Montagnes

TRAVERSÉE DES GRANDES ROUSSES

Du pic Bayle à l’Étendard, ce n’est pas un boulevard. Les bousculade­s sont en effet rares sur ces arêtes, effilées parfois comme de mauvais rasoirs. Pourtant c’est une course sympathiqu­e, un pur produit Oisans : pas de difficulté technique mais pied monta

- Texte : Nathalie Cuche, Photos : Éric Béallet.

Des cordées de renom ont fait le détour sur ce petit massif en enfilade orienté du sud au nord. William Auguste Coolidge et son ami Christian Almer, grands défricheur­s de l’Oisans, effectuaie­nt la première traversée le 12 septembre 1887. George Livanos, le célèbre grimpeur, des calanques faillit perdre la vie sur un mauvais rappel audessus des Quirlies et n’oublia jamais ces arêtes sauvages. Sa mésaventur­e figure dans les premières pages de son célèbre récit Au-delà de la verticale. L’histoire des Grandes Rousses commence véritablem­ent à Oz, en Oisans, sous la houlette… d’un abbé. En 1870, l’abbé Joseph Bayle, originaire du Trièves est nommé à Oz. Ce féru d’alpinisme écume bientôt la plupart des sommets alentour et constitue à Oz un véritable centre de l’alpinisme. Il fréquente les meilleurs alpinistes du moment et participe même à la formation des guides. Il passait, selon ceux qui l’ont connu, plus de temps dans les montagnes voisines que dans sa cure ! Il a fallu la conquête de la Meije par Gaspard, en 1877, pour que tous les regards se tournent vers la Bérarde, nouvel eldorado des alpinistes qui rêvaient d’en découdre avec « la grande difficile ». Enthousias­te, passionné, notre abbé n’a pas été avare du récit de ses ascensions des sommets des Grandes Rousses, qu’il partage dans l’Annuaire de la Société des touristes dauphinois. Il décrit un univers de glaciers ventripote­nts disparus aujourd’hui à cette altitude. Il franchit, raconte-t-il à grand-peine, après le glacier de Sarenne, le pic Blanc (aujourd’hui coiffé d’une télécabine arrivant de la station de l’Alpe d’Huez). « L’arête du glacier que je traversais est revêtu d’une corniche de séracs […] la pente était forte et le soleil du matin ayant détrempé la neige, j’eus beaucoup de peine à arriver sur le plateau du pic Blanc. » Il continue plus loin en évoquant les séracs magnifique­s du grand Sablat. « Je gravis le pic : il était onze heures. Ce pic tout entier est recouvert par le glacier au nord, à l’est et au sud-est. » Ce pic, qui porte aujourd’hui le nom de notre abbé, est le point de départ officiel de la traversée des Grandes Rousses, qui s’effectue plutôt du sud au nord. En été, la télécabine du pic Blanc permet d’accéder au départ du glacier du Grand Sablat. Il se traverse aisément en longeant l’arête ouest. Les plus courageux pourront comme Joseph Bayle partir d’Oz, mais quelle bavante ! L’ascension du pic Bayle ne pose guère de

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