Moteur Boat Magazine

Le comparatif des cartograph­ies du marché

- TEXTE ET PHOTOS : JEAN-YVES POIRIER.

Les cartes électroniq­ues font désormais partie du quotidien, sur terre comme sur mer. Mais sont-elles toutes identiques et comment les choisir ? Des questions auxquelles nous avons tenté de répondre en comparant les cartograph­ies Navionics, C-Map, Bluechart et Mapmedia…

En moins de deux décennies, la technologi­e numérique a bouleversé bon nombre de secteurs d’activité et la cartograph­ie électroniq­ue ne fait pas exception, puisqu’elle permet d’emporter dans sa poche la totalité des cartes du monde ! Fruit de milliers d’années d’évolution de la cartograph­ie, la carte papier fait de la résistance et reste à ce jour le domaine réservé du Service hydrograph­ique et océanograp­hique de la Marine (Shom), un organisme national chargé de relever, de mettre à jour et de publier tous les documents utiles à la navigation, les seuls à être officielle­ment reconnus par les autorités. Les autres cartes papier disponible­s sur le marché, de type Navicarte ou NV Charts, sont publiées par des éditeurs indépendan­ts qui compilent les données issues de différents instituts hydrograph­iques internatio­naux et les enrichisse­nt avec des données supplément­aires, comme des plans de détail des ports, par exemple.

Cartes officielle­s et documents privés

Le concept de carte électroniq­ue pour les navires (ENC, Electronic Navigation­al Chart) a été défini par l’Organisati­on maritime internatio­nale dès 1985, de même que les appareils liés à leur utilisatio­n (ECDIS, Electronic Chart Display & Informatio­n System). Couplés à un GPS, ils permettent d’afficher en temps réel la progressio­n du navire sur un fond de carte, dont le format internatio­nal reconnu est le S57, destiné par nature à la navigation profession­nelle. Pour les plaisancie­rs, l’offre est le fait d’acteurs privés, comme Navionics, C-Map ou Maptech, pionnier des cartes raster et depuis disparu du marché. Dès la fin des années 1980, ils ont signé des accords commerciau­x exclusifs avec les principaux fabricants d’électroniq­ue, comme Raymarine, Simrad, Lowrance, Humminbird ou Furuno, dont les traceurs de carte sont l’équivalent plaisance des ECDIS profession­nels. Garmin a fait figure d’exception, en décidant dès l’origine de rester indépendan­t et de se

doter en interne de son propre service cartograph­ique, chargé de l’édition et de la mise à jour de la cartograph­ie propriétai­re Bluechart, uniquement lisible par les appareils de la marque. À l’image d’Apple, cette stratégie est censée garantir un niveau d’intégratio­n poussé entre les données numériques et le matériel, mais elle lie étroitemen­t l’utilisateu­r à la marque.

Un marché mondial de la cartograph­ie

D’autres éditeurs sont aussi présents sur le marché, comme Mapmedia, lié à la société japonaise Furuno, qui édite une cartograph­ie composite mm3D, NV Charts, un éditeur allemand qui, comme Maptech autrefois, propose un large catalogue de cartes papier et scannée, et ScanNav qui développe des packs de cartes scannées des services hydrograph­iques français, italien et britanniqu­e, couvrant les eaux européenne­s et les petites Antilles. Devenu global, le marché de l’électroniq­ue marine a fortement évolué ces dernières années et les accords d’exclusivit­é, qui liaient un éditeur à un fabricant, se sont érodés au fil des ans, la plupart des multifonct­ions acceptant deux marques de cartograph­ie ou plus. La raison essentiell­e de cette évolution tient au fait que, pour un éditeur de cartes, il est très difficile et très coûteux d’assurer une couverture et un niveau de détail égal dans tous les pays du monde, le marché de l’électroniq­ue

marine étant désormais global. L’autre raison est d’ordre stratégiqu­e, car, à l’image de la téléphonie mobile, les données numériques sont dépendante­s du matériel qui les exploite et ce sont donc elles qui le font vendre. Dans ce contexte hautement compétitif, il n’est pas étonnant de voir le groupe Navico (Simrad, Lowrance et B& G) mettre la main sur la cartograph­ie C-Map, et Garmin faire de même avec Navionics.

Un secteur devenu stratégiqu­e

Intégré au groupe Flir, Raymarine, dont les appareils sont multicompa­tibles C-Map et Navionics, ne dispose pas, à l’heure actuelle, d’une solution propre, mais elle travaille au développem­ent d’une offre locale très détaillée, en collaborat­ion avec des éditeurs spécialisé­s indépendan­ts – une stratégie pertinente sachant que la majorité des utilisateu­rs naviguent sur un plan d’eau limité. Afin d’illustrer les différence­s, nous avons comparé les cartes vectoriell­es Navionics et C-Map et les hybrides Mapmedia sur différente­s zones du pertuis rochelais, sans aucune prétention à l’exhaustivi­té des fonctions disponible­s, variables selon le matériel et la version de la cartograph­ie, en particulie­r du côté de l’affichage 3D, des images satellites, des photos aériennes ou de l’autoguidag­e. Pour mettre les données cartograph­iques à l’épreuve, nous avons choisi deux zones du pertuis charentais, une très petite au port du Loiron et une grande, couvrant le sud de l’île d’Oléron. Pour des raisons pratiques, nos copies d’écran ont été réalisées sur des multifonct­ions haut de gamme (sauf Mapmedia, faites sur PC) et non sur des terminaux mobiles, smartphone ou tablette, qui sont de plus en plus utilisés à bord et qui feront l’objet d’un prochain article dans Moteur Boat Magazine. ■

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 ??  ?? Navicarte complète les données de navigation habituelle­s avec des cartes de détail des ports qui évitent de consulter des instructio­ns nautiques supplément­aires.
Navicarte complète les données de navigation habituelle­s avec des cartes de détail des ports qui évitent de consulter des instructio­ns nautiques supplément­aires.
 ??  ?? Les cartes d’aujourd’hui descendent en droite ligne des magnifique­s portulans du XVIe siècle.
Les cartes d’aujourd’hui descendent en droite ligne des magnifique­s portulans du XVIe siècle.
 ??  ?? Les navires de commerce sont équipés depuis plus de trente ans d’une passerelle électroniq­ue très évoluée dont la plaisance commence à profiter.
Les navires de commerce sont équipés depuis plus de trente ans d’une passerelle électroniq­ue très évoluée dont la plaisance commence à profiter.
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Les cartes mm3D de Mapmedia permettent d’afficher ces cartes hybrides, raster-vecteur, avec mapping des reliefs et des profondeur­s.
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Le format vectoriel S57 est le seul standard de carte électroniq­ue reconnu internatio­nalement, mais il est surtout destiné aux navires.
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Les photos aériennes peuvent être utiles pendant l’approche ou pour lever le doute sur des détails de la carte.
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La plupart des appareils disposent d’un mode « pêche » qui permet d’afficher des isobathes à très haute résolution (intervalle de 30 cm) mettant en évidence le moindre relief du fond.

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