KAWASAKI H1-H2
KAWASAKI 500 MACH III ET 750 H2
500 Mach III et 750 H2, deux légendes 3-cylindres mises côte à côte dans MRC.
Lorsqu’on parle de trois-cylindres Kawasaki, on évoque toujours la 500 Mach III et la 750 H2 mais cependant, elles ont rarement été mises côte à côte. MR Classic l’a fait !
Àl’instar de la Honda CB 750, la simple évocation des Kawasaki trois-cylindres Mach III et H2 déclenchent des réactions incontrôlables, chez les amateurs de deux-temps, s’entend. C’est si vrai qu’on affuble aujourd’hui la première de la lignée d’un pseudonyme inusité à l’époque, « la faiseuse de veuves ». Mais bon, on aime bien entretenir la légende… Il est cependant vrai que la 500 Mach III – que l’on n’appelle pas encore H1, même si le premier catalogue pour les ÉtatsUnis mentionne « Model H1 » – provoque une révolution dans l’univers de la moto dès 1969, le twin de la Suzuki T 500 se trouvant relégué au rayon des motos de tourisme. La H2, ou Mach IV, pour sa part, n’a pas de surnom mais pousse à l’extrême le concept du trois-cylindres deux-temps au point que personne n’a osé renchérir par la suite, ou presque. Pour comprendre le succès de ces Kawasaki, il faut se replonger dans la deuxième partie des années 60. La France motocycliste ronronne sur des productions européennes principalement anglaise ou allemande, parfois italienne et le secteur au bord de l’abîme trouve du sang neuf avec des productions exotiques. Jolies, biens finies et performantes, ces toutes nouvelles motos japonaises ne séduisent pas le motard traditionnel qui n’y voit que des motos pour « minet propre sur lui ». Et puis les productions de l’archipel lointain s’accompagnent d’une réputation de plagiat de motos européennes. Même avec une indéniable mauvaise foi de ses détracteurs, ils n’ont pas complètement tort non plus. Kawasaki, pour sa part, est à la fois imprononçable et totalement inconnu quand fin 1967, un contrat d’importation est signé en France avec une toute nouvelle société, une start-up de l’époque avec comme seule caution celle de Jean Murit, le concessionnaire multimarques de la capitale. À la tête de l’entreprise qui sous-loue un bureau minuscule à mi-temps à une compagnie de courtage de métaux à Paris, Xavier Maugendre, remonté à bloc après avoir quitté Honda, restera celui qui a imposé la marque Kawasaki en France. Le marché ne donne pourtant pas cher de la peau de la Sidemm et du quatrième constructeur japonais avec ses très évolués twins deux-temps 250 et 350 et sa 125 mono, surtout que les 35 premières motos arrivent en mai 1968, c’est-à-dire n’arrivent pas. À cette même date, la rumeur annonce déjà une 500 (la cylindrée de la catégorie reine des GP) à trois-cylindres et architecture inédite à trois pots (un gage de sérieux), histoire de concurrencer la sportive Suzuki T 500. Les bruits de couloir se confirment en octobre 1968 avec la présentation de la 500 Mach III aux États-unis,
LA PREMIÈRE IMPRESSION EST TERRIBLE, LE BRUIT SI CARACTÉRISTIQUE SONNE LA CHARGE ET PREND AUX TRIPES
pays qui absorbe le plus grand nombre de machines japonaises. Cet avion de chasse – produit d’ailleurs par un avionneur, ce que ne manquent pas de rappeler les premières brochures commerciales – revendique des performances encore inconnues pour une moto de série avec 60 ch, 200 km/h et 12,4 secondes au 400 mètres. L’univers de la moto entre dans le XXIE siècle et cette 500 Mach III est un coup de semonce, 4 mois avant la déferlante provoquée par la Honda Four 750.
