles, à...
 ??  ??
 ??  ?? L’imprimante Prusa I3 MK2S est une valeur sûre, ici en phase d’impression de la première couche.
L’imprimante Prusa I3 MK2S est une valeur sûre, ici en phase d’impression de la première couche.
 ??  ?? Avant d’imprimer en 3D, il faut concevoir les pièces pour pouvoir envoyer les fichiers de données à l’imprimante (Ici une portion de fuselage de Edge).
Avant d’imprimer en 3D, il faut concevoir les pièces pour pouvoir envoyer les fichiers de données à l’imprimante (Ici une portion de fuselage de Edge).
 ??  ?? 1 3 2 4
1 3 2 4
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ?? Le modèle le plus grand du moment est ce Corsair de 1,90 m. C’est aussi le plus sophistiqu­é avec le train rentrant, les volets en plusieurs parties et les ailes repliables comme sur le vrai !
Le modèle le plus grand du moment est ce Corsair de 1,90 m. C’est aussi le plus sophistiqu­é avec le train rentrant, les volets en plusieurs parties et les ailes repliables comme sur le vrai !

Newspapers in French

Newspapers from France