Yannis Scol
docteur en géographie, enseignant-chercheur à l’université de Lille 1
Pourquoi s’intéresser aux hivernales à moto en tant que géographe ? Les motards et l’univers de la moto sont l’objet de nombreuses études sociologiques ou anthropologiques. En tant que géographe – et motard ! –, je me suis d’abord intéressé à la promotion touristique de certains territoires vis-à-vis des motards. Les hivernales m’intéressent parce qu’il s’agit d’un phénomène très original du tourisme à moto, qui est déjà, en soi, une pratique marginale du tourisme. La pratique augmente-t-elle ? J’ai recensé 334 concentrations organisées en hiver entre novembre 2012 et mars 2013. Ce nombre est relativement stable. Tout comme la moyenne du nombre de participants.
Qu’est-ce qui fonde le succès d’une hivernale ? Exactement l’inverse de ce qui fait le succès d’une concentration estivale ! En été, chacun espère du soleil et des hautes températures ; en hiver, la neige, le verglas et le froid sont les bienvenus. Mieux, je dirais même que ces conditions extrêmes déterminent la réussite de l’événement aux yeux des participants…
A part le froid, on recherche quoi en participant à une hivernale ? Ceux qui viennent cherchent avant tout une certaine authenticité dans le partage d’une passion commune – la moto – et des rapports humains. La plupart des participants à des hivernales sont encore plus âgés que la moyenne d’âge des motards français, qui tourne autour de 45 ans. Ils éprouvent le besoin de se retrouver en dehors de tout cadre formel, comme c’était le cas dans les années 70 qui ont vu naître nombre d’hivernales. Au-delà, il y a le défi de prouver que l’on peut rouler par tous les temps. C’est pour opérer une sélection “naturelle” que les hivernales s’organisent de plus en plus au nord ou dans des lieux difficiles d’accès.
Les conditions extrêmes déterminent le succès d’une hivernale