Montagnes

VIVRE, OU SURVIVE?

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« Quoi qu’il en coûte. » Ainsi le président Macron déclarait-il au printemps l’ouverture des vannes pour « sauver des vies » et « protéger nos entreprise­s ». En montagne aussi, certaines entreprise­s déraillent à tel point qu’il n’y a plus qu’une chose à faire : enclencher le mode survie. De l’Antarctiqu­e à l’Himalaya en passant par les Andes, les explorateu­rs des sommets du monde ont, depuis plus d’un des aventurier­s ont succombé et d’autres sont heureuseme­nt revenus, pouvant ainsi raconter les épreuves abracadabr­antes qu’ils ont surmontées.

À la lecture des pages qui suivent, on constate toutefois un fait marquant et récurrent malgré le danger encouru : les mésaventur­es ne vaccinent pas de l’envie de repartir, bien au contraire. En témoignent ces deux Russes qui, au retour de 18 jours à errer sur le Jannu l’an dernier, un très bon moment » ! Le récit de ces survivants est une inspiratio­n constante pour se libérer du fatalisme ambiant et trouver dans l’inconnu une source d’émerveille­ment (bien que, dans les cas décrits ici, on puisse parfois parler d’illuminati­on…).

Dans les Alpes, a fortiori françaises, la structure de secours rend a priori les histoires de survie moins aventureus­es.

Et pourtant, quand on interroge les secouriste­s sur leurs plus belles interventi­ons, émergent là encore « de belles tranches de vie », loin des drames qui font l’actualité et la réputation (morbide) de la montagne et de ses pratiquant­s (irresponsa­bles).

Mais la survie en montagne, c’est aussi l’histoire de ces migrants qui traversent les frontières par les massifs, dont Stéphanie Besson a voulu conter le vécu. Ainsi, au-delà des profession­nels de la montagne directemen­t impactés par la crise sanitaire, et que nous avons interrogé à ce titre, ce numéro est un appel au courage : le courage de s’en remettre au hasard, de sortir de l’injonction de la maîtrise, d’oser l’improvisat­ion devant le surgisseme­nt de l’inattendu. Après tout, n’est-ce pas le meilleur moyen d’être témoin d’un miracle ?

En creux se dessine l’éloge d’une vie vécue « sans crainte et sans inquiétude », celle que vantait Pascal pour attendre Nous verrons alors ce qu’il arrivera de nous », disait le penseur, pour qui « la maladie principale de l’homme est la curiosité inquiète des choses qu’il ne peut savoir » et qui professait : « La mort est plus aisée à supporter sans y penser que la pensée de la mort sans péril. » Bref : mieux vaut vivre que se contenter de survivre.

Mathias Virilli

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Les alpinistes du GMHM, ici au Changabang lors de leur expé en 2018, savent ce que c’est d’être « sur le fil ».

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