De la fumée et du vacarme
La légende raconte que Kawasaki aurait d’ailleurs volontairement devancé la présentation de la Honda pour avoir, même sur une courte période, la faveur des médias. Ces deux monstres sacrés restent finalement très éloignés, avec une Honda certes « high-tech » mais résolument sage et une Kawa, elle, très délurée. Ce qui est vraiment nouveau avec la Mach III est certes mesurable à la lecture de la fiche technique avec ce moteur trois-cylindres, mais sa force reste les nouvelles sensations offertes à son guidon. Un peu comme lors d’un concert de Jimi Hendrix : on ne sait plus si l’on est grisé par la musique ou par les effluves des pétards qui circulent… De la fumée et du vacarme, il est en grandement question lorsque la Mach III d’olivier Hine quitte l’atelier Au bonheur des Bielles. Au milieu de cette cité chaude de Gennevilliers, les sauvageons, pourtant visiblement habitués aux excentricités sur deux roues, restent sous le choc. À la seule différence que la moto du voyou d’hier est devenue celle du mec respectable aujourd’hui. La fête va néanmoins tourner court : en moins de cinq kilomètres, c’est la panne, le porte-fusible à 1euro nous a fait faux bon. Les choses s’arrangent le lendemain avec une Kawa de nouveau pleine de vie. On repart tout de même avec la revue technique et un kit de survie composé de trois bougies au cas où… car la moto d’olivier n’est pas restaurée et il s’agit bien d’une « sortie de grange » ! Pour la H2, pas de problème, son proprio, le fondateur du site Internet Mach Iv.com, se marre des caprices de la 500, sa H2 tournant sur son ralenti
au premier coup de kick. Les deux 3-cylindres de légende étant enfin réunis, la fête peut alors commencer et histoire de reprendre les choses chronologiquement, elles débutent avec cette Mach III « dans son jus » qui se dégourdit les rayons au fil des kilomètres. La première impression est terrible, le bruit si caractéristique sonne la charge et prend aux tripes. Franchement creux en bas au point d’obliger un bon usage de l’embrayage et de la poignée des gaz, le moteur se fait soudainement violent, presque nerveux et assurément pointu. Sans parler de chrono, la 500 génère des sensations «moteur » fantastiques, l’impression de fusée est renforcée par l’absence de frein avant, à tel point qu’en 20 bornes, le pauvre double came s’est purement et simplement évaporé. Cette doléance reste la plus pénalisante pour la Mach III, interdisant d’en extraire la quintessence ou simplement de circuler l’esprit tranquille. Pour le reste, elle possède une partie-cycle presque moderne, notre exemplaire d’essai sans amortisseur de direction n’a jamais montré de signe de faiblesse, mais plutôt un caractère bien trempé, tempéré par une garde au sol très réduite. Replacée dans son temps, il est évident que cette Mach III pouvait s’apparenter à une moto de course en vente libre, mais aussi à un café racer, tant par ses performances que son tempérament. En passant de la 500 à la 750, vous entrez dans un autre monde et autant l’avouer tout de suite, ces deux machines issues de la même fratrie ne partagent qu’un moteur à trois-cylindres. Ce jugement que certains trouveront un peu exagéré pour des motos d’une même gamme séparées de moins de trois ans est éclatant en passant de l’une à l’autre. La H2 ou Mach IV est résolument moderne, une modernité propre à la rendre utilisable et ce, même aujourd’hui. Quitte à se répéter, il faut garder en tête qu’entre la H1 de 1969 et la H2 de 1972, il est impossible d’ignorer la CB 750 qui instaure de nouvelles donnes, notamment la cylindrée de 750 et le frein à disque. La H2 est donc la réplique logique à Honda, en attendant la vraie réponse à 4-temps : la Z 900, qui inaugure le premier frein à disque à commande hydraulique pour Kawasaki et dispose de la bonne carrure pour combattre la CB d’égale à égale. Cette vocation de concurrente est éclatante de nos jours, alors que la H1 était un premier jet, peut-être même un brouillon.
La H2, première moto de série adaptée au wheeling
Il n’en est pas moins vrai que cette 750 garde le grain de folie des 2-temps Kawa, notamment l’exubérance d’un 3-cylindres extrémiste avec 748 cm3 et 74 ch. Dans le détail, Kawasaki n’a pas simplement ajouté 14 chevaux (et 21 kilos au passage), mais a pourvu le bloc d’un couple respectable de 7,9 mkg au régime assez conciliant de 6 500 tr/min, alors que la H1 avoue 5,85 mkg à 7 000 tr/min. Avec ses nouvelles caractéristiques, le moteur de la H2 est à la fois plus plein, nettement plus facile à l’usage et assez tonique pour faire de la H2 la première moto de série adaptée à la mode du