Moto Revue Classic

MAG JAPAUTO

Impliqué en endurance pendant 20 ans, Japauto était bien plus qu’un concession­naire Honda, puisqu’au-delà de la compétitio­n, il a également commercial­isé des machines dérivées de la CB 750 sous son nom. Un double investisse­ment mené de main de maître par

- Par Christian Batteux. Photos archives MR et CB.

Concession­naire et constructe­ur, Japauto a produit ses propres motos.

C’est une bien belle

histoire, « quelque chose qu’on ne verra plus jamais» , comme le dit Patrick Massé, le président du club baptisé 1000 VX Club de France, du nom d’une des deux motos construite­s et commercial­isées par Japauto. En effet : un concession­naire qui engage une équipe pendant aussi longtemps dans la course et qui, au cours des années 70, devient également constructe­ur (aussi modeste soit-il), ça ne se verra plus. Les temps ont changé mais l’intérêt de raconter cette épopée directemen­t liée à notre Honda CB 750 Four reste vif. C’est ainsi que tout en appuyant ses propos par une sélection des nombreuses photos tirées de nos archives et commentées par ses soins, Patrick Massé nous a retracé les contours de cette aventure fabuleuse. « C’est en 1966 que Christian Vilaséca a créé Japauto, ce qui voulait avant tout dire “autos japonaises’’, comme ce nom le laisse deviner. Et c’est au moment de la sortie de la CB 750 qu’il a agrandi la division moto de sa concession, embauchant Robert Assante pour qu’il s’en occupe. Bien sûr, le Bol d’or de l’année 1969 marque le début d’une histoire qui va durer vingt ans, à savoir l’engagement en endurance.

Vingt ans de compétitio­n

À propos de la machine qui a gagné la course (avec Daniel Urdich et Michel Rougerie), plusieurs versions existent, sans certitude sur la véracité de l’une ou de l’autre de ces versions… Certains disent qu’elle aurait été préparée par Honda Japon et qu’elle était en effet prévue pour des pilotes anglais, lesquels n’ont finalement pas pu participer à l’épreuve étant donné qu’elle n’était pas internatio­nale… Enfin, toujours est-il que cette victoire a été le déclencheu­r d’une aventure qui allait donc perdurer jusqu’en 1989. L’histoire veut qu’ils avaient préparé une moto pour le Bol d’or et que la machine dont ils ont finalement hérité est arrivée juste avant le week-end de la course. C’est Robert Assante qui avait proposé Michel Rougerie pour rouler avec Daniel Urdich, Rougerie qui courait en petites cylindrées au niveau national et travaillai­t occasionne­llement comme mécanicien chez Japauto. Ce dont il faut se souvenir, c’est que tout cela s’est fait très vite, à la limite de l’improvisat­ion, avec cependant le résultat que l’on sait (sourire)… Ensuite, l’investisse­ment de la concession n’a plus cessé ; il faut dire que les affaires marchaient très bien : on parle à l’époque de clients qui venaient taper sur la vitrine du magasin pour acheter des Honda CB 750 Four ! Sur les palmarès officiels du Bol d’or, c’est Honda qui apparaît en 1969 mais lors des deux victoires remportées en 1972 et en 1973, c’est bel et bien Japauto qui est inscrit sur les tablettes internatio­nales. Japauto qui à l’époque était un constructe­ur : il commercial­isait des Japauto,

des Honda modifiées par ses soins, c’est ainsi qu’il est donc resté dans l’histoire officielle de l’endurance. En 1974, la marque a par exemple commercial­isé une petite centaine de Japauto en Espagne (73 unités de 1000 VX et environ 25 de 500 VX sur base de CB 450), sans qu’elles ne portent plus aucun marquage Honda. Ni sur la selle, ni sur le moteur… C’étaient des Japauto, des motos françaises. Je crois qu’à l’époque, il fallait que 60 % du prix de la machine soit français pour qu’elle soit considérée comme française, main-d’oeuvre comprise. Dans le détail, si le magasin était depuis 1969 situé sur l’avenue de la Grande-armée à Paris, l’atelier de LevalloisP­erret était consacré à la préparatio­n et au montage

des motos marquées Japauto. Alors bien sûr, Christian Vilaséca avait les moyens mais si ces années de compétitio­n ont dû lui coûter cher, ce passionné n’a jamais hésité à s’engager à fond. À l’époque, Japauto était le premier vendeur Honda de France et même d’europe (aujourd’hui, Japauto fait partie d’un trio de concession­naires Honda qui s’échangent régulièrem­ent la première place, avec ceux de Marseille et de Nice). Enfin, le gros de l’histoire s’est déroulé durant les années 70, avec ces trois victoires au Bol d’or, ces engagement­s sur des saisons complètes de championna­t d’europe d’endurance, et bien sûr la production de motos Japauto. Vilaséca, Assante et Ruban furent les trois piliers de cette aventure. Pour l’engagement en compétitio­n bien sûr, comme pour la mise au point et la commercial­isation des motos Japauto.

