TRAJECTOIRE Épisode 20 Accus LiPo : les vrais bons gestes antifeu
Accus LiPo : Les vrais bons gestes antifeu
Faut-il vraiment avoir peur des
LiPo? Comment se protéger des risques d’incendie? Où se situe réellement le danger? Comment gérer l’incendie en lui-même, et bien entendu comment l’éviter au maximum? Telles sont les questions auxquelles je me propose d’apporter quelques réponses, avec la présentation d’équipements de protection adaptés.
Faut-il être vraiment parano avec les LiPo, sont-ils vraiment si dangereux? Je vais vous surprendre mais j’aurais presque envie de vous répondre que non. Pourquoi? Parce que je prends toutes les précautions et que j’utilise les meilleurs matériels. Facile me direz-vous de ne pas être parano quand on s’entoure de toutes les précautions!
De fait, je n’ai jamais eu le moindre problème, même si, comme tout le monde, j’ai pu être parfois un peu négligent. Et voilà le problème justement, on s’habitue au risque, puis, comme tout va toujours bien, on prend petit à petit des libertés… qui peuvent être tragiques! Ce n’est pas parce que « l’on a toujours fait comme ça » que le danger n’existe pas, bien au contraire, l’habitude n’est pas du tout une assurance. C’est peut-être d’en être conscient qui m’a évité des soucis en étant responsable et prudent.
ASSURANCE : LES YEUX POUR PLEURER ?
Vous aurez remarqué le luxe de précautions employées par les expéditeurs quand vous recevez des batteries LiXx. Concrètement, ces matières dangereuses sont transportées de façon spécifique car cela est imposé par les assureurs. Oui, mais chez vous, où sont passées toutes ces précautions ? Vous stockez donc des matières dangereuses, vous les transportez aussi sans équipement de protection adapté ? Le risque existe, pour qu’en cas de sinistre, votre assureur ne le prenne pas en charge, fut-il même d’une origine autre que celle qui nous intéresse. Nous vous conseillons de vous renseigner auprès de votre assurance habitation pour en connaître les clauses spécifiques…
COURT-CIRCUIT DANS LE MODÈLE, PLUS FRÉQUENT QU’ON NE LE CROIT
Que ce soit à l’atelier, dans la voiture ou sur le terrain, on ne prend pas assez au sérieux le risque de propagation d’incendie depuis le modèle lui-même. Je ne parle pas du cas du modèle crashé, ce qui est encore une autre question, mais du modèle qui prend feu « tout seul », sans choc ou accident notable, avec des LiPo en bon état.
Je le dis depuis longtemps, un grand danger vient du régulateur de tension pour la réception. Pour ma part, je limite l’usage de cet accessoire au maximum, surtout associé à un LiPo. Le régulateur est pour moi le maillon faible. Il chauffe et (contre-)produit une perte d’énergie inutile. Il n’est que rarement protégé contre les courtscircuits et, de plus, le régulateur peut ne pas suivre si on lui
demande plus qu’il ne peut fournir, surtout s’il se produit un accident électrique dans l’installation.
Or, comme premier facteur, nous avons le trop fréquent courtcircuit dans un servo. Et c’est bien souvent par l’un d’entre eux, en se mettant en court-jus, que va débuter l’incendie. Le régulateur va ensuite en devenir le principal foyer. La parade, si tant est qu’il y en ait une, est de proscrire tout servo bas de gamme, car c’est une usine à courts-circuits (même le risque n’est pas de 0 avec des servos haut de gamme…).
Ensuite, Il faut absolument veiller à ce que tous les servos ne puissent en aucun cas venir forcer ou buter sur quoi que ce soit. Toujours régler les palonniers de servo comme s’il s’agissait d’une radio non programmable pour minimiser au maximum les contraintes sur les servos. En plus, on y gagne en précision et en conso !
RAPPEL DES ÉPISODES PRÉCÉDENTS
• Pour éviter les courts-circuits dans le modèle, utiliser du câble « premium » dont les qualités
mécaniques et la résistance à l’abrasion sont très importantes. Un câble standard se dénude très facilement juste par pincement, alors que pour dénuder un câble « premium », il faut vraiment être équipé. La différence est énorme, et on ne parle pas de la résistance à la chaleur, qui est du même ordre.
• Je n’installe pas de LiPo à la réception, ni de régulateur, mais j’adapte la technologie de mes accus LiXx à mes servos. C’est-àdire que pour des servos classiques, je choisis des LiFePo4 2S de type A123, donc en « canette » et non pas en présentation « chinoise » comme des LiPo. Branchés en direct, les 6,6 V d’un LiFePo4 sont tout à fait comparables aux cinq éléments d’un ancien accu NiMh.
Avec des servos HV, dont je conseille de s’équiper sur un modèle neuf, j’utilise toujours en direct un accu LiIon 2S.
