Moteur Boat Magazine

Balade Martiniqua­ise

À l’occasion du 8e Rendez-Vous de propriétai­res de Fountaine Pajot, nous avons eu l’occasion de naviguer pendant deux jours en Martinique. Une balade magnifique et très dépaysante !

- T E X T E : S T É P H A N I E D E L O U S TA L . P H O T O S : V I R G I N I E P E L A G A L L I .

Pour son 8e Rendez-Vous de propriétai­res, le chantier Fountaine Pajot, spécialist­e du catamaran à voile et à moteur, avait choisi la Martinique, une destinatio­n que le constructe­ur rochelais connaît bien puisqu’il y avait déjà jeté son dévolu il y a douze ans pour y fêter ses 30 ans. Ouvert à tous les propriétai­res de bateaux de la marque, cet événement qui s’est tenu du 17 au 20 mai dernier a rassemblé une centaine de personnes venues des quatre coins du globe (France, Russie, États-Unis, Angleterre, Amérique du Sud…) et réparties sur une vingtaine de bateaux, essentiell­ement des voiliers. Certains qui naviguent aux Antilles sont venus avec leur propre unité, d’autres, désireux de profiter de ces trois jours festifs et sympathiqu­es, ont loué un catamaran Fountaine Pajot au leader mondial de la location, la société Dream Yacht Charter qui dispose d’une flotte de 1 026 bateaux sur 47 destinatio­ns à travers le monde. La base du Marin en Martinique bénéficie de plus de quatreving­ts voiliers. Actuelleme­nt, Dream Yacht Charter ne possède qu’une dizaine de catamarans à moteur dans sa flotte globale, dont quatre Motor Yacht 37. Un de ces quatre MY 37 venait justement d’être livré à la base de Tortola aux îles Vierges et avait été convoyé jusqu’en Martinique pour nous permettre de participer à ce rendez-vous pourtant majoritair­ement « voileux ». C’est donc au départ de la marina du Marin, le plus grand port de plaisance de la Martinique, que nous avons embarqué à bord d’un MY 37 flambant neuf, pour deux jours de balade au rythme de la biguine et du ti-punch. Unique bateau à moteur de ce rassemblem­ent, notre MY 37 était équipé de sa plus petite motorisati­on, soit 2 x 110 chevaux Volvo D3, avec lesquels il atteint 13 noeuds en pointe et 9 à 10 noeuds en croisière, de quoi se mêler discrèteme­nt à cette flotte de voiliers… Alors que la vingtaine de catamarans à voile se livrait à des régates endiablées, nous avons décidé

de partir à la découverte de quelques mouillages alentour. La sortie du Cul-de-Sac du Marin ne se fait pas à la légère, car le plan d’eau est très mal pavé, entre les bancs de sable et les hauts-fonds, sans oublier que le balisage est inversé par rapport à l’Europe ; en sortant, les bouées rouges sont donc à laisser à bâbord et les bouées vertes à tribord. Une fois les dernières marques de chenal passées, au niveau de la pointe Borgnesse, nous décidons de mettre le cap au 280° vers l’anse de Marigot du Diamant, située à 9 milles dans le nord-est. La navigation en soi ne présente aucune difficulté et nous mettons une heure pour rallier cette ravissante petite anse. Au cours de cette heure de mer, nous aurons l’occasion de découvrir l’étendue du problème que représente l’invasion massive des algues sargasses. Des bancs entiers jalonnent notre parcours et Matthieu, notre skippeur, nous explique qu’il est préférable de les éviter car, compte tenu de leur épaisseur, elles peuvent venir boucher le système de refroidiss­ement du moteur. Nous avions entendu parler depuis la Métropole de ce fléau qui touche les Antilles et met à mal l’économie et le tourisme local. Nous en prenons conscience ici.

Le fléau des algues sargasses

Pourtant, la côte ouest de la Martinique est mieux lotie que celle de l’est, où certaines plages sont fermées en raison du risque sanitaire, ces algues en séchant et en se décomposan­t créant une odeur nauséabond­e, mais aussi un gaz toxique. Sur la côte ouest, c’est surtout en pleine mer que les algues sont présentes et non près des plages. Nous nous rapprochon­s de l’anse Marigot dont l’accès, peu facile, n’est envisageab­le que par beau temps et de jour. Cette partie de la côte est jalonnée par un plateau de hauts-fonds qui nécessite de prendre bien au large et d’avoir un oeil sur le sondeur. Une fois la pointe du Marigot repérée, il faut faire un alignement au 27° avec le Morne Cabri, puis franchir la passe en arrondissa­nt bien la pointe. Il est possible de jeter l’ancre au centre de la baie où la profondeur varie entre 2 et 6 mètres. L’eau est très belle et quelques bateaux locaux sont au mouillage. Derrière la pointe Marigot se dessine le rocher du Diamant, distant de seulement 2 milles et vers lequel nous nous dirigeons pour retrouver la flotte de voiliers en régate vers les Anses d’Arlet. Cet îlot de forme conique et aux falaises abruptes s’est rendu célèbre au XIXe siècle lors des guerres franco-anglaises quand les Anglais, désireux de maîtriser la

Pajot La flotte Fountaine au mouillage d’Arlet… à Petite Anse

circulatio­n maritime, y installère­nt leurs canons. Durant dix-sept mois, les batteries anglaises pilonnèren­t les vaisseaux français en route vers Fort-de-France, à tel point qu’ils élevèrent le rocher du Diamant au titre de « Her Majesty’s Ship Diamond Rock » (Navire de sa Royale Majesté). En passant au ras de ce drôle de caillou inhospital­ier et haut de 175 mètres, on peut se demander comment les Anglais sont parvenus à monter leurs canons ! Aujourd’hui, le Diamant est une réserve ornitholog­ique et il est interdit d’y débarquer. En remontant vers le nord, cinq petits milles nous séparent des Anses d’Arlet, en particulie­r de la plus au sud, Petite Anse. Très reconnaiss­able avec son ponton en bois installé perpendicu­lairement à la grande plage de sable blanc et dans la continuité de l’église du bourg rouge au clocher pointu, ce mouillage est tout simplement magnifique. Il est conseillé de mouiller au sud du ponton sur des fonds sableux par deux à trois mètres de profondeur.

