L'EMPIRE DU MILIEU
C’est confirmé officiellement, la KTM 790 Duke verra le jour en 2018. Moto Journal est parti en Autriche essayer en exclusivité le modèle de préproduction. Un court essai de 30 minutes pour apprécier son agilité, sa vivacité moteur et sa facilité de condu
Il faut environ trois ans pour développer une nouvelle moto, mais il en a fallu quasiment quatre pour la 790 Duke, car on est partis d'une feuille blanche. On a voulu une moto compacte et légère. Pour ça, on a commencé par fabriquer un moteur le plus petit possible, pour ensuite imaginer le cadre autour. L'inédit bicylindre en ligne de 790 cm3 fait d'ailleurs partie intégrante de la rigidité du châssis tubulaire. Par ailleurs, on a aussi voulu passer un cap dans la catégorie des roadsters de moyenne cylindrée, en équipant la 790 Duke d'un package électronique important. Elle est dotée d'un tableau de bord en couleur qui se commande depuis le guidon, d'un ABS fonctionnant en virage, d'un antipatinage paramétrable, d'un contrôle de frein moteur, de quatre cartographies moteur, d'un shifter fonctionnant à la montée et à la descente, d'une aide au départ et d'un mode piste. On a vraiment essayé de tout mettre. Ce modèle que vous avez sous les yeux et que vous allez essayer est la dernière évolution de notre prototype. Que ce soit au niveau des suspensions, du châssis, de l'électronique ou du moteur, ce sont nos dernières pièces de développement. » Whouaou. Après les mots de Luke Brackenbury, chef des relations presse de KTM, je n'ai qu'une envie : sauter sur la Duke 790 qui trône devant moi dans cette petite salle de réunion du complexe KTM Technologies à Salzbourg. Les fans du design autrichien ne seront pas déboussolés. On retrouve les codes stylistiques de la marque, avec des lignes taillées à la serpe et des flancs de réservoir qui se prolongent vers l'avant. Tout comme l'optique agressive qui ressemble fortement à celle de la Super Duke.
SOUPLE ET ROND
Taillant le bout de gras avec Adriaan, le directeur de projet des motos de moyenne cylindrée, j'attends mon tour. J'entends au loin la sonorité pétaradante de la KTM 790 Duke, encore aux mains d'un confrère italien. Adriaan Sinke me le confirme : « Ce n'est peut-
être pas la dernière version de la ligne d'échappement, mais on sera sur un modèle similaire sur notre version de série, avec la même sonorité. » Au top ! Ça tombe bien, c'est à moi de m'y coller. La position de conduite est typique des modèles KTM, à mi-chemin entre supermotard et roadster. Ce qui a l'avantage d'une posture assez détendue au guidon, que ce soit au niveau des bras ou des jambes. Dès le démarrage, le twin parallèle annonce la couleur. Son calage à 270° lui donne la sonorité d'un V2. Ça pétarade à souhait tout en ayant une certaine rondeur. On retrouve d'ailleurs cette sensation à la conduite, avec l'impression d'avoir un V2 entre les jambes et non un bicylindre parallèle. Car ce moteur avance une belle souplesse et une rondeur remarquable dans les bas régimes. Il repart dès 2 500 tr/mn sans sourciller aux alentours de 60 km/h sur le dernier rapport. La gestion de l'injection et de la poignée de gaz est très bonne, apportant une dose de douceur et de feeling bienvenue. Assez sage sous 5 000 tr/mn, le twin change de visage passé ce régime. Vif et pétillant, il se charge en hormones au fur et à mesure des tours pour propulser avec vivacité la fluette 790, annoncée à moins de 200 kg avec les pleins. A défaut de chiffre officiel, KTM annonce plus de 100 ch. Vu la patate du bloc dans les tours, ils doivent tous y être. Avec un centre de gravité placé
La 790 Duke brille par son agilité, sa facilité de pilotage et son moteur explosif dans les tours
bas grâce à la position et à la compacité du moteur, la 790 virevolte de virage en virage avec l'agilité d'une gazelle coursée par un lion. Et il suffit de déconnecter l'antipatinage pour déclencher un bon wheeling en sortie de courbe avec facilité. Sans se montrer très rigide, le châssis brille par son efficacité générale sur route lisse. Car pendant ces trente minutes d'essai, nous avons uniquement évolué sur une route sinueuse en parfait état. Dans ces conditions, la stabilité est toujours de la partie, avec des suspensions offrant un parfait compromis entre confort et rigueur. Elles ne sont pas réglables sur ce modèle, mais devraient l'être sur une prochaine version R. Adriaan m'expliquera plus tard que « même si les suspensions WP ne sont pas réglables, elles sont de très bonne qualité. Dernièrement, les ingénieurs ont rajouté un empilement de clapets, ce qui rend la fourche plus onéreuse, mais augmente ses qualités d'amortissement. » Toujours côté confort, l'assise est large, mais la selle semble être un peu dure. Au niveau de l'électronique, KTM a mis le paquet sur la 790, voulant en faire « le roadster de moyenne cylindrée le mieux équipé. » En dynamique, toute l'électronique est bien au point. Le contrôle de motricité réglé sur Sport se montre doux et imperceptible, tout en retenant la roue arrière des dérobades. On aperçoit au tableau de bord le voyant qui clignote, mais sans baisse brutale de puissance. L'ABS aussi bosse discrètement à travers le système de frein performant. Les gros étriers viennent pincer les disques pour stopper la Duke sans effort. Le mordant est présent, sans être trop important, ce qui évitera
Souple à bas régime, le twin se vivifie passé 5 000 tr/mn
quelques frayeurs aux débutants. Comme souvent sur les KTM, le feeling des commandes est très bon, du frein avant au frein arrière.
SONORITÉ AU TOP
Pour continuer de profiter de la sonorité excitante du twin, on abuserait presque de la boîte de vitesses, commandée par un shifter qui fonctionne aussi bien à la montée qu'à la descente, dans la plus grande douceur. Adriaan y va de son explication : « Contrairement à la plupart des shifters, le nôtre est équipé de deux capteurs : un détecte le début du passage du rapport pour couper l'allumage, l'autre sert à connaître le moment où la vitesse est verrouillée, et donc à redonner la puissance. L'avantage est que cela fonctionne bien sur toute la plage moteur. » Cependant, sous 3 000 tr/mn, la douceur de passage des rapports n'est pas extraordinaire, mais cela s'explique par l'architecture moteur. Aussi doux qu'il puisse être, un twin a un fonctionnement moins onctueux que celui d'un 4-cylindres, qui acceptera plus facilement de descendre dans les tours. Mais, passé un certain régime, ce shifter donne encore plus envie de cravacher le moteur, d'en tirer toute la quintessence sans forcément aller chercher le rupteur. On profite, la banane sous le casque, du peps présent entre 5 000 et 8 000 tr/mn. Pour les pilotes débutants ou ceux utilisant leur moto principalement en milieu urbain, l'accessibilité est de bon niveau. La selle assez basse, le faible rayon de braquage, la position de conduite assez droite et la douceur du moteur font de la KTM une bonne alliée en ville, où elle devrait se défaire avec facilité de la circulation. Et côté tarif, Adriaan nous confirme qu'elle sera bien placée, sous les 9 000 €. Une sérieuse rivale pour les Triumph Street Triple S, Kawasaki Z 900 ou Yamaha MT-09 qui s'affichent sensiblement au même tarif.