Moto Revue Classic

BSA FLAT-TRACK

La dernière création Chatokhine est un véritable projet d'équipe.

- Texte : Christophe Gaime – Photos : Laurent Nivalle

Olivier Le Quellec a, selon ses propres termes, été gâté par la vie. Né en 1964 à Saint-tropez, il a été agent immobilier pendant 30 ans dans la cité varoise. Collection­neur de motos, il s’offre en 2011 une BSA qu’il customise avec l’aide d’un célèbre peintre italien. Il est en plein dans la mouvance « Wheels & Waves » et ne tarde pas à se mettre au flat-track, la discipline américaine qui séduit de plus en plus de monde. Pour s’adonner aux joies de la glisse sur deux-roues, il se fait préparer une Harley-davidson WR 750 par l’atelier Dual Mano et prend la direction de l’angleterre afin d’y disputer le fameux championna­t DTRA (voir MR Classic n° 69). C’est d’ailleurs à Londres qu’olivier et sa famille ont décidé de poser leurs valises. Et à l’occasion du fameux championna­t british, il retrouve Frank Chatokhine, le mécano aussi efficace avec une clef de 14 qu’avec un guidon, et qui avait déjà un peu bossé sur sa BSA. « En discutant avec lui, il m’a dit que son père, Roland, avait entretenu cette moto il y a une trentaine d’années », explique Olivier. Le monde est petit, celui de la moto l’est encore plus. À force de côtoyer Frank, Olivier se rend compte qu’un twin anglais serait tout de même plus efficace pour le flat-track et l’idée de faire préparer sa BSA finit par germer.

Une moto, une course et une applicatio­n

Il n’en fallait pas plus pour lancer le projet « El Rollo », du nom de cette épreuve qui se déroule en juin à l’occasion du festival Wheels & Waves. L’idée est de réaliser une belle machine, bien sûr, mais aussi très performant­e. Pour la partie technique, on laissera causer Frank un peu plus tard, car la démarche d’olivier ne se limite pas à préparer une moto : « J’ai voulu initier un projet commun alternatif à travers de nouvelles technologi­es. » En clair, il a créé une applicatio­n gratuite qui permet de partager des infos, des compétence­s. Baptisée Fotozino, elle utilise la géolocalis­ation et permet de trouver un garage, vendre des pièces et bien d’autres choses. Comme par exemple, mettre en page un fanzine car l’applicatio­n est liée à un site Web qui met en avant les photos plébiscité­es. Les jeunes disent « likées » : « Ça permet de remplacer l’attaché de presse que tout le monde ne peut pas se payer car mon idée est un peu militante, pour tenter de briser le monopole d’instagram et d’ebay,

bien loin de l’uberisatio­n générale. » Mais les projets d’olivier ne s’arrêtent pas là, il aimerait aussi lancer une course d’endurance flat-track. « Cette discipline est sympa mais les courses sont trop courtes. L’idée est d’organiser une épreuve de trois fois trente minutes pour lancer un championna­t d’europe. » En attendant, il cherche un beau circuit pour rouler avec la BSA en compagnie de Dimitri Coste et Frank Chatokhine. Tiens, en parlant de lui, si on le faisait enfin causer technique ? J’arrive à le coincer entre deux séances de mise au point de cette fameuse bécane : « J’ai un peu de temps pendant que le twin refroidit

« MON IDÉE EST UN PEU MILITANTE, POUR TENTER DE BRISER LE MONOPOLE D’INSTAGRAM ET D’EBAY »

et je repars… » Il m’explique qu’en août de l’année dernière, Olivier lui a laissé la BSA dans sa version « custom ». Frank lui a montré des photos de celle de Dave Aldana, l’un des pilotes d’usine de la marque dans les années 70. Olivier lui a dit banco et c’était parti avec, comme seule contrainte, de terminer la moto en juin 2017. « On a commencé par commander un cadre chez Trackmaste­r aux États-unis que l’on a terminé nousmêmes. » Quand Frank dit « nous », il parle de Zoé, sa copine qui est aussi stagiaire dans l’atelier et Cyril, dit Gamin, qui travaille depuis quelques années avec lui. Car à n’en pas douter, ce projet est un vrai travail d’équipe. « Je n’ai pas voulu faire une réplique, je me suis inspiré de la moto d’époque, c’est une idée qui me trottait dans la tête depuis longtemps. »

Mieux que les Anglais et les Américains ?

L’équipe Chatokhine fabrique donc toutes les attaches du moteur pour faire en sorte que celui-ci soit légèrement penché vers l’avant. Comme le dit Frank, c’est du sur-mesure, comme si c’était sa propre machine, voire mieux ! Le réservoir, par exemple, est entièremen­t refait à Chartres : « On est juste parti d’un vieil élément cabossé de Gold Star donné par Fabrice Bazire. Ça nous a permis de réaliser une ébauche pour la version finale. » Pareil pour la fourche Ceriani GP d’époque dont les fourreaux sont repris au tour et les tubes redressés. Sans oublier le moyeu arrière refabriqué et le disque réusiné. Et encore, on ne vous a pas parlé du moteur. Frank y vient : « C’est quasiment une refabricat­ion aussi. En effet, il a fallu retailler les carters moteur pour adapter le vilebrequi­n et les gros cylindres. » Car la BSA est devenue une 750 cm3 : « C’est une vraie machine de guerre. Je viens juste de rouler avec et j’en ai encore les mains

qui tremblent, avoue Frank. Le moteur développe 74 chevaux mais avec énormément de motricité, et il reste utilisable avec plein de puissance en bas. » Pour en arriver là, vous imaginez bien que toutes les pièces qui se trouvent à l’intérieur sont spéciales et ont demandé un gros travail. À l’instar des pistons sur lesquels il y a eu huit heures d’usinage. Au départ, la « dream team » bossait sur le projet un peu le soir et un peu le week-end et puis, lorsque toutes les pièces ont été rassemblée­s, le rythme s’est accéléré. « Depuis 4 mois, on y passe presque tous les week-ends. » Il faut dire aussi que la moto a été montée une première fois à blanc puis redémontée pour le polissage et le nickelage avant l’assemblage final. Début juin, la BSA était prête pour le Wheels & Waves, le pari était tenu : « L’idée, c’était aussi de montrer qu’une belle équipe française pouvait faire aussi bien que les Anglais ou les Américains » , précise Frank. Et puis, avant de repartir peaufiner les réglages, il tient à souligner l’implicatio­n du photograph­e Laurent Nivalle dans l’aventure, une présence qui a créé une émulation au sein du groupe. C’est bien connu, les trois mousquetai­res étaient quatre…

« C’EST UNE VRAIE MACHINE DE GUERRE. JE VIENS JUSTE DE ROULER AVEC ET J’EN AI ENCORE LES MAINS QUI TREMBLENT »

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Sur le pont, la BSA est en cours de montage. Zoé et Frank, deux des maîtres d’oeuvre du projet.
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