Moto Revue Classic

DUEL DE VMAX

Comme toutes les motos légendaire­s, la Vmax semblait immortelle. Il y a dix ans, pourtant, une version 1700 est venue défier la vieille 1200...

- Texte : Peter Wicked

La légendaire Vmax 1200 a vu débarquer une 1700 dans sa cour en 2009...

La ligne de la Yamaha Vmax première génération est le fruit du travail du bureau GK Design, proche du constructe­ur japonais et d’ed Burke, le concepteur américain qui en eut l’idée au départ. En 1985, quand elle est présentée aux concession­naires américains, c’est l’emballemen­t. Le style agressif, les performanc­es annoncées et quelques détails, comme les écopes d’air forcé et un pneu arrière ultra-large, font beaucoup parler d’eux. Pas prévue pour l’europe et bien évidemment réclamée à cor et à cri par les petits Frenchies, elle débarque en 1986, grâce au patron de Sonauto Yamaha, Jean-claude Olivier. Sur notre sol, la puissance initiale de 145 chevaux doit être ramenée à la limite admise, soit 100 chevaux. Ce ne fut pas tâche facile et au passage, la Vmax perdra son fameux V-boost, d’ailleurs plus générateur de sensations que de puissance pure. Son moteur, un V4 à 70° de 1 198 cm3, provient de la Yamaha Venture, concurrent­e de la Honda Goldwing. Des grosses soupapes (quatre par cylindre) et des arbres à cames méchants ainsi que des équipement­s mobiles internes plus légers et des carburateu­rs plus gros lui permettent d’atteindre ces sommets de puissance (enfin, pas chez nous).

Lourde, pataude... mais surpuissan­te

On sait la carrière incroyable de cette moto, vendue à quasiment autant d’exemplaire­s en France qu’aux ÉtatsUnis tout au long de sa carrière, de 1986 à 2005. Elle a généré une foule de fans réunis dans des clubs très actifs. Pourtant, elle n’a évolué que par petites touches… de couleur. Seule évolution marquante : en 1993, l’adoption d’une fourche de plus gros diamètre (de 41 à 43 mm) et de nouveaux freins (étriers et disques issus de la 1000 FZR) permettra enfin de tirer meilleur parti de cette moto. Enfin presque... Contact. Au ralenti, la mécanique émet une sonorité suave et bien présente. Première, la boîte est ferme mais sans réticence, on décolle sur un filet de gaz avec juste l’impression d’avoir une grosse moto sous les fesses. Au feu vert, la tentation d’ouvrir en grand est inévitable. La réponse à la poignée de gaz génère un bon coup de pied sous le fondement, la machine se tend sur son cardan et s’arrache de l’asphalte. Surtout qu’à partir du premier tiers de la poignée de gaz, ça pousse vraiment beaucoup. Poussées limitées par l’indigence du freinage avant. Pas de mordant, une course de levier spongieuse et un résultat vraiment pas rassurant. Une fois rejointes les vraies routes françaises qui tournent, montent et descendent, on peut profiter de la mécanique qui relance fort à bas régime et dispose d’une allonge vraiment réjouissan­te. Mais très honnêtemen­t, les comporteme­nts de la partie-cycle incitent inévitable­ment à rendre la main. Ça plonge sur les gros freinages qu’il faut anticiper de plus en plus quand la vitesse augmente, la fourche s’affole et les amortisseu­rs réagissent mal. Du coup, on enroule en profitant de la grosse propulsion et on pilote en trajectoir­es appliquées. On la trouve lourde, pataude… mais surpuissan­te. Arrêtée en 2003, elle est commercial­isée, pour les derniers exemplaire­s, jusqu’en 2005. Son absence est cruellemen­t ressentie par les fans du modèle qui réclamaien­t une Vmax moderne… Cela a donné naissance, en 2006, à une série de projets qui a été testée sur le public

DEPUIS L’ARRÊT DE SA COMMERCIAL­ISATION EN 2005, LES FANS RÉCLAMENT UNE VMAX MODERNE

des salons internatio­naux avant de devenir cette 1700, sortie en 2009. Son moteur, qui respecte l’architectu­re du modèle originel, le V4, est en revanche ouvert à 65°. L’alésage, qui passe de 76 à 90 mm, est multiplié par une course inchangée de 66 mm, ce qui donne 1 679 cm3. Yamaha propose évidemment ses récentes avancées technologi­ques sur ce moteur, avec de nouvelles chambres de combustion à quatre soupapes en toit et de nouvelles culasses encore plus compactes. Cellesci sont dotées d’un nouveau système d’entraîneme­nt des arbres à cames (chaîne et pignon) et l’angle des soupapes est réduit à 29°. Les pistons en aluminium forgé, les bielles cémentées (utilisées sur la R1 depuis 2004), la « boîte à air » deux fois plus grosse que sur la 1200, les carters en magnésium, l’embrayage antidribbl­e… tous les raffinemen­ts sont présents.

De volumineux à démesuré

Le tout est complété par une gestion électroniq­ue des gaz de type « Drive by Wire » et par un système d’admission d’air variable. Un gros effort a été fait pour garder ce moteur le plus compact possible : le V4 n’a augmenté que de 6,5 mm en hauteur et se permet même d’être plus court de 27 mm. Après un bon moment passé à contempler les belles pièces de la Vmax du XXIE siècle, et avoir constaté un niveau de finition irréprocha­ble – tant dans la qualité des peintures de carrosseri­e ou des pièces métallique­s que dans les traitement­s de surfaces (anodisatio­n bronze, brossage des écopes ou des échappemen­ts) –, il est temps de lui grimper dessus. Une fois assis sur la selle, un peu plus basse que

LA POUSSÉE EST INCROYABLE ET LES SENSATIONS GRISANTES. IL FAUT VRAIMENT SE RAISONNER...

celle de la 1200, ce qui pouvait paraître volumineux sur la première génération semble ici comme démesuré. Les commandes au guidon et aux pieds ne changent pas beaucoup, mais le guidon et le réservoir, plus larges, procurent une impression gargantues­que. Si la 1200 se livre sans trop de difficulté­s, la 1700 est franchemen­t impression­nante. Surtout à l’arrêt où les 310 kilos se font sentir. Désormais munie de l’injection, la mécanique est pourtant d’une douceur incroyable à bas régime. Le couple phénoménal de 14,5 mkg à 5 000 tours de la version française vous entraîne néanmoins directemen­t vers les excès. La poussée est incroyable et les sensations grisantes. Il faut vraiment se raisonner. Certes, cette Vmax à la française (106 chevaux au lieu de 200 ! ) n’est pas plus puissante que le dernier roadster à la mode, mais ses 310 kilos et l’inertie qui en découle ainsi que son couple de locomotive diesel ont vite fait de vous calmer. Avec un rien d’habitude, on changera de point de vue, découvrant même une partie-cycle très précise et relativeme­nt agile. Rien à dire, c’est beaucoup mieux que la 1200. Cependant, on comprend très vite que cette moto sera plus à l’aise sur les grands boulevards bien droits que sur les spéciales de rallye. Son credo, c’est le superlatif, le commentair­e du badaud, les questions enfiévrées des petits garçons… Reste qu’elle risque fort de devenir, comme sa devancière, un objet de collection et de passion, et c’est pour ça qu’on l’aime déjà. ❖

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Photos : Ola Osterling
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