• Le golfe de Saint-Tropez en Merry Fisher 895
Saint-Tropez est à son golfe ce que la perle est à l’huître, une sorte de bijou dans un écrin fait d’eaux cristallines, de plages au sable fin, avec en arrière-plan des montagnes à la verdure éclatante. Mais pour que le charme opère, il faut privilégier l
Convoyer une Merry Fisher 895 de Cannes à Hyères ? Il est difficile de refuser ce genre de proposition, surtout lorsque le chantier Jeanneau laisse carte blanche au niveau du programme de navigation. C’est donc tout naturellement que nous avons opté pour le golfe de Saint-Tropez, avec à la clef une escale d’une nuit dans le port de la mythique cité varoise. Le choix est d’abord géographique, puisque la ville est située quasiment à mi-chemin entre Cannes, notre point de départ, et Hyères, où le bateau doit rejoindre la base du concessionnaire local. Couper la poire en deux permettait aussi de nous laisser assez de temps pour caboter une journée complète au sein de ce golfe aux eaux claires. La première étape de cette navigation s’est effectuée de Cannes à Saint-Tropez, de conserve avec une Leader 33 à bord de laquelle prendront place notre photographe et un confrère du magazine Neptune Yachting Moteur, qui profite également de ce convoyage pour tester deux jours durant ce cabin-cruiser monté en bimotorisation. Notre timonier est équipé de son côté d’une paire de Yamaha de 150 chevaux qui nous permet, une fois les pleins faits à la station de Mandelieu-La Napoule, de croiser vers les 20 noeuds. La mer est calme et la température de l’air frôle les 20 °C. Hormis un bref arrêt au pied des roches rouges du Dramont, prélude au massif de l’Esterel, nous ne traînons guère en route, l’objectif affiché étant de découvrir les attraits du golfe tout en profitant de cette météo clémente. De plus, il ne s’agit pas d’un essai, le bateau ayant déjà été testé en avant-première quelques mois plus tôt (voir MB n° 321). Nous poursuivons notre route en conservant un cap au sud-ouest, laissant Saint-Raphaël et son golfe à tribord. La pointe des Issambres est en vue et nous continuons à longer la côte, cette frange du littoral ne présentant pas de danger particulier pour peu que l’on évite de tutoyer les roches. Les abords de la plage de la Nartelle nous séduisent un instant pour jeter l’ancre le temps d’un déjeuner, mais nous préférons doubler la pointe des Sardinaux, qui marque réellement l’entrée dans le golfe de Saint-Tropez.
Un arrêt au pied du massif de l’Estérel
Notre trajet depuis Mandelieu-La Napoule aura duré environ une heure et demie, en tenant compte de notre arrêt aux roches rouges. En suivant le pourtour du golfe par sa partie nord, nous débouchons logiquement sur SainteMaxime. L’endroit est doté d’un port bien équipé, pompes à carburant, aire technique, shipchandlers proches, grue, etc. À proximité, la plage du centre-ville mêle espaces publics et privés. Un peu plus vers l’ouest, de longues bandes sableuses se succèdent jusqu’à la pointe Alègre où se dissimule un ravissant petit port privé à l’accès uniquement autorisé aux clients du complexe hôtelier attenant. Cet abri miniature fait partie d’un ensemble de villas et son entrée est marquée par un phare. L’endroit est clos partiellement par un pont en haut duquel des enfants plongent dans une eau à la température pourtant encore saisissante. Nous poursuivons notre route vers l’ouest, où se succèdent une douzaine de plages à la forme triangulaire due aux épis rocheux qui empêchent l’érosion. Les chenaux de l’entrée de Port-Grimaud, de Port-Cogolin et des Marines de Cogolin marquent la fin de cette rive nord. Nichées au fond du golfe, ces cités lacustres sont séparées par la rivière Giscle, désormais canalisée. Au-delà des shipchandlers, chantiers et stations d’avitaillement en carburant, louvoyer dans les canaux est un enchantement pour les yeux. Avec ses maisons au pied dans l’eau et leurs pontons terrasses, le décor a des airs de Venise à la sauce provençale. La lumière décline lentement. Comme nous souhaitons profiter du golfe, nous mettons cap à l’est, vers SaintTropez que nous doublons finalement pour chercher le calme de la baie des Canebiers. En ce mois d’avril ensoleillé, toutefois, la cohue de l’été n’est pas encore au programme. S’il est un travers de ce golfe, c’est sa fréquentation estivale, avec un trafic tel qu’il n’est pas rare de voir la mer se lever, en dépit de conditions météorologiques clémentes.
Pour l’heure, l’anse des Canebiers est presque déserte et nous nous approchons du rivage, en respectant toutefois les zones interdites à la navigation. Nous ne pouvons que conseiller à tous les plaisanciers de se munir d’un document qui figure dans la plupart des capitaineries du golfe et qui recense quatre zones sensibles où poussent les herbiers de posidonies.
Un guide pour savoir où mouiller dans le golfe
Ce guide des règles et bonnes pratiques du plaisancier est édité par le service Observatoire marin de la communauté de communes du golfe de Saint-Tropez. Il concerne un secteur qui court de Sainte-Maxime au nord-est pour s’achever au Rayol-Canadel au sud-ouest. Il présente également les endroits où il est possible de mouiller sans risquer d’abîmer la flore sous-marine. D’une manière générale, il vaut mieux privilégier les fonds sableux et respecter la vitesse de 5 noeuds dans les 300 mètres. En été, ces zones sont marquées par des bouées jaunes. La fin d’après-midi coïncide avec ce moment si caractéristique des rives de la Méditerranée, où le soleil décline pour plonger des pans entiers de montagnes dans l’obscurité, transformant le vert tendre des pins parasols en noir absolu. Nous décidons de rejoindre le port de Saint-Tropez, où deux places visiteurs nous sont attribuées, l’une pour la Merry Fisher 895, l’autre pour la Leader 33. Ce port se compose de deux bassins, le célèbre vieux port où mouillent les yachts, et le second, appelé bassin Jean-Lescudier. C’est sur la panne B de ce dernier que nous nous amarrons, cul à quai. Nous profiterons de la douceur de ce début de soirée pour prendre l’apéritif dans le cockpit, dont la banquette en L accueille cinq personnes sans aucun problème. Et, puisqu’il est un peu tôt pour goûter aux légendaires (ou épidermiques, c’est selon !) soirées tropéziennes, nous préférons nous contenter d’une pizza chez Bruno, dans la vieille ville. Puis, le matin, dans une autre institution, Sénéquier, nous prenons un frugal petitdéjeuner avant de remettre les moteurs en marche. Une autre navigation nous attend et consiste à rallier Saint-Tropez à Hyères. La météo n’est pas aussi clémente que la veille avec une petite houle courte levée par un vent d’est qui rend le passage des trois caps inconfortable (Camarat, Taillat et Lardier). Deux heures auront été nécessaires pour atteindre le port d’Hyères, à une allure qui a oscillé autour de 15 noeuds plutôt que de 20, vu l’état de la mer. Ce n’est qu’une fois la baie d’Hyères et le fort de Brégançon doublés que la mer retrouvera la placidité d’un lac. Après Saint-Tropez et son golfe, Hyères dévoile sa rade et d’autres atours. Mais ça, c’est une autre histoire… ■