COMPARATIF
3 sportives : Aprilia 1000 RSV4 RF, Ducati 1100 Panigale V4S, Yamaha R1M
La Ducati Panigale V4S débarque dans la catégorie des superbikes comme un chien dans un jeu de quilles. La belle italienne n'est pas là pour faire de la figuration, mais plutôt pour bousculer la hiérarchie. Pour y arriver, elle s'arme d'un surpuissant moteur V4 de 1 100 cm3. Un gain de cylindrée avantageux pour atomiser ses petites camarades dans les bouts droits, mais qui ne lui permet pas de s'inscrire dans la plupart des championnats. On ne lui en veut pas, car, avec l'italienne, le charme opère dès le premier regard. Elle avance une magnifique robe immaculée d'un rouge profond. Le regard dissimulé dans les canalisations d'air forcé et surligné par deux barrettes lumineuses donne le ton. Le profil est anguleux au possible et le cul minimaliste dépourvu de silencieux d'échappement laisse apparaître une magnifique jante à trois branches dédoublées. La RSV4 RF passerait presque inaperçue tant la robe de la Ducati est spectaculaire, moderne, réussie. En fait, l'aprilia prend un petit coup de vieux, avec un imposant phare à ampoules conventionnelles à l'avant et sa ligne qui n'a que très peu évolué depuis sa sortie en 2009. En revanche, au niveau de ses caractéristiques et de son équipement, la RSV4 dans cette version RF est bien dans l'air du temps. Elle a évolué au fil des années pour se bonifier sur le plan technique. Elle est aujourd'hui animée par un V4 de 200 ch, sa dotation électronique fait partie de ce qui se fait de mieux, son tableau de bord fait appel à un modèle tout en couleur et les suspensions sont des Ohlins entièrement réglables. Des suspensions haut de gamme, mais pas réglables électroniquement comme sur les deux autres prétendantes au titre. Faudrait pas non plus être trop en avance sur son temps… Dans un autre style, la Yamaha R1M possède une ligne tout droit sortie des paddocks. Faisant appel en grande partie à du véritable carbone, à de l'aluminium et à du magnésium, elle respire la compétition. Tout est pensé pour la performance. Il manque seulement une plaqueà numéro pour s'aligner sur une grille de départ. De plus, elle a de la gueule avec son cul aéré et ses feux de route planqués sous la large face en carbone.
EN PISTE
Les pneus chauffés à 90°, les mécaniques à température, la piste du Bugatti enfin sèche, on va pouvoir commencer à mettre du gaz ! Car voilà plus d'un jour qu'on regarde la pluie tomber et qu'on attend ce package parfait pour essayer nos trois fusées à aligner les chronos. Remonté comme une pendule depuis hier, je saute sur la Panigale V4S le couteau entre les dents. Dès les premiers tours de roues,
Le V4 de la Ducati Panigale vous catapulte d'un virage à l'autre avec une force incroyable
on est impressionné par la force avec laquelle la Panigale vous catapulte d'un virage à l'autre. On remonte les autres pilotes dans les lignes droites avec une étonnante facilité sans même avoir besoin de prendre l'aspi. Quand on passe sur l'aprilia RSV4 RF, autre sérieuse prétendante au titre, on a presque l'impression qu'il manque des chevaux. On peut accélérer bien plus tôt dans le virage. Plus rassurant que le pétard à mèche courte nommé Panigale. Car les ingénieurs ont gavé de chevaux le 4-cylindres en V jusqu'à plus faim. Enfin, pas vraiment en V. Pour être plus précis, il faut dire en L du fait de l'angle de 90° formé par les deux bancs de cylindre, comme sur les motogp. D'ailleurs, le moteur en reprend certaines caractéristiques, comme l'alésage de 81 mm, quelques éléments de la culasse et de la chambre de combustion. On retrouve aussi la distribution desmodromique, qui permet de commander avec précision la fermeture des soupapes et de prendre davantage de régime. Le 4-cylindres en L rugit jusqu'à 13 500 tr/mn sans jamais faiblir, voire 14 500 tr/mn sur les derniers rapports. Vraiment impressionnant de sortir avec autant de force des virages, pour ensuite être propulsé comme une balle jusqu'à la courbe suivante avec plusieurs kilométres/heure supplémentaires ! Au guidon de la RSV4 RF, les sorties de virages sont bien plus détendues, moins sportives… mais très efficaces. On profite d'une motricité sans faille et d'un moteur à la douceur exemplaire qui permet de s'extraire des virages gaz en grand plus tôt qu'avec la Panigale et d'exploiter au maximum ses 200 ch. Car sur un tour chrono, la RSV4 RF se montre moins
