KALEX L’ASSOMMOIR
Kalex a remporté les cinq courses 2017 (dont quatre avec Franco Morbidelli). Doit-on en conclure que la concurrence n’est pas au niveau ?
Les Kalex devant, les autres derrière… Oui, le team Marc VDS empile les victoires depuis le début de saison avec Franco Morbidelli – la 4e en cinq courses ! Pour autant, la domination d’un constructeur de châssis ne semble plus aussi marquée dans cette catégorie si disputée, avec le même moteur “poussif”, un Honda 600 cm3 de 120 ch. Au milieu des Kalex, Les Suter, les Mistral, les Speed Up et, désormais, les KTM sont là ! « Morbidelli, tu le mets sur n’importe quelle moto2 du plateau, il est devant ! L’important, c’est le pilote ; la moto, ce n’est que 20 % du résultat. » Guy Coulon ne mâche pas ses mots. Et il sait de quoi il parle, puisqu’il conçoit lui-même les Mistral 610 de ses petits doigts agiles du côté de Bormes-les-mimosas, tout en s’occupant de la M1 de Zarco en Motogp. « L’an passé, pas grand monde ne voulait rouler sur nos motos. Alors, on est allés chercher un p’tit jeune qui n’en veut en championnat espagnol, Xavi Vierge. Et d’un coup, ça marche [9e au Mans] ! Pourtant, c’est sensiblement la même machine que l’an passé. Il y a un phénomène de mode : si la Kalex gagne, tout le monde veut une Kalex, mais, pour moi – je ne devrais pas te dire ça ! – la plus aboutie reste la Suter. Bon, la Speed Up est pas mal non plus et notre Mistral 610 à l’air dans le coup. Notre moto, c’est 700 pièces, la plupart fabriquées artisanalement. Notre cadre est taillé dans la masse [une tuerie à détailler, un bijou qu’on n’a, hélas, pas le droit de vous montrer à poil], la colonne de direction usinée dans un bloc d’alu sur un tour cinq axes, etc. » Chez Suter, on avoue avoir péché par orgueil par le passé : « On a fait une “moto d’ingénieur”, fournie avec un logiciel de développement châssis, avec de multiples paramètres, et c’est devenu une usine à gaz avec laquelle certains faisaient n’importe quoi. Du coup, la Suter MMX2 a eu la réputation d’une moto délicate à régler et on nous a boudés au profit de Kalex. Alors, on s’est remis en question, on revient avec seulement quatre motos, deux chez Kiefer Racing et deux chez Dynavolt et elles ne marchent pas si mal ! » Pour preuve, Dominique Aegerter a fini 7e au Mans, premier “non-kalex”.
USINE CONTRE ARTISANS
La KTM (à moteur Honda…) – qui entame sa première année en Moto2 en tant que constructeur de châssis – est bien moins impressionnante avec son treillis tubulaire en acier. Et pourtant, ça marche. Plutôt bien, même si Miguel Oliveira, 4e du championnat, est passé à côté de sa course au Mans, seulement 17e. « KTM a des moyens énormes, constate Gilles Bigot du team Interwetten qui fait rouler Tom Lüthi (3e) sur une Kalex. C’est vraiment une structure d’usine, avec une équipe de tests et ils sont d’entrée de jeu dans le coup, au prix de très nombreuses évolutions de châssis en quelques courses. Ça réveille la catégorie ! » Pour Guy Coulon : « En partant d’une feuille
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blanche, KTM a des pistes d’évolution rapides, et les moyens de l’usine qui vont avec. D’ailleurs, je ne suis pas certain que la conception de leur châssis tubulaire acier soit plus économique que le nôtre. Nous, on avance à petits pas, en améliorant notre moto par petites touches. KTM doit déjà en être à la 3e ou 4e version de son châssis, quand on projette simplement des modifications pour 2018 sur la Mistral… On ne joue pas dans la même cour ! Et comme tu le vois, on a encore de la place sur le camion pour des sponsors [à part Bihr et Kayaba, la remorque Mistral est vierge de stickers]… En réalité, c’est le team Motogp qui nous permet de continuer l’aventure Mistral en Moto2. Et c’est passionnant de concevoir une moto. »