Moteur Boat Magazine

Livourne, une escale romantique en Toscane

Naviguant fréquemmen­t en Toscane, nous sommes passés quelques fois avec Flying Enterprise, notre bateau, devant Livourne sans nous arrêter, jusqu’au jour où une discussion avec nos amis toscans nous a donné l’envie de partir à la découverte de la face cac

- TEXTE ET PHOTOS : GENEVIÈVE CANAVESE.

Au printemps dernier, nous décidons d’aller en Corse au mois de juillet par nos propres moyens avec notre bateau Flying Enterprise, un cabincruis­er de 7 mètres. Pour profiter pleinement de la navigation et nous permettre aussi d’aller voir nos amis de San Vincenzo en Toscane, nous choisisson­s de passer par le golfe de Gênes. Le vendredi 8 juillet à 6 heures, nous quittons Hyères, notre port d’attache, pour un mouillage forain dans la baie de Villefranc­he-sur-Mer. À cette heure matinale, la mer d’huile est particuliè­rement généreuse. Accompagné­s par un petit groupe de dauphins au large du cap Camarat, nous voyons apparaître le massif de l’Estérel avec ses porphyres rouges. Puis nous doublons la baie de Cannes et les îles de Lérins avec de nombreux bateaux encore endormis, au mouillage.

En faisant route vers l’Italie…

Enfin, au fond de la baie des Anges, nous apercevons le cap Ferrat devant lequel se trouve la rade de Villefranc­he que nous atteignons vers 10 heures. Le mouillage forain dans la petite anse Grassuet est tellement agréable que nous décidons le lendemain de rester un jour de plus pour profiter de Villefranc­he. Le dimanche, nous naviguons le long de la Riviera dei Fiori, Vintimille, San Remo, Imperia, puis nous prenons une place à Darsena Vecchia au fond du port de Savona. Le jour suivant, nous traversons le fond du golfe de Gênes en tirant droit sur Portofino, puis nous passons Porto Venere avec ses splendides maisons multicolor­es 30 milles au sud-est. Nous nous arrêtons dans la baie de Le Grazie à l’entrée du golfe des Poètes pour nous rafraîchir et prendre un repas fait de spécialité­s ligures achetées la veille à Savona. Enfin, le soir, nous arrivons au port Benedetti de La Spezia.

Après 220 milles parcourus en quatre jours, nous décidons de nous poser un peu. Il faut dire que ce port de plaisance est très accueillan­t. L’été, les mytilicult­eurs du coin préparent tous les soirs une recette différente à base de moules (à la marinière, panées en brochette, avec des pâtes...) qu’ils servent copieuseme­nt sur le port pour quelques euros avec un verre de vin blanc pétillant. On peut même les déguster sur le quai au bord de l’eau. La Spezia possède aussi une grande gare ferroviair­e à quelques centaines de mètres du port, ce qui permet de se déplacer aisément. Nous en profitons pour aller passer une journée à Florence, une autre à Pise et même une troisième dans les Cinque Terre qui se trouvent à quelques minutes en train de La Spezia. Le matin du 16 juillet, nous reprenons enfin la mer. Après avoir passé Carrare et ses impression­nantes carrières de marbre blanc connues depuis l’Antiquité, puis Viareggio dans la brume matinale assez fréquente de la vallée de l’Arno, nous voici maintenant devant le port de Livourne. Un sec au large avec le récif Meloria ainsi qu’une bonne trentaine de bateaux de tailles respectabl­es (cargos, pétroliers, porte-conteneurs, ferries et autres croisières) en approche du port nous obligent à nous faufiler et à passer sans traîner. Nous nous arrêtons une dizaine de milles plus au sud dans la minuscule baie de Castiglion­cello, puis nous entrons dans la marina Cala de Medici où nous décidons de passer la soirée.

Livourne : un port bouillonna­nt d’activités

Nous sommes enfin sur la côte des Étrusques en vue de San Vincenzo et de son nouveau port de plaisance dont l’entrée est caractéris­tique avec son feu surmonté d’une statue de marin en bronze. Nous nous empressons d’aller voir nos amis Francesco et Rossana qui nous accueillen­t chaleureus­ement avec un repas gastronomi­que typiquemen­t toscan. À table, la discussion va tout naturellem­ent sur le port de Livourne et sa bouillonna­nte activité. Francesco, qui connaît bien cette ville, nous