• Si un ou plusieurs servos demandent un voltage classique dans une installation, il est plus sûr de mettre un petit régulateur 2A au plus près de chaque servo, qui en même temps fera office de fusible.
TESTER LES LIPO : UNE NÉCESSITÉ PAS SI SIMPLE
Connaître la tension précise de chaque élément d’un accu LiPo est bien entendu primordial. Tout le monde connaît ces testeurs qui vous indiquent en pourcentage la capacité restant dans l’accu ainsi que la tension élément par élément. C’est malheureusement là que le bât blesse. En effet, mon expérience avec quelques-uns de ces testeurs est qu’ils ne donnent pas toujours les mêmes chiffres... Pire encore, au sein du même testeur, on peut trouver des écarts sidérants entre les éléments, alors que le pack est parfaitement équilibré. Sans compter qu’avec un peu de malchance, il va vous faire apparaître un élément en bonne santé alors qu’il est en grave déséquilibre. Bref, le testeur pas cher, c’est bien pour se donner une idée générale de l’état de l’accu sur le terrain, mais c’est insuffisant pour vous informer sur un éventuel déséquilibre de votre LiPo.
En termes de testeurs, le seul en qui j’ai confiance est le Multiplex, vraiment précis, très élaboré, peut-être un peu trop car d’usage moins facile que les autres. En revanche, il donne des indications absolument parfaites quelle que soit la technologie de l’accu. En effet, en plus d’être imprécis, les testeurs conventionnels sont très peu adaptés à l’analyse des accus LifePo4, LiIon ou LiPo HV.
Personnellement, j’ai acheté deux de ces testeurs Multiplex, je vous encourage à faire de même. J’espère juste qu’une prochaine mise à jour du firmware rendra l’usage plus intuitif, surtout pour passer d’un type d’accu à un autre (c’est pour ça que j’en ai pris deux).
CHARGER EN MODE BALANCE
Certains chargeurs sont plus lents en mode équilibrage, alors quelques modélistes changent le mode de charge pour un plus rapide, mais sans réel équilibrage. Ce n’est pas la bonne option. Il faut bien comprendre que déjà en mode équilibrage, nos chargeurs offrent rarement une puissance de décharge suffisante. Elle est même souvent ridiculement faible. Explication : quand un pack d’accus est déséquilibré, un élément atteindra son niveau de fin de charge avant les autres. Or sur un LiPo, il ne faut absolument pas dépasser les 4,20 V par élément. Pour éviter cela, en théorie du moins, on va lui soustraire du courant, le décharger donc, pendant que l’intégralité du
pack continue d’être chargée. Le même courant arrive de façon égale et sans distinction à tous les éléments en même temps. Mais si votre LiPo est très fortement déséquilibré, comme sa capacité de décharge est très faible par rapport à sa capacité de charge, votre chargeur aura peut-être du mal à gérer de façon optimale. Et même avec des packs récents et de bonne qualité, je me suis retrouvé plus d’une fois avec un élément totalement à la traîne… Même de qualité, tous les éléments ne se comportent pas toujours de la même manière.
Partant du principe qu’aucun chargeur classique ne gère suffisamment bien la tension individuelle de chaque élément, je n’utilise que des chargeurs gérant chaque élément de façon totalement indépendante. Ils sont rares, j’en ai déjà parlé au début de la série Trajectoire, ce sont ceux qui chargent par la prise d’équilibrage (donc sans relier les prises noires et rouges principales). J’utilise un chargeur UNRC9 pour ma part, capable de charger neuf éléments de façon indépendante. C’est-àdire que je peux charger en même temps différents packs de différentes capacités, bien entendu tous avec la même intensité. J’ai trouvé le mien chez myrcmart.com, mais il n’est plus dispo au moment où j’écris ces lignes. Il y a aussi d’autres chargeurs plus petits fonctionnant sur le même principe. En revanche, on ne peut dépasser les 4 A de charge par la prise d’équilibrage, mais c’est bien suffisant.
SE PROTÉGER DU FEU
Après avoir parlé de sécurité active, ce qui me semble quand même le plus important, parlons maintenant de sécurité passive. Sur le sujet, j’ai plutôt tendance à faire confiance au « Made in Germany » qu’aux produits asiatiques. C’est plus cher, c’est clair, mais quand on parle de sécurité, on ne joue pas. J’en veux pour preuve la petite sacoche Multiplex nommée « Akkusafe 10 » destinée aux LiPo. Vous trouverez sur leur site
Internet une vidéo impressionnante comparant les étuis chinois, totalement inefficaces, au produit allemand. Quelques dollars vs
150 euros, l’écart paraît disproportionné. On comprend mieux quand d’une part on a la sacoche dans les mains pour apprécier la qualité et l’épaisseur des matériaux et que, d’autre part, on voit en vidéo in situ les comportements respectifs face au feu. Le sac chinois se flétrit immédiatement en laissant totalement passer les flammes, l’allemand ne laisse échapper que la fumée… À l’intérieur, on peut y stocker trois ou quatre packs en 6S, ce qui est plutôt confortable. Mesurant 21,5x17 cm sur 8 cm de profondeur, il résiste à
1 200 °C.
