Clap de fin pour Evinrude
BRP vient d’annoncer l’arrêt de la production des moteurs Evinrude. La marque, déjà en difficulté, précise que la crise du Covid-19 l’a forcée à prendre cette décision, qui va
« avoir des répercussions » sur
650 emplois dans le monde, dixit le président du groupe José Boisjoli. Pour les concessionnaires et les propriétaires de moteurs Evinrude, BRP s’engage à honorer les garanties et à poursuivre l’approvisionnement en pièces détachées. Cela concerne également les extensions de garantie à 10 ans récemment proposées, nous confirme Cédric Bonnet, directeur marketing Europe.
Par ailleurs, BRP, acteur majeur du jet, de la motoneige et du véhicule toutterrain reste très impliqué sur le marché du bateau. Le groupe a acheté ces dernières années aux États-Unis les chantiers Manitou et Alumacraft (pontoon boats et bateaux de pêche en aluminium), et Telwater, le plus gros fabricant de bateaux en aluminium en Australie. De ce fait, BRP vient de signer un accord avec Mercury pour motoriser ces coques, qu’il entend bien développer. Evinrude est un pionnier du horsbord : le premier modèle est apparu en 1907, développé par le Norvégien Ole Evinrude. L’idée lui est venue lorsque, devant traverser un lac à la rame pour apporter une crème glacée à sa femme, la glace a fondu. Il lui fallait donc un moyen plus rapide de se déplacer sur l’eau ! En 1936, Evinrude fusionne avec Johnson pour former le groupe OMC. Celui-ci devient tentaculaire en intégrant les marques
Four Winns, Chris-Craft, Donzi… Pour l’anecdote, en 1977, Evinrude est le nom de la libellule propulsant sur une feuille morte les souris Bernard et Bianca dans le film éponyme. En décembre 2000, OMC fait faillite. Evinrude est alors racheté par Bombardier, qui va créer par la suite la division « Produits Récréatifs ». La gamme se concentre désormais exclusivement sur la technologie deux-temps à injection directe ; le très décrié système Ficht est abandonné au profit d’une nouvelle injection baptisée E-Tec. En 2004, la gamme va de 40 à
250 chevaux. Elle culminera par la suite à 300 chevaux.
Avec le durcissement des normes environnementales, Evinrude s’est progressivement retrouvé seul acteur du marché en deux-temps injection directe après l’arrêt des Yamaha HPDI, des Mercury OptiMax, et des Tohatsu TLDI. La marque canado-américaine s’est vue remettre en 2005 le Prix d’excellence de la qualité de l’air par l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA). Malgré tout Evinrude a continuellement souffert de la mauvaise image perçue du deux-temps. Lors de la convention de presse l’an dernier à Charleston pour le lancement du nouveau 3 cylindres, une bonne partie de la conférence était basée sur ce problème d’image. Le 3 cylindres développé en 115, 140 et 150 chevaux illustre bien toute l’audace et l’avance
La dernière marque en 2T injection
technologique dont a fait preuve Evinrude sous l’ère BRP.
Ce 115 chevaux est le seul bénéficiant d’une direction assistée intégrée, d’un trim automatique et d’une commande de gaz électrique. À ce titre, la marque va manquer dans le paysage du nautisme, par son rôle de pionnier et d’agitateur d’idées nouvelles. Mais BRP reste actif dans le nautisme international à travers ses marques de bateaux Alumacraft, Manitou et Telwater, et chez nous avec sa très innovante gamme de motomarines Sea Doo. L’usine de Sturtevant (Wisconsin), où étaient produits les E-Tec, voit ses activités réorientées vers la recherche et le développement de nouveaux projets, comme celui de moteur furtif intégré à la coque, appelé Ghost. ■