physique, plus facile à exploiter, moins impressionnante. On profite aussi d'un train avant à la précision chirurgicale pour entrer vite en virage, même sans suspensions électroniques. La RSV4 est d'ailleurs la seule du comparatif à disposer de suspensions standard, qui s'ajustent via des clics et des quarts de tour. Mais des suspensions de qualité qui se nomment Ohlins TTX 36 pour l'amortisseur et NIX pour la fourche. Le feeling est impressionnant de finesse. On a l'impression de tout ressentir du bout des doigts et sur chaque centimètre carré des fesses à travers la selle. On peut conserver les freins très tard en virage, la RSV4 ne bronche pas. Idem au moment de reprendre le filet de gaz, elle reste stable. C'est une vraie machine de course. D'ailleurs, on le sent dès qu'on pose ses fesses dessus, avec une position de conduite très basculée sur l'avant et une selle dure et haut perchée. Quand on grimpe sur la Ducati, la position est presque détendue, avec une selle plus basse et des demi-guidons plus ouverts. Le train avant est un poil moins précis que ceux de la RSV4 et de la R1M, mais la Panigale impressionne par son agilité. Dans les chicanes, elle passe d'un virage à l'autre en un clin d'oeil sans faire forcer son pilote.
MOTO DE COURSE
Lorsqu'on prend les demi-guidons de la R1M en main, on sent bien qu'on enfourche une moto de course. La selle est haute, le buste est basculé sur l'avant. Une position de conduite idéale pour enchaîner les tours chrono. Ça tombe bien, on est venus pour ça. Le chronomètre au tableau de bord enclenché, le système s'occupe de tout grâce à la centrale GPS. Il suffit d'avoir paramétré le circuit du Mans et les temps s'affichent automatiquement à chaque passage sur la ligne droite des stands. Vraiment top comme équipement ! Et pour aller encore plus loin, la R1M propose un système d'enregistrement qui prend en compte de nombreuses infos, à l'image d'une acquisition de données
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L'aprilia RSV4 RF impressionne par son train avant redoutable de précision et de feeling
utilisée en compétition. De quoi passer de looooongues soirées à débriefer devant des dizaines de chiffres. Une fois en piste, la R1M impressionne par sa stabilité. Elle vire d'un bloc, en rassurant son pilote. Idem en entrée de virage, avec un train avant communicatif qui permet de conserver le freinage quasiment jusqu'au point de corde, pour ensuite reprendre directement le filet de gaz. La stabilité n'est jamais mise en défaut, on peut prendre l'angle maxi en toute confiance. En positionnant le mode moteur sur 2 depuis le commodo, aucun à-coup n'est à déplorer. On peut reprendre les gaz très tôt en douceur pour ressortir avec force du virage grâce à une motricité sans faille. Les suspensions Ohlins, qui ajustent en permanence les réglages de l'hydraulique, font un excellent travail pour faire digérer au pneu arrière les presque 200 ch. Le châssis ultrarigide, l'énorme bras oscillant en aluminium et le contrôle de motricité qui bosse dans la plus
grande discrétion aussi. Il faut dire que ce modèle 2018 a bénéficié des dernières évolutions au niveau de l'électronique, qui oeuvre de manière plus transparente et efficace. De plus, le 4-cylindres au calage Cross Plane à la sonorité semblable de celle de la M1 de GP permet une arrivée assez douce du couple et de la puissance, contribuant de fait à l'excellente motricité. Et même si, sur notre banc, ce moteur se montre moins puissant que celui de l'aprilia, il offre des accélérations plus sensationnelles. Le barregraphe du compteur en couleur est attiré par la zone rouge située à 14 000 tr/mn comme un aimant par une pièce de métal.
DRAGSTER
Avec 214 ch mesurés sur notre banc de puissance, je peux vous dire que les sorties de virage sont sportives au guidon de la Panigale quand on tente un tour rapide. Sur les fortes charges encore sur l'angle, le pneu arrière à tendance à cisailler la piste