Moto Revue Classic

Depuis deux ans, Egli Motorcycle­s a changé de directeur, pas de direction.

Depuis deux ans, Egli Motorcycle­s a changé de directeur mais pas de direction. Bien au contraire.

- Texte : CG – Photos : AK

C’était en janvier 2015, par une poignée de main (du moins pour immortalis­er la scène), Fritz Egli, 78 ans, cédait le nom, l’activité et le stock d’egli Motorcycle­s à Alexander Frey, un jeunot de 50 ans ! Ce chef d’entreprise dynamique est plus connu en Suisse pour ses participat­ions aux 24 Heures du Mans automobile mais en revanche, ses deux fils sont « bien branchés » deux-roues. Ils sont même associés au sein d’une concession Kawasaki, Indian et Royal Enfield dans les environs de Zurich. Et c’est pas leur biais que le lien s’est tissé avec Egli car, à l’époque, Fritz était encore importateu­r de la marque pour la Suisse. En amateur de belles mécaniques, Alexander veut refaire d’egli une véritable marque et c’est lui qui a eu l’idée de la Fritz W. à moteur Yamaha XJR. C’est lui aussi qui a engagé une Egli-vincent 500 dans le Classic TT dès 2015. La moto pilotée par l’autrichien Horst Saiger a été construite par Patrick Godet mais, depuis, les mécanicien­s suisses se sont penchés sur la question. D’ailleurs, lors de notre visite, le soudeur maison était en train de mettre la dernière main au cadre.

Fritz, businessma­n visionnair­e

Car lorsqu’alexander a repris Egli, il a eu l’intelligen­ce de garder tous les anciens, comme Othmar par exemple, le soudeur en question, mais aussi le mécanicien Jürg Lindenmann, qui est entré dans la maison le 13 avril 1981 ! Au moins c’est précis. « Quand je suis arrivé, on ne parlait quasiment plus des Vincent, en revanche, les quatre-cylindres japonais avaient le vent en poupe avec les Kawasaki Z 1000 J et les Honda CB 900, nous explique-t-il avec un grand sourire dont il ne se départ jamais. J’ai fait mon apprentiss­age en montant une Kawasaki suraliment­ée avec du protoxyde d’azote et par la suite, je me suis occupée de préparer les versions Turbo. » Durant ces années 80 où tout semble possible, Fritz propose des machines extrêmes, comme la MRD-1 replica sur base Kawasaki qui développe entre 130 et 180 chevaux (suivant la pression du turbo) et peut atteindre 300 km/h ! Reconnaiss­able entre mille, elle arbore un radiateur monté sur le dosseret de selle dont les deux durites courent sur le côté gauche. Un exercice de style typique de la culture Egli. Concernant le cadre, si la recette principale est toujours la même,

à savoir le gros tube central, en revanche, la suspension arrière s’effectue par le biais d’un seul amortisseu­r en position Cantilever. « Cette machine a énormément fait pour l’image de la marque, en Allemagne particuliè­rement, et à cette époque, notre importateu­r local nous commandait beaucoup de partiecycl­es. J’en envoyais 10 par semaine et la plupart d’entre elles étaient ensuite montées avec des moteurs d’origine par les clients… » Assemblée entièremen­t en Suisse par Egli avec un moteur Kawa, elle prenait le nom de Bonneville, ou Red Hunter avec le moteur Honda CB 900. Préparées ou non, toutes ces machines avaient fait l’objet d’une homologati­on en bonne et due forme, même la version turbo ! « Aujourd’hui, il y a beaucoup de copies, mais on a conservé tous les numéros et on peut authentifi­er une moto très facilement » , prévient Jürg. Sauf qu’à la fin des années 80, lorsque les Japonais ont proposé des superbikes « clé en main », les Egli rouges n’ont plus trouvé preneurs. Avant la « crise », en bon businessma­n, Fritz avait déjà réagi et s’était lancé dans l’importatio­n de Yamaha Vmax directemen­t des USA où le modèle est plus puissant qu’en Europe. Il faut dire que depuis les années 70, il importait déjà des Chevrolet Corvette du pays de l’oncle Sam. Il connaissai­t donc la filière. En 1986, les 1200 Yam’ en version V-boost arrivent par container dans le petit village suisse et la clientèle ne manque pas. Une soixantain­e de motos sont écoulées tous les ans. Fritz va évidemment proposer de nombreuses pièces permettant de modifier la Vmax, allant du réservoir grande contenance au bras oscillant alu, en passant bien sûr par la suraliment­ation. Sauf que l’importateu­r suisse finit par s’agacer et il tente d’empêcher Fritz de poursuivre son petit commerce. En vain. Sentant pourtant le vent tourner, Fritz se lance dans l’importatio­n de marques

FIN 80, LES JAPONAIS PROPOSENT DES SUPERBIKES « CLÉ EN MAIN », LES EGLI NE TROUVENT PLUS PRENEURS

« exotiques » comme Royal Enfield, MZ, Sachs, puis plus récemment Rieju et Sherco. Avec les deux premières citées, le mécanicien va pouvoir faire étalage de tout son savoir-faire. Il va jusqu’à collaborer directemen­t avec le fabricant indien en portant le gros monocylind­re à 535 et même 625 cm3. Cette dernière version développan­t 47 chevaux. Jürg se souvient : « On a beaucoup travaillé sur ces mécaniques. C’était intéressan­t mais les transforme­r coûtait très cher et l’usine a préféré investir dans un nouveau moteur. Malheureus­ement, il manque toujours de puissance pour le marché suisse… » Avec MZ, Egli décide de reprendre le chemin des circuits.

Les demandes de restaurati­ons affluent

Rachetée à la fin des années 90, la marque allemande propose des machines de supermotar­d animées par des moteurs Yamaha 660 cm3. Sans trop toucher aux cadres, Egli va en faire d’excellente­s machines de course qui vont truster les victoires dans la catégorie en Suisse. Et évidemment, elles étaient repeintes en rouge. Jürg intervient : « Le marché des motos modernes est devenu compliqué mais en revanche, on a de plus en plus de demandes pour des restaurati­ons ou simplement des refabricat­ions de pièces. Le fait que Patrick Godet ait continué à fabriquer des Egli-vincent a contribué à maintenir la marque en vie et aujourd’hui, la politique d’alexander Frey va dans le bons sens. » Cette politique, elle est d’abord passée par l’abandon de l’importatio­n d’autres marques, Egli n’étant plus que distribute­ur de Royal Enfield. Puis il s’agit de proposer de nouvelles machines rouges, comme la 1300 Fritz W. Et enfin de continuer à faire vivre les créations du passé. Ça se concrétise par la vente de pièces, par l’entretien des machines des clients et par des restaurati­ons complètes. Deux à trois par an d’après Jürg. De quoi occuper la dizaine de personnes présentes actuelleme­nt. « Et puis je suis tellement content de remettre en route des motos que j’ai montées il y a 30 ans ! » , conclut notre fidèle mécanicien. Avec le sourire, bien sûr.

CONTINUER DE FAIRE VIVRE LES CRÉATIONS DU PASSÉ

 ??  ??
 ??  ?? 1
1
 ??  ?? 2
2
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ??
 ??  ?? 2
2

Newspapers in French

Newspapers from France