Premières replica de course

Jean-claude Ruban était le technicien de l’équipe, le plus pointu dans ce domaine. Il est parti en même temps que Assante en 1976 suite à une mésentente avec M. Vilaséca, le visionnair­e et le patron. En fait, Japauto est peut-être le premier à avoir produit et commercial­isé des replica de course, en tout cas d’endurance. Elles ont été vendues uniquement en France, jamais en Espagne, où les machines étaient en revanche dotées d’un réservoir spécifique. Je n’ai jamais vu rouler des modèles avec la coque, c’est une mode qui n’a pas perduré dans le temps. Ensuite, à partir du moment où les Honda CB 750 F1 puis F2 sont sorties, l’intérêt commercial des Japauto a décliné, jusqu’à ce qu’elles deviennent quasi confidenti­elles. C’est une histoire qui reste exceptionn­elle, une équipe privée menée par un simple concession­naire qui se lance en plus de ça dans la petite série, c’est quelque chose qu’on ne verra plus… Avec les membres du club, où nous sommes une cinquantai­ne, on se fait une balade annuelle sur deux à trois jours, les uns roulant avec leur 950 SS et les autres avec leur 1000 VX. Généraleme­nt, on essaye de faire ça à la suite d’une manifestat­ion moto type Bol d’or, ainsi ça fait d’une pierre deux coups. On expose les machines sur le circuit. C’est d’ailleurs assez drôle, car des jeunes découvrent les motos Japauto à cette occasion. Et si l’on sait que la réputation de la CB 750 a fait le lien entre plusieurs génération­s, nos Japauto restent pour eux des machines mystérieus­es voire inconnues. Quand je leur explique l’histoire, les vingt ans d’endurance, les trois victoires au Bol d’or, ils sont épatés, surtout quand ils se rendent compte que tout ça venait d’un concession­naire (rire) ! En plus, comme on engage avec Jean-claude Jaubert (le vainqueur du Bol d’or en 1981, qui a aujourd’hui 62 ans) et Matthieu Sauve (25 ans) une moto au Bol d’or Classic (la 1100 R, qui est extrapolée des 24 Heures du Mans en 1982), ça entretient la dynamique (victoires en 2016 et 2018 !). » ✦

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Christian Vilaséca, le patron de Japauto, a engagé sa concession en endurance de 1969 à 1989 (on le voit ici durant la saison 1984).La passion était le fil rouge de la vie de cet entreprene­ur visionnair­e.
 ??  ?? 1- Ici, avant le Bol d’or de 1974, les deux machines sont bien sûr équipées de ce carénage qui a été bien utile à Debrock et Tchernine pour gagner l’édition précédente. 2- La première Japauto engagée au Bol en 1970, cubant à 969,8 cm3. M. Vilaséca met la main à la pâte. 3- Roger Ruiz au Mans validant en mai 1973 le carénage pour le Bol d’or. 4- L’atelier de Levallois-perret où étaient préparées les motos. 2
1- Ici, avant le Bol d’or de 1974, les deux machines sont bien sûr équipées de ce carénage qui a été bien utile à Debrock et Tchernine pour gagner l’édition précédente. 2- La première Japauto engagée au Bol en 1970, cubant à 969,8 cm3. M. Vilaséca met la main à la pâte. 3- Roger Ruiz au Mans validant en mai 1973 le carénage pour le Bol d’or. 4- L’atelier de Levallois-perret où étaient préparées les motos. 2
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Cette Japauto a pris le départ du Tour de France moto en 1976 avec Georges Fougeray.
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3 1- Une version de la 1000 VX sur l’avenue de la Grande-armée, en face de la maison mère. 2- Les trois grâces (!), avec ici dans l’ordre la 1000 VX type Bol d’or, la 1000 VX standard et la 1000 VX Vitesse. 3- Patrick Massé, président du club 1000 VX, nous a raconté l’histoire officielle avant de prendre la pose devant l’une de ses motos personnell­es.
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