Les splendides Anses d’Arlet

Au nord se trouvent des récifs qu’il est possible d’explorer en plongée libre pour y voir des tortues. Le bourg est charmant avec ses maisons colorées et son front de mer aménagé. Mais Petite Anse n’est pas notre destinatio­n finale et, après un accueil sur la plage avec dégustatio­n d’acras, de rhum et démonstrat­ion de danses locales, nous quittons Petite Anse pour Grande Anse située à moins de 2 milles au nord, juste derrière les pointes Burgos et Lézarde. En ce mois de mai, nous subissons une alternance d’ondées tropicales et de belles éclaircies et, en fin de journée, alors que nous longeons la côte en veillant à ne pas prendre de bouts flottants ou de casiers, très nombreux sur notre parcours, la lumière est magnifique. Malgré notre surveillan­ce, nous n’échappons pas à un bout dans l’hélice que nous découvrons une fois au mouillage dans le nord de la baie. Plus qu’un bout, c’est un casier que nous avons attrapé, occupé par deux belles langoustes. Notre skippeur Matthieu le remet

à l’eau, en espérant que son propriétai­re le retrouvera. Grande Anse d’Arlet est un mouillage très agréable, niché au pied de la montagne. Au nord de la baie, le restaurant sur la plage Ti Sable nous accueille pour le dîner avec au menu… langoustes grillées. Le lendemain matin, le temps est gris et pluvieux, la visibilité très réduite et, sans la températur­e qui reste très agréable, on en oublierait presque que nous sommes sous les Tropiques. Il tombe des cordes quand nous partons vers Petite Anse pour assister et participer à une séance de pêche à la senne. Cette technique, très ancienne, consiste à attraper les poissons à la surface de l’eau en les encerclant à l’aide d’un filet de pêche appelé senne. Ce dernier est ensuite ramené sur la plage à la force des bras. Un « Ti décollage », petit-déjeuner traditionn­el à base de rhum et de morue, viendra clôturer cette séance de pêche typique.

Mer de face pour la route du retour

Il est temps ensuite de remettre le cap sur Le Marin où nous devons rendre le bateau en fin d’après-midi. À l’allure de 6 noeuds, abrités sous le taud de camping qui équipe le fly et nous protège des averses, nous suivons et encadrons la dernière régate à laquelle se livrent les voiliers Fountaine Pajot. Un petit vent lève un bon mètre de creux que nous prenons de face. Pour les voiliers, c’est parfait et la flotte s’est divisée en deux, d’un côté ceux qui ont décidé de prendre au large, de l’autre ceux qui préfèrent rester à la côte, quitte à tirer des bords. Nous mettrons environ trois heures pour ramener notre MY 37 à la marina du Marin. Ces deux jours à bord nous ont mis l’eau à la bouche et nous ont donné un aperçu des beautés de la bien nommée « Île aux Fleurs ». C’est sûr, nous y reviendron­s, mais plus longtemps… ■

 ??  ??
 ??  ?? Mouillage à l’anse Marigot avec, en fond, le fameux rocher du Diamant.
Mouillage à l’anse Marigot avec, en fond, le fameux rocher du Diamant.
 ??  ?? Au siècle, les Anglais parvinrent à installer des batteries de canons sur le rocher du Diamant, pourtant difficile d’accès.
Au siècle, les Anglais parvinrent à installer des batteries de canons sur le rocher du Diamant, pourtant difficile d’accès.
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ?? L’Habitation Clément est célèbre pour son rhum, mais aussi pour la beauté des lieux.
L’Habitation Clément est célèbre pour son rhum, mais aussi pour la beauté des lieux.
 ??  ??
 ??  ?? Arrivée en fin de journée à Grande Anse d’Arlet. Le ciel s’est dégagé après une belle averse.
Arrivée en fin de journée à Grande Anse d’Arlet. Le ciel s’est dégagé après une belle averse.
 ??  ??
 ??  ?? Les pêcheurs vendent directemen­t sur la plage le fruit de leur pêche.
Les pêcheurs vendent directemen­t sur la plage le fruit de leur pêche.
 ??  ?? La mer est jonchée de bancs d’algues assez épais dans lesquels il est préférable d’éviter de passer.
La mer est jonchée de bancs d’algues assez épais dans lesquels il est préférable d’éviter de passer.
 ??  ?? L’entrée du chenal permettant de rejoindre Le Marin est marqué par une bouée verte qu’il faut bien laisser à bâbord, le balisage étant inversé sous ces latitudes.
L’entrée du chenal permettant de rejoindre Le Marin est marqué par une bouée verte qu’il faut bien laisser à bâbord, le balisage étant inversé sous ces latitudes.
 ??  ?? Nous avons eu la chance de recevoir une séance d’initiation à la yole martiniqua­ise réputée pour ses « bois dressés ».
Nous avons eu la chance de recevoir une séance d’initiation à la yole martiniqua­ise réputée pour ses « bois dressés ».

Newspapers in French

Newspapers from France