Montagnes

L’ARÊTE DU TRONCHEY

- Texte & photo : Jean Annequin

L’arête du Tronchey s'élance au-dessus du Val Ferret italien. Rarement parcourue, elle est pourtant magnifique. L'ambiance est unique. On y navigue en alternant des moments sur le fil de l'arête avec une vue plongeant sur le versant est, et d’autres moments entre les piliers de la face sud.

L’itinéraire est osé et engagé. Il a été ouvert en 1936 par Tita Gilberti et Élisée Croux. La décennie des années trente a vu les plus grandes réalisatio­ns du siècle : face nord de l’Eiger, face nord des Grandes Jorasses, pilier ouest de la Gugliermin­a, face nord de l’Ailefroide, face nord de l’Olan… On peut noter l’esprit fort des grimpeurs. Côté italien, on trouve surtout des amateurs (Gervasutti, Boccalatte, Chabot, Ratti, Vitale, Cassin, Comici…) qui ont soif de découvrir, parcourir les faces vierges, les arêtes les plus longues. L’arête du Tronchey en fait partie. Depuis, les décennies ont passé. Délaissée pendant de nombreuses années, l’arête du Tronchey est tombée dans l’oubli. À tel point qu’aucun chemin n’a été tracé pour aller au bivouac. Quand on regarde le livre d’or du petit bivouac Jacchia (3 258 m), on constate que seulement deux à trois cordées la parcourent chaque année. Dans l’itinéraire, on ne retrouve quasiment pas d’équipement. Seuls deux pitons (inutiles) récents ont été laissés dans la traversée sous la troisième tour. Tout commence à 1 653 mètres d’altitude, au coeur du Val Ferret. Pra-sec, trois petites maisons au pied de la face sud. Il ne reste plus que 1 650 mètres pour rejoindre le bivouac Jacchia. Pas de sentier, juste d’immenses pentes d’herbe à remonter avant de buter contre les contrefort­s de l’arête. Vers 2 400mètres, on se heurte à la barrière de rocher. Il faut trouver la vire qui permet de s’échapper sur la droite et de rejoindre le couloir-combe au dessus. La montée est longue, et la course se joue en partie dans cette première étape. Posé sur l’arête plate à cet endroit, le bivouac Jacchia surplombe toute la vallée et ouvre sur un panorama fantastiqu­e, du Cervin jusqu’au mont Pourri en Tarentaise. 1 h 30. C’est l’heure d’aller courir sur l’arête du Tronchey. Sans en faire le topo précis, voici les points important à noter :

Du bivouac

Il est plus facile de remonter les pentes d’éboulis versant Boccalatte avant de rejoindre l’arête. Ne pas hésiter à redescendr­e dans ces pentes quand on est sur l’arête. Cela évite de gravir tôt le matin des pinacles souvent très compacts et techniques.

« Traversée bavaroise »

Cette appellatio­n du topo Vallot reste un mystère d’appellatio­n pour ce terrain. En jargon de rochassier, la Traversée bavaroise est une traversée à la corde. Le grimpeur en tête penché en avant et maintenu en traction par son compagnon peut prendre le temps de chercher des prises ou de progresser grâce à la tension de la corde. Sur l’arête du Tronchey, pas besoin de ces singeries, une toute petite vire permet de se glisser sous la première tour. Les longueurs sous la dernière tour ne sont pas à négliger. Un beau dièdre de 40mètres donne accès à la fameuse vire sous la tour qui permet de rejoindre la brèche entre la deuxième et troisième tour.

La variante Terray

C’est la solution la plus esthétique pour sortir au sommet mais nettement plus dure. L’autre option consiste à contourner par une grande traversée versant est et rejoindre la sortie de la voie Gervasutti en face est. Cette traversée peut être rendue délicate si la neige est présente. Au bout de la traversée, on emprunte alors des pentes faciles mais exposées qui ramènent à l’arête. Attention aux chutes de pierres.

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