Au moins là, en voiture comme ailleurs, la sécurité est réelle. Très pratique à utiliser, d’une contenance généralement suffisante, c’est le moyen que je privilégie pour transporter mes accus sur le terrain. C’est comme tout, c’est cher avant le drame, mais on oublie le prix après !
Plus abordable et fort utile, toujours chez le constructeur allemand, j’ai trouvé un tapis de charge. De soui s’agitil ? C’est un tapis ignifugé, assez grand (45x35 cm) pour isoler du feu le plan de travail sur lequel vous chargez vos accus. Il se roule et se stocke dans un étui de belle facture. Épais de 5 mm, il résiste à une température de 1 000 °C. Ça semble un peu gadget, mais c’est un produit qualitatif, pas si bête à l’usage.
STOCKER LES LIPO
Rien de neuf ici, sinon le conseil d’utiliser des mallettes antifeu dignes de ce nom. Elles sont lourdes, un peu onéreuses, c’est vrai, mais quasi indispensables. J’en ai trois pour ma part, où l’on trouve mes LiPo sous sachets chinois, petite précaution supplémentaire, surtout pratique pour regrouper l es accus par modèles. Un ami stocke ses LiPo dans une ancienne armoire pour transformateur électrique, laquelle ressemble en taille et en masse à un coffre-fort ! Certains utilisent d’anciennes boîtes de munitions, dont la protection antifeu me semble quand même aléatoire. Les mallettes, malgré leur poids, offrent l’avantage de servir à la fois pour le transport et pour le stockage.
Point important, ne pas stocker vos LiPo dans un espace totalement clos car, en cas d’incendie, il faut laisser la possibilité aux gaz de s’échapper ! C’est pour cela que les mallettes de stockage comportent un système d’évacuation des surpressions…
AU FEU !
Quand le feu est déclaré, il vaut mieux être bien préparé, car on n’a que quelques secondes pour réagir avant qu’il ne se propage. Et ça va très vite. La plus mauvaise idée est d’y mettre de l’eau. L’unique solution est de priver ce type de feu d’oxygène, pas de lui en apporter !
Vous trouverez sur certains sites Internet comme chez Hacker Motor, en recherchant « Extover », des granulés destinés précisément à étouffer les feux de LiPo. Disponibles en de nombreuses contenances, leur prix est peu élevé, c’est une bonne nouvelle. Le but est donc de noyer le foyer d’incendie (votre LiPo, donc) avec ces granulés. Cela sous-entend que le LiPo en feu se trouve déjà dans un récipient pour que les granules restent concentrés sur le foyer. On pourrait imaginer un vieux barbecue, avec les LiPo en charge en partie basse et les granules, dont le sac plastique va fondre, au-dessus sur le gril. Ou utiliser sur le principe une grille de four sur un récipient métallique.
J’ai pris contact avec un spécialiste des extincteurs pour lui demander son avis. D’après lui, il faudrait d’abord utiliser un extincteur à dioxyde de carbone (pour les feux électriques) et ensuite recouvrir l e LiPo des fameux granulés. Il m’a également donné une i nformation i ntéressante : d’après lui, la majeure partie des extincteurs à poudre du commerce est à éviter pour la raison suivante : la poudre qu’ils contiennent est non seulement très volatile, mais extrêmement corrosive. C’est-à-dire que tous les appareils électriques avoisinants, même vos prises et boîtes de raccordement, se trouvent comme s’ils avaient subi un bain dans l’eau de mer… Le conseil est donc de se fournir en extincteur chez un spécialiste, qui en assurera en même temps l’entretien annuel, mais surtout vous évitera ce genre de piège.
Enfin, une solution ultra-simple et plutôt économique, est d’installer un détecteur de fumée juste au-dessus de votre espace de charge, cela permettra de signaler rapidement un départ de feu et de vous permettre de réagir avant que l’incendie ne se propage.
POUR CONCLURE
Il est bien évident que la sécurité a un coût. Pour autant, votre responsabilité est engagée et la détention ainsi que le stockage de batteries lithium doivent se faire en prenant certaines précautions. Mieux vaut investir un peu que de risquer de payer toute sa vie une trop grande confiance en un matériel potentiellement très inflammable. En espérant, sinon vous avoir sensibilisé, au moins vous avoir apporté quelques solutions, dont on peut espérer – pour une fois – qu’elles ne serviront jamais.
Stocker ses accus en un lieu sécurisé, comme dans une mallette antifeu, fait partie des bonnes mesures de sécurité…