Douceur et volupté
Tu vas voir, à force de rouler, c’est mieux qu’on le pense », m’explique le Colonel pour me rassurer. Il parle de la FJR 1300 AS et de sa boîte à embrayage robotisé. Mais j’avoue que, pour le moment, je ne suis pas convaincu. Naturellement, je suis parti avec la moto comme une balle en changeant de rapport avec les gâchettes au guidon gauche. Mais a chaque montée de rapport gaz en grand, comme avec un shifter quoi, c’est toujours le même coup d’arrêt qui vous fait plonger en avant, suivi d’un passage de rapport désespérément long. Grosse déception ! Par la force des choses, je me calme pour essayer de goûter à l’aspect pratique du système. OK, on n’a plus besoin de se servir du levier d’embrayage. Et en ville, à chaque stop, à chaque feu rouge, c’est appréciable. D’autant plus que la gestion de l’embrayage est plutôt fine et naturelle. Le niveau de friction de l’embrayage qui fait progressivement passer le couple moteur à la roue arrière est bien connecté à la poignée de gaz. Parfait ! Mais pourquoi Yamaha n’est-il pas allé au bout du concept en proposant un mode automatique ? Car d’automatique, la FJR ne possède que l’embrayage. Eh oui, il faut toujours passer les rapports à l’aide des gâchettes à la poignée gauche ou du sélecteur électronique au pied. Aucun mode automatique ne permet de vous la couler douce. Tout juste une fonction qui rétrograde automatiquement une fois la moto quasiment à l’arrêt. Le strict minimum pour ne pas repartir d’un feu rouge en sixième… Passé cette première incompréhension, on prend du recul. Et je finis même par apprécier la FJR, comme l’avait prédit le Colonel. Z’ont toujours raison, ces vieux ! Je me rappelle la suite de ses sages paroles : « Il ne faut pas essayer de faire comme avec un shifter ou une boîte DCT, mais plutôt comme avec une boîte classique. » OK, balles neuves, je reprends tout depuis le début avec la Yam. Je soude en grand et tire le premier rapport jusqu’au bout. Et là, au moment où mon index gauche s’apprête à appuyer sur le bouton +, je coupe les gaz un bref instant. Victoire, ça marche ! La deuxième passe en douceur et l’à-coup a quasiment disparu. Bien sûr, on sent que la moto interrompt sa poussée. Et puis, il faut être honnête, ça n’est pas très rapide et on perd en précision de pilotage. Comme il n’y a plus de connexion entre le pilote d’un côté, l’embrayage et les fourchettes de sélection d’un autre, on coupe les gaz et on appuie sur les gâchettes un peu au pif. Mais la plupart du temps, ça fonctionne plutôt bien, de façon bien plus douce et feutrée qu’avec une boîte classique ou dotée d’un shifter. Une volupté qui se marie bien à la philosophie de grosse GT de la FJR. Quant au rétrogradage, la boîte robotisée Yamaha est étrangement la meilleure du lot. Quel que soit le régime moteur, une pression sur la gâchette et le rapport est rentré sans temps-mort et sans à-coup. Bluffant d’efficacité !