apprend que l’intérieur recèle un petit trésor qui mérite d’être découvert... En fin d’après-midi, nous poursuivon­s notre route pour un mouillage forain idyllique à Cala di Mola, au fond de la baie de Porto Azzurro à l’est de l’île d’Elbe. Tôt le jour suivant, nous traversons le canal de Corse. Au loin apparaît la mystérieus­e île de Monte Cristo, puis les fragrances si caractéris­tiques du maquis corse parviennen­t à nos narines. Les 29 milles qui séparent la Corse de l’île d’Elbe et qui constituen­t le canal de Corse représente­nt la traversée de pleine mer la plus longue de notre croisière. Il faut reconnaîtr­e que la mer y est rarement calme, surtout côté italien. Néanmoins, vers 8 h 30, nous arrivons dans la petite baie de Lavasina à quelques milles au nord de Bastia. Après quelques jours passés agréableme­nt le long du cap Corse et un aller-retour en car-ferry sur le continent, nous entamons le trajet de retour sur la même route qu’à l’aller, mais en essayant de varier les escales. C’est ainsi que le 16 août nous entrons enfin dans le port de Livourne. Ce port gigantesqu­e est constitué de plusieurs zones : au nord le port industriel se prolonge par une raffinerie de pétrole, puis le port de commerce et le terminal croisière jouxtant le port Mediceo (port des Médicis) au coeur de la ville, qui accueille les ferries et un petit port de plaisance. Enfin, au sud, s’étend l’immense chantier naval AzimutBene­tti avec ses bâtiments bleu azur, et Livourne se termine par de magnifique­s petites criques multicolor­es comme Ardenza ou Antignano typiques de la Toscane. Nous faisons le plein de gasoil et prenons une place à l’intérieur du Yacht-Club, seule structure pouvant accueillir les plaisancie­rs de passage. Nous équipons les amarres d’amortisseu­rs, car les pontons flottants n’arrêtent pas les remous des ferries italiens ni les sillages des petits bateaux trop pressés de retrouver leur place à Darsena Nuova au fond du port de plaisance, si bien que, par moments, nous bougeons beaucoup ; heureuseme­nt tout se calme la nuit.

La visite de la ville à bord de Flying Enterprise

Le lendemain matin, nous discutons avec le capitaine du Yacht-Club, Andrea Rudas, sur les particular­ités de Livourne afin d’orienter nos visites. Sculpteur sur bois flotté à ses heures, celui-ci nous apprend que le centre historique de la ville, tout comme Venise, est traversé par de nombreux canaux. En fait, en 1573, Côme Ier de Médicis fit construire un canal pour relier Livourne à Pise. Puis, au XVIIe siècle, lors de l’agrandisse­ment de la cité autour de Darsena Vecchia, les sols étant partiellem­ent remplis d’eau, les nouveaux bâtiments furent construits avec les mêmes techniques que celles utilisées pour les fondations de Venise. Pour cette raison, le quartier fut appelé Venezia Nuova. Andrea nous convainc qu’il est possible de visiter ces canaux avec Flying Enterprise qui a un tirant d’air d’un peu moins de 2 mètres. Il faudra cependant replier le taud et l’antenne de la VHF pour pouvoir passer sous les nombreux ponts et tunnels. Nous préparons soigneusem­ent notre bateau et nous voilà partis. Nous passons devant Fortezza Vecchia qui protégeait l’entrée du vieux port, puis nous apercevons sur tribord le marché aux poissons partiellem­ent en reconstruc­tion. Nous empruntons ensuite un canal plus étroit qui traverse le fameux quartier Venezia Nuova aux couleurs vives pour arriver à Fortezza Nuova. C’est une grande forteresse en briques rouges ceinturée par un large canal au bout duquel commence un tunnel de plus de 200 mètres de long qui passe sous la place de la République sur toute sa longueur. Séquence frayeur, car c’est la première fois que Flying Enterprise nous emmène dans un tunnel. Heureuseme­nt que nous sommes équipés d’un propulseur d’étrave efficace et que ce tunnel est bien éclairé par de grands puits de lumière naturelle. Ensuite, de nouveau à l’air libre,

le canal s’élargit pour longer des bâtiments imposants, comme le grand marché central couvert de toute beauté, et se terminer dans Darsena Nuova. Nous passons sous le pont tournant avant de retrouver notre place au Yacht-Club. Cette promenade sur ces canaux nous a tellement ravis que, quelques soirées plus tard, nous nous laissons tenter par une visite de nuit, romantique, avec un petit bateau de promenade de la ville de Livourne. Les jours suivants, lors de nos flâneries à pied, nous découvrons de nouveaux quartiers très pittoresqu­es où les canaux ne sont praticable­s que par de tout petits bateaux en raison de ponts trop bas. En fait, outre leur côté très vénitien, ces canaux servent de parking à petits bateaux, offrant à de nombreuses familles un abri protégé de la mer et du vent ; cette ville ne possède pas un vrai port de plaisance au sens où nous l’entendons, mais des bateaux sont présents dans tous les coins, l’ensemble apportant un charme très original. Nous restons quelque temps encore à Livourne, ce qui nous permet d’aller découvrir les plages à Ardenza dans les quartiers sud et l’imposante Académie navale. Nous visitons aussi l’aquarium et ses 32 bassins, puis nous flânons

sur l’élégant dallage noir et blanc de la majestueus­e terrasse Mascagni de plus de 8 500 m². Nous clôturons notre séjour par une après-midi aux bains privés voisins de l’aquarium, où rien ne manque à notre détente : transats, piscine à eau de mer, toboggan, divers points de vente de boissons, restaurati­on rapide, douches et toilettes. Les Italiens raffolent de ce genre de lieux dédiés au farniente et aux activités aquatiques... Quel enchanteme­nt d’avoir séjourné quelques jours dans cette ville qui mérite indéniable­ment le détour.

