Moto Journal

La moto intelligen­te

La V50 n’était pas une Moto Guzzi comme les autres. A sa sortie, elle incarnait le futur de la marque tout en préservant l’héritage familial. La firme de Mandello del Lario fondait de gros espoirs sur cette petite machine.

- TEXTE Jean-louis Basset PHOTOS Thomas Cortesi

À cette époque, Alejandro de Tomaso, le propriétai­re de Moto Guzzi et de Benelli, s’est mis en tête de concurrenc­er les Japonais sur leur propre terrain et il fait feu de tout bois. Cette petite V50, annoncée comme une moto intelligen­te dans sa conception et sa simplicité, se traduit par une remarquabl­e efficacité sur la route. Le nouveau bloc moteur est particuliè­rement bien conçu et la transmissi­on par arbre et cardan conforme à ce qu’on attend d’une Moto Guzzi. Le dessin de ces ensembles mécaniques est moderne et confère à la V50 une esthétique au goût du jour. Guzzi a opté pour le freinage intégral, une spécificit­é de la marque qui n’est pas dénuée d’intérêt : le levier de frein commande un des deux disques avant et la pédale de frein agit sur le disque arrière et le second disque avant. Au pilote de choisir son freinage… Sur le papier, tout est parfait mais la V50 souffre d’un prix de vente élevé (17 000 F) par rapport à la Honda 500 CX, sa principale concurrent­e, proposée à 14 600 F. Quoi qu’il en soit, la Moto Guzzi V50 a séduit le staff MJ et elle est embarquée pour un périple de 3 500 km à l’issue duquel paraîtra un énorme dossier de quinze pages.

ON THE ROAD

Pour n’importe quelle machine, plusieurs milliers de kilomètres avalés au mois de février représente­nt un sacré test. La Guzzi part avec un a priori favorable. Son petit format plaît d’emblée aux essayeurs ; la machine est conviviale, maniable, facile à béquiller. François-marie Dumas la trouve idéale pour les novices, les moto-écoles et les motards chevronnés qui roulent en ville. Le hic, c’est que le moteur manque de panache et la Guzzi s’assoit dès que le moindre faux plat se présente sur la route. La Honda 500 CX, qui a été invitée à ce roulage, humilie la petite Guzzi en reprises et vitesse de pointe. L’italienne se rattrape avec une tenue de route parfaite comparée à la “grosse” japonaise, connue pour son cadre en tôle emboutie et son manque de rigueur. FMD tente de sauver la V50 en nous expliquant que « la vitesse,

c’est dépassé », que la consommati­on d’essence est ridicule, le motard de l’époque s’en fout et la vitesse de pointe reste un argument capital dans l’achat d’une machine. Avec sa modernité à l’européenne, la Moto Guzzi V50 pouvait néanmoins séduire une frange de motards peinards, mais la fiabilité n’était pas toujours au rendez-vous. Elle souffrait de problèmes électrique­s, de soucis de joints spi et d’une finition médiocre (peinture et chrome)… on évoque même une série de V50 sorties d’usine avec un embiellage de V35. Vous l’aurez compris, c’est une italienne ! Elle est mimi, la petite Guzzi, à peine plus grosse qu’une 125 actuelle. C’est un avantage de poids (elle ne pèse que 178 kg tous pleins faits) et on s’amuse à son guidon. Ça tracte bien et c’est agréable en ville, mais il est certain qu’on ne se voit pas affronter le col de la Bonette en duo, avec les bagages (même si, à l’époque, on brûlait les kilomètres en 125 cm3). Si on la détaille un peu, on se dit, qu’en dépit de tous les efforts faits, la finition reste en deçà des standards japonais de l’époque. Les commodos en couleur, le bloc compteur-compte-tours, les plastiques durs ou la trappe à essence n’inspirent pas une extrême confiance. La V50 souffre des mêmes défauts que les italiennes de ces années-là, mais cellesci séduisaien­t par leur personnali­té, leur moteur, leur esthétique. La V50 restait beaucoup trop timide face à une CX 500, grosse et vilaine, mais dotée d’une mécanique coupleuse et incassable. C’est dommage, car la petite V50 était bien née, il lui manquait un peu de pêche et de rigueur de fabricatio­n ; mais, à cette époque, les Japonais sont imbattable­s.

UNE HISTOIRE DE FAMILLE

Stéphane connaît bien cette V50, puisque c’est la machine que son père a achetée neuve en juin 1979. « Mon père avait commencé sa carrière de motard dans le milieu des années 50 avec une Motobécane 175 avant d’acquérir une Terrot 350, raconte-t-il. A la fin des années 70, le virus l’avait repiqué et il avait acheté une Honda 400 T, un twin tranquille. Quand j’ai eu le bac, il m’a offert la 400 T et en a profité pour se payer cette Moto Guzzi V50 II parce qu’il adorait son bruit. » Vingt ans après, la petite Guzzi n’a parcouru que 10 000 km, mais le père de Stéphane ne s’en sert plus. « Un jour de l’année 1999, il m’a dit qu’il voulait l’échanger contre un ordinateur. Alors, j’ai foncé lui acheter un PC et j’ai récupéré la V50. Elle m’a permis de me remettre à la moto après une interrupti­on due à la naissance de mes enfants. J’ai fait environ 7 000 km avec, principale­ment en vallée de Chevreuse. » En 2013, Stéphane participe à un rallye de régularité en Andalousie avec la V50 (elle est alors munie de son carénage

Guzzi et de sacoches) et connaît quelques petits soucis mécaniques. Il décide alors de rénover la bête et cherche quelqu’un qui pourrait faire le job. Les Italiens de Moto Officina s’acquittero­nt de cette noble tâche. La moto est entièremen­t démontée et refaite de A à Z. Deux années après (la patience est la mère de toute restaurati­on !), elle ressort de l’atelier plus neuve que neuve, ses défauts de conception ayant même été gommés. Les amortisseu­rs Fournales (achetés neufs en 1980) ont été

reconditio­nnés à l’usine qui assure toujours le SAV de ses produits vieux de près de 40 ans. Blogueur (Virage 8) et organisate­ur de l’événement Motor & Soul, Stéphane prend toujours autant de plaisir à rouler avec la petite V50 II, prête à arpenter la route pour les trente prochaines années.

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1. Le freinage signé Brembo est suffisant… pourvu que l'on se soit habitué au couplage avant-arrière. 2. Complet, l'ensemble compteur-compte-tours souffre toutefois d'un aspect un peu “jouet en plastique”. 3. Les commodos sont dessinés avec...
1 1. Le freinage signé Brembo est suffisant… pourvu que l'on se soit habitué au couplage avant-arrière. 2. Complet, l'ensemble compteur-compte-tours souffre toutefois d'un aspect un peu “jouet en plastique”. 3. Les commodos sont dessinés avec...
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