Les prochaines gammes d'indian seront plus européennes
En 2017, Indian a produit 35 000 motos. 30 000 pour le marché intérieur américain, le reste pour les autres marchés. Dont la France, où les ventes ont progressé fortement. Pierre Audoin, le manager Indian Motorcycle France, fait le point.
Propos recueillis par Pierre Orluc, avec l’aide de Pilar Domerge, photos Greg Jonderlynk et Indian
Comment se porte Indian en France ?
Ça va plutôt bien. Nous avons progressé de 35 % en 2017 et fini l’année avec 1 023 immatriculations réalisées par notre réseau de 29 concessionnaires. Ce n’était pas un pari gagné d’avance, parce que le 9 janvier 2017, on a annoncé l’arrêt de Victory [propriété, comme Indian, de Polaris]. Victory représentait 30 % du volume d’affaires de Polaris France et également de nos concessionnaires. Il a donc fallu compenser ces volumes. Aujourd’hui, tout le monde s’accorde à dire que c’était une bonne décision économique. On a tout fait pour préserver l’image de marque auprès des clients, la rentabilité chez nos concessionnaires, on a été très présents, ça a été beaucoup de travail, on a rapidement retrouvé la motivation. Du coup, on a progressé sur le volume global.
Qu’envisagez-vous pour 2018 ?
On devrait vendre à peu près 1 500 motos. Sur les deux premiers mois de l’année, on est déjà à plus 80 % d’immatriculations ! Notre stratégie est plutôt de renforcer la qualité et la rentabilité de chaque concessionnaire, le service client, la satisfaction en général, que de monter des points de vente partout. On va ouvrir Orléans, Valence, on renforce Paris avec un concessionnaire à la Bastille. Il y a des zones qu’on ne va pas couvrir : comme on est dans une stratégie de concession exclusive où le client va être dans un univers Indian, il faut qu’on réserve à nos concessionnaires un potentiel important en termes de secteur. S’ils gagnent des sous, au bout du compte, ce sera gagnant pour le service client et la satisfaction des clients.
Quelle moto avez-vous le plus vendue en 2017 ?
La Scout, avec plus de cinq cents immatriculations, la moitié du volume total. Ce qui fait notre grosse progression en ce début d’année 2018, c’est la Bobber, un succès auquel on s’attendait un peu. On regarde beaucoup la concurrence, notamment Triumph (la Triumph Bobber, ils voulaient en vendre 250, ils en ont vendu 600), on est en train de suivre cette tendance, ce genre de moto est particulièrement à la mode. On a de bons résultats aussi avec la Roadmaster, qui est un produit à forte valeur ajoutée et sans doute une des motos les plus luxueuses du marché, très efficace car adaptée à nos routes. Avec elle, on capte une clientèle qui vient aussi bien des marques GT japonaises ou européennes, que de chez Harley-davidson.
Justement, quel type de clientèle attirez-vous plus généralement ?
Plutôt une clientèle qui pouvait rouler en roadster européen ou japonais et qui va avoir envie de quelque chose de plus tranquille, qui va lui apporter des sensations différentes et un univers de marque. On revient à un schéma plus ancien où ce sont la liberté, la bande de copains, les virées, qui comptent... La performance est beaucoup moins
importante qu’elle a pu l’être ces dernières années. Sur les plus grosses, il y a un peu de “dérapage” de chez Harley, de chez BMW, des gens qui vont trouver chez nous quelque chose de plus chaleureux, avec un aspect technique des motos qui va leur parler plus que d’autres marques américaines.
A-t-il été difficile pour Indian de s’implanter en France ?
Ce n’est pas simple, on essaie de faire le maximum de bruit, beaucoup d’événements, on soutient nos concessionnaires. Du coup, l’image de marque s’est constituée assez vite. Et puis, on ne se rendait pas compte, quand on l’a relancée, à quel point elle avait laissé dans l’inconscient collectif quelque chose, ce logo – la tête d’indien. La notoriété est venue très vite, ça nous a surpris. On s’est retrouvé dans notre réseau avec des concessionnaires qui ont voulu investir sur la marque, des concessions exclusives (70 % le sont), qui ont monté de belles structures ; on va d’ailleurs sans doute passer à 100 %. On a vraiment besoin d’un univers, on ne peut pas mettre cette marque-là au milieu d’autres marques. Il faut capitaliser sur l’image.
C’est quoi, l’avenir des modèles Indian ? Allez-vous taper “tous azimuts” comme d’autres marques...
Il y a une stratégie de développement européenne. Le marché de la moto est soit en Europe, soit dans les marchés émergeants pour des petites motos au Brésil ou en Inde. Le marché américain est compliqué, proportionnellement, il n’est pas très important, la clientèle, vieillissante, est très difficile à renouveler, les jeunes ne font pas de moto ; un peu comme chez nous, mais chez nous, au moins, la moto est tendance et on a un taux de motards important et beaucoup de gens passent leur permis. Les prochaines gammes de produits vont être plus européennes tout en collant à une certaine image américaine. On a présenté à l’eicma [le salon de Milan] la FTR 1200 custom pour tester le marché ; cette moto a été élue plus beau concept du salon. Quand on l’a dévoilée, on a été débordés sous les questions de la presse et des particuliers !
C’est donc une piste...
On dessine un peu l’avenir qu’on pourrait avoir, on aura forcément un rapport avec le passé parce qu’indian a été autrefois très impliquée dans le flat-track, on a relancé la compétition, gagné le championnat l’an dernier... Il est fort possible qu’on lance en 2019 une gamme de motos qui s’adressera à une clientèle plus large.
Comment est perçue l’europe chez Indian ?
Elle est très bien considérée. On va développer un bureau de design – nous venons d’ailleurs d’intégrer comme chef de design Ola Stenegard, le papa de la ninet, l’un des acteurs du renouveau BMW. Il va travailler pour nous sur les produits internationaux et nous aider à coller un peu plus au marché.
Quels sont les objectifs d’indian en termes de volumes de ventes mondiaux ?
40 000 motos cette année. Pour la suite, notre plan est de tripler ces volumes vers 2021-2022, avec l’apport d’une nouvelle plateforme, les nouveaux modèles qui vont se décliner. On va attaquer un marché qui va être plus en compétition avec les marques européennes ou japonaises, mais nous serons toujours premium, avec les motos toujours garanties cinq ans pièces et main-d’oeuvre. La fidélisation client aujourd’hui est déterminante, une des clés de la progression rapide est là. Nous ne sommes pas dans la conquête, mais dans la fidélisation.