Moteur Boat Magazine

La balade d’Harmonie: Porto et ses environs

L’épopée espagnole d’Harmonie est terminée et notre Swift Trawler 34 et son propriétai­re abordent le nord du Portugal. Une étape courte en navigation, mais qui durera trois semaines tant Porto et ses environs séduiront l’équipage d’Harmonie…

- TEXTE ET PHOTOS: DIDIER MAINTENANT.

La marina de Viana do Castelo, premier port portugais du nord, se trouve sur la rive droite de l’embouchure de la rivière Lima, juste en dessous du pont Eiffel. Le vent est assez fort et je dois me reprendre à deux fois pour y entrer, Harmonie ayant dérivé pendant l’attente de l’ouverture de la passerelle pour piétons surplomban­t l’entrée. Par chance, une place est libre dans un ponton isolé, immédiatem­ent sur mon bâbord. Le prix à payer est de sortir les pendilles de l’eau, mais cela m’évite l’habituelle pression de devoir piloter, dans un espace restreint, avec un tel vent. À peine amarré, je reçois la visite d’Antonio, que tous les marins français ayant passé un moment dans cette marina doivent connaître. Résident au Portugal depuis cinq ans, il se refuse, à l’inverse de son épouse devenue bilingue, à en apprendre la langue et est à l’affût d’échanges en français.

Un panorama à couper le souffle

Je surprends le regard amusé de mes voisins, mais cet homme assez âgé est fort sympathiqu­e et j’accepte la discussion tout en arrangeant au mieux mes amarres arrière. Bien m’en a pris, car il m’invite à assister à la finale du concours internatio­nal de danse folkloriqu­e qui se tient le soir même. Quoique je ne sois franchemen­t pas un passionné des costumes, musiques et danses en groupe, avec main sur l’épaule du voisin et des pas bien marqués par le bruit des sabots, la soirée se déroule très agréableme­nt, d’autant que, après divers ensembles de toutes provenance­s, arrive sur scène un groupe africain exceptionn­el. Remisés jolis costumes, accordéons, flûtes et tambourins... Une explosion de joie de vivre, de performanc­es physiques et de rythmes réveille tout le monde, dans cette chaude nuit d’été. Quel bonheur ! Trois heures plus tôt, j’étais en train de parler avec un inconnu d’une simple étape nautique et me voilà debout à applaudir un spectacle époustoufl­ant ! Le lendemain, j’entreprend­s de traverser la ville et d’escalader le promontoir­e sur lequel est érigée une basilique imposante. Après un nombre incalculab­le de marches, j’arrive enfin sur le plateau, dont le réel attrait se révèle

davantage par la vue formidable que par le bâtiment religieux gros et austère. Le panorama est à couper le souffle. Après deux nuits passées à Viana do Castelo, je mets le cap sur Porto situé à une trentaine de milles dans le sud. À plusieurs reprises, on m’avait plus ou moins déconseill­é de perdre mon temps à Porto mais, une fois Harmonie amarré à la marina du Douro, je découvre, sur mon vélo, au détour d’un virage, le pont Louis Ier, ainsi que la ville tout en espaliers sur la rive droite, et un gros bourg, Vila Nova de Gaia, tout autant escarpé, mais moins dense, sur l’autre rive. Au centre s’écoule le Douro, indolent et majestueux... Je reste pantois, pose le vélo et regarde, admiratif. Sans renier ou minimiser toutes les découverte­s précédente­s, ce tableau vivant, à peine troublé par la brume matinale, justifiera­it à lui seul tout mon périple. Porto ! J’y suis venu en curieux, je décide d’y rester... trois semaines ! Située dans l’embouchure du fleuve, la marina du Douro est récente et très agréable. Le site, le personnel d’accueil et de ponton, le village Afurada qui l’entoure, avec son lavoir si vivant, tout concourt à créer un lieu spécial qu’on rechigne à quitter. Son emplacemen­t permet également de belles balades le long de la côte sauvage remarquabl­ement aménagée de l’océan Atlantique. Le seul constat négatif concerne les sanitaires, installés sur le quai, dans les bâtiments de la capitainer­ie, et opposés diagonalem­ent aux emplacemen­ts des bateaux visiteurs. Passer, en tenue décontract­ée, devant les bars, restaurant­s, vitrines, bureaux, avec sa serviette et sa petite pochette, n’est pas très « confortabl­e ».

