Moto Journal

JOHN MCGUINNESS « Je ne pouvais pas m’empêcher d’être là ! »

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John Mcguinness était présent au Tourist Trophy 2017. Malheureus­ement pas en selle sur le mythique tracé, comme on l'espérait tous, mais assis sur une sorte de trois-roues improbable lui permettant de se déplacer à loisir dans le paddock. Celui qui est 23 fois vainqueur de l'épreuve s'est en effet lourdement blessé lors des essais de la récente North West 200 (MJ 2208). Les traumatism­es subis par le pilote de 45 ans à une jambe et aux vertèbres, notamment, ne lui ont évidemment pas permis de faire son pèlerinage annuel au TT, si ce n'est en tant que spectateur. Il n'empêche : sa venue a fait briller un rayon de soleil dont l'épreuve avait bien besoin cette année.

SA PRÉSENCE AU TT

« Je ne pouvais pas m'empêcher [d'y aller] !, a lâché le “missile de Morecambe” après avoir reçu une ovation alors qu'il embarquait sur le ferry à Heysham, sur la côte ouest de l'angleterre, au nord de Liverpool, pour rejoindre l'île de Man. Je viens sur le TT chaque année depuis 1982 et il n'était pas question que je loupe cette édition. Je ne suis pas là pour m'attirer de la sympathie, mais parce que je suis passionné et que j'aime vraiment l'endroit. » Le fait d'avoir été blessé n'a pas entamé sa volonté de venir voir ses adversaire­s et il a compati avec ceux qui ont eu dû batailler avec les intempérie­s. Malgré les mauvaises conditions, l'homme surnommé Mister TT ne pouvait cacher sa déception de ne pouvoir affronter Michael Dunlop, Ian Hutchinson et consorts. « Je suis simplement excessivem­ent déçu de ne pas pouvoir défendre mes chances. J'aime être ici, l'atmosphère, les gens, mon team. J'ai disputé le 90e TT en 1997, puis le 100e en 2007 et j'étais presque arrivé au 110e, mais ce n'était pas pour cette fois. Je souffre vraiment de ne pas être ici, de ne pas charger le motor-home avec la famille, de prendre le ferry, de m'installer dans le paddock, de regarder l'endroit se mettre à vivre, m'imprégner de l'atmosphère, et de monter sur la moto. » En dépit de ses blessures et de l'épreuve qu'il subit, ce pilote hors du commun s'est dit triste de ne pas être en mesure de rouler sur la Honda au TT 2017 : « J'étais très excité à l'idée d'utiliser la nouvelle Fireblade. J'ai attendu si longtemps. Les essais ont été difficiles, mais nous allions dans la bonne direction. Juste avant mon accident, nous n'étions pas tip-top, mais de plus en plus rapides, apprenant et apprenant. La moto, l'électroniq­ue, tout était nouveau pour moi, mais j'étais en train d'apprendre. »

SA BLESSURE

« Pour être honnête, la blessure paraît bien pire que ce qu'elle est, explique-t-il en montrant le bas de sa jambe droite sur laquelle est fixée une armature métallique avec des broches. Il s'agit d'une blessure au tibia et au péroné inférieurs, environ 50 mm de mon os sont restés à Primrose

Hill... [l'endroit où il s'est crashé à la North West 200]. C'était très abîmé, avec beaucoup de saleté, donc le gros problème est l'infection. [Les médecins de l'hôpital de Belfast] sont satisfaits d'avoir tout nettoyé et sécurisé l'ensemble. L'os a traversé la jambe et je devais avoir une greffe de peau. » John doit maintenant attendre que la greffe prenne alors qu'un fixateur, semblable à celui porté par Ian Hutchinson après son terrible accident de 2010 à Silverston­e – des dizaines d'opérations à la jambe gauche – est implanté sur sa jambe droite, et que le long processus de repousse du morceau d'os manquant commence. « Je fais 1,75 m du côté de ma jambe gauche et 1,68 m à droite, donc l'os doit repousser un peu, mais [les chirurgien­s] estiment que c'est simple. [...] Ils ne sont pas sûrs du temps que je devrai garder mon fixateur. Peut-être six, sept, huit mois et, après cela, il faudra que je retrouve mon poids de combat ! »

SON AVENIR

Quand on lui demande s'il reviendra ou non à la compétitio­n, John répond que « tout fonctionne bien. Je suis concentré sur ma guérison et, ensuite, on pourra prendre une décision. D'abord, et c'est le plus important, je suis en un seul morceau. Quand j'ai heurté le sol, j'ai pensé que j'étais bon pour rencontrer mon créateur, vraiment. Je ne pensais pas que je survivrais à cette chute. » Au fur et à mesure de sa guérison, cette sombre perspectiv­e s'est éloignée : « Quand j'étais à l'hôpital, les deux premiers jours, je me disais : “Pour moi, c'est terminé”. Mais c'est amusant, quand on se sent mieux, on veut remonter sur la moto. » Pour la suite, John est – cela semble évident compte tenu de ce que son corps a subi – prudent : « Je sais qu'il serait facile de dire que j'arrête. Je pourrais dire : “Je ne vais pas faire revivre ça à ma famille, il y a trop de pression, ce n'est pas juste”. Mais si tu dis que tu arrêtes et qu'ensuite tu roules de nouveau, tu as l'air un peu stupide. Je ne suis pas certain à 100 % du temps que va prendre ma guérison. Neuf mois, peut-être dix, donc nous allons manquer les essais de présaison et les courses de l'année. » Pesant ces options, Mcguinness pense à quelques alternativ­es aux surpuissan­tes superbikes : « Les motos classiques sont un peu moins puissantes, donc on peut faire le Classic TT. Je peux toujours rouler sur la moto électrique [John devait encore disputer la SES TT Race sur une Mugen, comme l'an passé]. Les grosses motos sont tellement difficiles à piloter, le rythme tellement élevé. Si je peux le faire encore ou non, je ne le sais pas. [...] Si les gens qui ont été derrière moi toutes ces années sont fidèles et que tout va bien, alors peut-être que je pourrai le faire à nouveau. Pour le moment, je dois me concentrer sur le fait de ne pas avoir d'infection, faire ce qu'on me dit et me remettre. » Mcguinness explique encore qu'il n'aura pas de regrets s'il ne revient pas à la compétitio­n, mais il ne se fait aucune illusion sur le fait que le TT lui manquera : « Ce que j'ai réalisé ces dernières années, personne ne peut me l'enlever, sourit-il. J'ai eu des opportunit­és fantastiqu­es. Pour revenir, tout doit être d'équerre, les planètes doivent être alignées. Si je ne peux pas revenir, je ne reviendrai pas, mais ce sera un énorme vide à combler. J'ai parlé aux pilotes qui ont pris leur retraite et c'est dur, mais je vais encore venir et faire quelque chose. »

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[1] Spectateur John Mcguinness, ici entre sa femme Becky et son fils Ewan, simple spectateur pendant quelques jours d'un Tourist Trophy, qui l'eût cru ? [2& 3] Patient galère Conséquenc­e de sa lourde chute lors des essais de la North West 200, la jambe...
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