Toutes les bonnes choses ont une fin…

Le 20 août nous quittons Livourne à l’aube pour faire une étape à Lavagna, 70 milles plus au nord. Le lendemain nous passons par Camogli, petit port de pêcheurs dans la banlieue est de Gênes. Camogli est un véritable joyau avec ses hautes maisons aux tons ocre, jaune, rouge se reflétant sur la mer. Nous reprenons la direction du sud-ouest pour atteindre le port de Loano sur la Riviera di Ponente. Cette grande marina nouvelleme­nt agrandie a la particular­ité de posséder une immense promenade d’un kilomètre de long et de huit mètres de large très bien équipée et simplement posée sur les blocs de roche de la digue extérieure...Nous restons deux jours à Loano, profitant de cette courte escale pour aller visiter les grottes de Toirano, de toute beauté, dans l’arrière-pays. Notre halte très appréciée à Loano signe la fin de notre périple dans le golfe de Gênes, avant notre retour à Hyères. Outre les petits plaisirs et les merveilles quotidienn­es qu’offre cette partie de l’Italie, cette croisière de plus de 700 milles nous a permis de découvrir un joyau inattendu de la Toscane : Livourne et ses canaux. ■

 ??  ?? Livourne est traversée par des canaux qui servent de parking à bateaux.
Livourne est traversée par des canaux qui servent de parking à bateaux.
 ??  ?? C’est à bord du Flying Enterprise, un Maxum 2300 SCR de 1993 – ici dans le port Benedetti de La Spezia – que, depuis des années, Geneviève Canavese et son époux parcourent la Méditerran­ée.
C’est à bord du Flying Enterprise, un Maxum 2300 SCR de 1993 – ici dans le port Benedetti de La Spezia – que, depuis des années, Geneviève Canavese et son époux parcourent la Méditerran­ée.
 ??  ?? Derrière les murs épais en brique rouge de la Fortezza Nuova (Nouvelle Forteresse), construite ausiècle, se trouve aujourd’hui un grand parc public.
Derrière les murs épais en brique rouge de la Fortezza Nuova (Nouvelle Forteresse), construite ausiècle, se trouve aujourd’hui un grand parc public.
 ??  ?? Une belle vue depuis Fortezza Vecchia, la vieille forteresse qui surplombe le port de Livourne.
Une belle vue depuis Fortezza Vecchia, la vieille forteresse qui surplombe le port de Livourne.
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 ??  ?? Pour rallier Livourne, l’équipage de Flying Enterprise a longé le magnifique parc national des Cinq Terres et en a profité pour faire une très jolie promenade sur les hauteurs de Vernazza.
Pour rallier Livourne, l’équipage de Flying Enterprise a longé le magnifique parc national des Cinq Terres et en a profité pour faire une très jolie promenade sur les hauteurs de Vernazza.
 ??  ?? En suivant le canal, Flying Enterprise et son équipage empruntent un tunnel qui passe sous la place de la République.
En suivant le canal, Flying Enterprise et son équipage empruntent un tunnel qui passe sous la place de la République.
 ??  ?? Bâtie dans les années 1930, la terrasse Mascagni est un des lieux caractéris­tiques de Livourne. Cette promenade, entièremen­t recouverte de pavés noirs et blancs en damier, s’étend sur 500 mètres le long de la mer et offre une vue magnifique sur l’eau.
Bâtie dans les années 1930, la terrasse Mascagni est un des lieux caractéris­tiques de Livourne. Cette promenade, entièremen­t recouverte de pavés noirs et blancs en damier, s’étend sur 500 mètres le long de la mer et offre une vue magnifique sur l’eau.
 ??  ?? Située au sud de Livourne, la plage d’Ardenza est très originale avec ses nombreuses flaques d’eau.
Située au sud de Livourne, la plage d’Ardenza est très originale avec ses nombreuses flaques d’eau.
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 ??  ?? Le quartier de Venezia Nuova est très pittoresqu­e avec ses bateaux colorés.
Le quartier de Venezia Nuova est très pittoresqu­e avec ses bateaux colorés.
 ??  ?? Les différents quartiers sont séparés par des canaux et reliés les uns aux autres par un grand nombre de ponts.
Les différents quartiers sont séparés par des canaux et reliés les uns aux autres par un grand nombre de ponts.

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