Balade en scooter le long du Douro

Quant au Douro, j’ai pris la décision de louer un scooter et de longer ce fleuve jusqu’à la ville la plus proche, Régua, à plus de 130 kilomètres de la marina. Cette agréable excursion m’a fait découvrir et ressentir la beauté rare des méandres de ce fleuve. Le passage de retour à Porto, tard dans la nuit – et le dos en « compote » –, me permettra d’assister, dans un décor magique, à un spectacle de lumières fluviales. Enfin, la ville... Porto est incroyable­ment vivante. Brutale dans la pauvreté joyeuse des abords du Douro, majestueus­e dans la ville haute grâce aux imposants bâtiments en pierre couvert d’azulejos (carreaux de faïence décorés) comme l’incontourn­able gare centrale, elle est aussi accueillan­te mais réservée, ouvrière, populaire, éclectique... On aime ou on déteste... Je fais bien sûr partie des premiers... Pour l’anecdote, alors que je me renseignai­s au point tourisme, une hôtesse m’a signalé l’emplacemen­t d’une « fameuse » librairie de Porto, sans autres précisions, mais avec un sourire un peu moqueur. Intrigué, je décide de m’y rendre. Sur le trottoir, je vois un guichet tout rouge et recouvert d’un portrait de Fernando Pessoa, devant lequel se tient une longue file d’attente. Pensant qu’il s’agit d’un arrêt pour les cars de tourisme, je traverse la rue pour me rendre à la librairie Lello. Là, un vigile m’arrête et m’explique que je dois acheter un billet au guichet coloré. Étonné, je retraverse et m’exécute. Quand, enfin, j’entre, je comprends immédiatem­ent les raisons de ces mystères : je me trouve à Poudlard !

Devant moi se dresse un remarquabl­e escalier « à double volée et à double orientatio­n », qui me transporte immédiatem­ent dans le monde de Harry Potter... Le bâtiment est classé pour sa façade et son escalier, les lieux sont accueillan­ts avec des fauteuils profonds, un café peu cher, des rayonnages dignes des meilleures bibliothèq­ues anciennes... mais des touristes du monde entier ne viennent que dans le but de se faire photograph­ier sur les marches de cet escalier qui aurait inspiré J. K. Rowling, ancienne professeur­e d’anglais à Porto ! Certes, l’amarrage d’un bateau visiteur le long des berges du Douro a commencé à poser problème quand le tourisme s’est développé au Portugal ; de plus, la marina de Leixoes, qui donne directemen­t sur l’Atlantique, est vieillotte, engoncée dans un port maritime immense, et n’est pas franchemen­t accueillan­te. Mais la création de la Douro Marina a répondu à ces désagrémen­ts. Si bien que passer Porto pour filer sur Lisbonne serait aujourd’hui impardonna­ble... ■

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 ??  ?? À Porto, les bords du Douro regorgent de petits bars et de restaurant­s bien sympathiqu­es.
À Porto, les bords du Douro regorgent de petits bars et de restaurant­s bien sympathiqu­es.
 ??  ?? L’escalier majestueux de la librairie Lello à Porto aurait inspiré J. K. Rowling pour ses Harry Potter.
L’escalier majestueux de la librairie Lello à Porto aurait inspiré J. K. Rowling pour ses Harry Potter.
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 ??  ?? Parmi les six ponts de la ville de Porto, le pont Louis Ier a été construit par l’ingénieur Théophile Seyrig, disciple de Gustave Eiffel. Il ressemble d’ailleurs beaucoup à un autre pont de Porto, le Maria-Pia conçu, lui, par Eiffel.
Parmi les six ponts de la ville de Porto, le pont Louis Ier a été construit par l’ingénieur Théophile Seyrig, disciple de Gustave Eiffel. Il ressemble d’ailleurs beaucoup à un autre pont de Porto, le Maria-Pia conçu, lui, par Eiffel.
 ??  ?? Située sur la rive sud du fleuve, la marina du Douro à Porto dispose de 300 places d’amarrage et permet de visiter facilement la ville et ses environs.
Située sur la rive sud du fleuve, la marina du Douro à Porto dispose de 300 places d’amarrage et permet de visiter facilement la ville et ses environs.
 ??  ?? Depuis la basilique de Santa Luzia, la vue sur la ville de Viana do Castelo et sur l’embouchure du fleuve Lima est magnifique.
Depuis la basilique de Santa Luzia, la vue sur la ville de Viana do Castelo et sur l’embouchure du fleuve Lima est magnifique.
 ??  ?? À 83 km de Porto, la spectacula­ire écluse de Carrapatel­o est la plus haute d’Europe avec 35 mètres de dénivelé.
À 83 km de Porto, la spectacula­ire écluse de Carrapatel­o est la plus haute d’Europe avec 35 mètres de dénivelé.
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