CHIER (PROPREMENT) DANS LES BOIS
Le sujet peut paraître puéril, provocateur, indiscret, gênant, mais qui pose ses pieds sur les sentiers des Alpes et d’ailleurs sait bien que l’art et la manière de soulager ses intestins en pleine nature est un acte peu ou prou inévitable. L’accomplissem
Citons en préambule un petit livre paru il y a déjà quelques années et traitant du sujet, avec un humour mêlé de pragmatisme, d’une manière quasi exhaustive : l’excellent Comment chier dans les bois, pour une approche environnementale d’un art perdu de l’auteure américaine Kathleen Meyer et traduit en 2002 par Jean-Marc Porte, journaliste à Trek Magazine. On peut en recommander la lecture en complément de cet article.
Quelle que soit l’activité pratiquée, l’absence de toilettes est commune. En de rares endroits on trouve quelques toilettes sèches sur des parkings ou au pied de falaises mais c’est plutôt exceptionnel et c’est dommage. Ce qui est encore plus dommage, c’est de constater à vau-l’eau, que le visiteur laisse en général ses excréments bien visibles, signalés d’une volumineuse chiffonnade de papier bien épais et résistant à l’eau, le tout parfois abrité d’une petite pierre...
Voyons donc comment se passer de W.-C. ad hoc et surtout comment minimiser les traces laissées, en clair : Merci de laisser les lieux aussi propres que vous auriez aimé les trouver en entrant.
CHOISIR SON ENDROIT
Évidemment pas en plein milieu d’un chemin ou d’une clairière ! Mais si se placer à l’abri des regards est un confort personnel, il ne faut pas pour autant oublier quelques points importants : Évitez de choisir un lieu entièrement abrité des intempéries, sous un surplomb ou dans une grotte. Évitez également un sol dur ou rocheux. Le lieu de votre abandon devra aussi être à bonne distance de tout cours d’eau et des pentes le dominant directement. Un champ d’herbe est destiné à être fauché, ce n’est donc pas non plus un lieu adéquat. Un agriculteur de mon village me confiait récemment son désarroi quand, lorsqu’il coupe les foins, il doit sans cesse débarrasser la barre de coupe des excréments et du papier W.-C. que des grimpeurs posent dans son champ placé à proximité du sentier d’accès à la falaise ! Le lieu convenable est un sol meuble, à
l’écart des passages et visiblement non utilisé pour un quelconque usage agricole ou autre.
PRÉPARER LE RECUEILLEMENT DE VOTRE OFFRANDE
Le choix d’un endroit où le sol est meuble permet d’enterrer les excréments. Les chiens le font... Le principe est simple et facile. Pour ce faire on peut emporter une petite pelle comme celle qu’utilisent les jardiniers pour repiquer des salades ou d’autres plans. C’est une sorte de petite truelle courbée, on en trouve de très légères en plastique dur, très efficaces. À l’aide de cet outil – ce peut être aussi une petite pioche comme celle qu’avaient placée les équipeurs de la falaise de Claret à disposition des grimpeurs, les alpinistes pourront utiliser un piolet –, faire un trou d’une vingtaine de centimètres de profondeur. Ensuite la devise est simple : chier dur ou chier mou mais chier dans le trou (une devise de ma grand-mère) puis refermer le trou sans y laisser votre papier !
LE P.Q. ÇA NE DISPARAÎT PAS
Au mieux la dégradation est très lente. Pire encore est celle des mouchoirs en papier, quant aux lingettes imprégnées, elles sont faites d’une matière synthétique absolument non dégradable. Même enterré le papier revient toujours à l’air libre. Mes amis bédouins du Wadi Rum en Jordanie ironisent souvent sur la manière d’opérer des Occidentaux et des quantités
MERCI DE LAISSER LES LIEUX AUSSI PROPRES QUE VOUS AURIEZ AIMÉ LES TROUVER EN ENTRANT.
de papier qu’ils abandonnent dans le désert. Là-bas, dans le sable, inutile de compter sur une dégradation naturelle, des années plus tard c’est encore là. Brûler le papier n’est pas une meilleure solution, la combustion est incomplète et l’on retrouve partout des morceaux de papier.
Il n’y a que deux solutions possibles : remporter son papier ou utiliser la main gauche et de l’eau ! Les Bédouins usent de la seconde et n’ont pas tort. Vis-à-vis de la première solution, un seul comportement est viable : remporter son papier. Pour cela, rien de plus simple, avoir un sachet du type "Ziploc" dans lequel on place le papier utilisé jusqu’à la prochaine poubelle. Quelle que soit la région, ne tentez pas de brûler votre papier souillé pour échapper à son transport, c’est inefficace et, de plus, un incendie de forêt est un risque permanent et réel !
Conclusion : en toutes circonstances remporter au moins son papier W.-C. !
EN PAROI
Les grimpeurs de big wall tirent tout au long de leur ascension un sac de hissage avec en dessous de celui-ci un récipient répondant au joli nom de shit box ou encore poop tube. On l’aura compris, en ces lieux verticaux, les grimpeurs emportent leur W.C. même si subsistent quelques hauts lieux fétides comme le camp VI dans la voie du Nose sur El Capitan dans la vallée du Yosemite, passant pour être le W.-C. le plus vertigineux du monde. Lors de cette ascension du Nose, nous avions utilisé un bidon étanche comme ceux qu’emportent sous terre les spéléos pour moult usages. Ce système est bien plus pratique, on insère un sac poubelle principal dans lequel sont placés les sacs plastique à usage unique soigneusement refermés. La large ouverture du bidon présente un avantage qu’il est inutile de décrire. Ailleurs, pour d’autres ascensions d’une durée plus courte, une simple combinaison de sacs poubelle résistants sera bien suffisante pour épargner les suivants d’une offrande nauséabonde entre les pieds.
LE KIT PARFAIT
Randonneur, grimpeur, alpiniste, le besoin nous est commun. Voici donc quelques éléments matériels pour être à l’aise et laisser propres les lieux que nous aimons : - une petite pelle ou truelle de jardinier légère ; - un sachet plastique pour congélation avec fermeture "Ziploc" de taille mo y e n n e dans lequel on placera le papier usagé ; - un petit sachet plastique avec votre – petite – réserve de papier. Voilà, c’est tout et c’est suffisant. Plus d’excuses pour ponctuer la nature d’étrons emballés de blanc ou de rose.
ET AILLEURS COMMENT FONT-ILS ?
Les Américains sont assez intransigeants sur ce thème. Signalons au passage que les propriétaires de gentils toutous sont sommés de remporter les productions de leur animal dans un petit plastique que l’on trouve à peu près partout dans des distributeurs.
Au départ des sentiers, dans les parkings d’Indian Creek ou de Red Rocks – entre autres – l’association Leave no trace met à disposition des kits contenant un sachet plastique en plusieurs épaisseurs avec dedans un activateur bactériologique permettant de recueillir son caca afin de ne pas l’abandonner dans la nature et de le transporter sans odeur. Ce petit kit est vendu aussi pour le camping sauvage et bien d’autres situations. Cela fonctionne parfaitement.
Voici le lien vers le site du fabricant et distributeur : http://bit.ly/2pC15jh
Voilà, chers amis des falaises, montagnes ou sentiers, nous espérons que ce petit intermède un poil scatologique ne vous aura pas trop offusqués. Bien sûr nous savons que vous êtes, chers lecteurs, irréprochables sur le sujet et d’ailleurs, toutes les mauvaises surprises évoquées ne sont que de purs cauchemars jamais vécus...